Commission d'enquête mutations Haute fonction publique

Réunion du 23 mai 2018 à 16h05

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Photo de Christine Lavarde

Merci pour ces éclairages historiques et contemporains.

- Présidence de Mme Christine Lavarde, vice-présidente -

La réunion est ouverte à 16 h 05.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Nous concluons cette journée d'audition en entendant M. Hervé Joly, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS).

Vous êtes un spécialiste des milieux d'affaires et vous vous êtes spécialement penché sur la place qu'y occupent les inspecteurs des finances. La problématique du pantouflage des inspecteurs des finances est souvent évoquée au cours de nos auditions. Nous aimerions recueillir de votre part une analyse de ce phénomène et de ses conséquences.

Je vous rappelle qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal.

Conformément à la procédure en vigueur, M. Hervé Joly prête serment.

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

J'évoquerai le cas des inspecteurs des finances, mais je m'intéresse plus généralement au pantouflage dans la haute fonction publique et aux grands corps en général. J'ai ainsi eu l'occasion de travailler sur le corps des Mines et sur celui des Ponts & Chaussées.

Le pantouflage des hauts fonctionnaires dans les entreprises privées existe depuis qu'existent les grands corps, soit pratiquement depuis deux siècles. On a souvent tendance à le déplorer, à parler d'une fuite des cerveaux de la fonction publique vers le secteur privé. Pour ma part, je pense que le pantouflage, loin d'être un problème pour l'administration, est consubstantiel au système. Le système en a besoin pour se réguler.

La haute fonction publique se caractérise par deux recrutements de niveau supérieur, l'un de niveau A, l'autre de niveau A+, voire A++. Ainsi, il existe un recrutement au niveau attaché, soit un niveau A, et un autre au niveau administrateur civil, soit un niveau A+. Les inspecteurs des finances peuvent être mis dans une catégorie à part, les A++. La même situation existe dans les corps d'ingénieurs techniques : on distingue les ingénieurs des travaux publics de l'État (TPE) et les ingénieurs des Ponts. Ces gens, qui passent des concours de catégorie A, sont recrutés pour exercer des fonctions d'encadrement et ont fait entre trois et cinq ans d'études supérieures. L'écart de niveau entre eux n'est pas très important, leur formation étant très proche. Il y a des circulations entre les deux niveaux. Il est de plus en plus facile de passer du corps d'ingénieur technique au corps des Mines ou des Ponts, d'autant plus que ceux qui sont initialement recrutés au sein du corps des Mines ou des Ponts partent de plus en plus dans le privé. On a donc besoin des autres, qui pantouflent beaucoup moins, pour faire tourner la machine.

Globalement, le corps supérieur commençait sa carrière là où les autres la finissaient. Alors que l'écart de formation n'est pas très grand, l'écart en termes d'évolution de carrière est très important. Le système de recrutement français des grands corps étant très élitiste, les gens commencent leur carrière très jeune à un niveau très élevé et occupent très rapidement de hautes responsabilités.

Depuis trente ans, les directeurs du Trésor successifs, l'un des postes les plus prestigieux au ministère des finances, sont de jeunes quadragénaires, à deux exceptions près. Certains d'entre eux ont été nommés à 41 ou 42 ans, ce qui est très jeune, soit à vingt-cinq ans de la fin de leur carrière, à un poste qu'ils quittent parfois avant l'âge de 50 ans. Si l'on veut assurer une rotation des personnels, il faut se poser la question de ce que l'on fait de ces fonctionnaires.

Beaucoup vont ensuite dans des entreprises publiques, ou qui étaient publiques à l'époque - Daniel Lebègue a quitté en 1987 la direction du Trésor pour la BNP, qui n'était pas encore privatisée. Aujourd'hui, le nombre d'entreprises publiques se réduisant, il faut leur trouver des débouchés à la hauteur du prestige de leur carrière. Or les débouchés se restreignent. En plus, la commission de déontologie ne s'interdit pas d'examiner les cas de pantouflage dans les entreprises publiques.

Ramon Fernandez et Bruno Bézard ont rejoint non pas des entreprises publiques, mais des entreprises privées, ou majoritairement privées. Le premier est devenu directeur général adjoint chez Orange, le second a rejoint un fonds d'investissement franco-chinois, ce qui a fait scandale. La commission de déontologie s'est saisie de ce dernier cas et a accepté ce pantouflage, sous réserve qu'il ne se mêle pas dans son activité nouvelle d'investissement en lien avec son activité antérieure.

Si on maintient ce modèle - deux niveaux de recrutement et des carrières rapides -, alors que la haute fonction publique est plutôt jeune, l'administration doit s'interroger sur ce qu'elle peut offrir à ces fonctionnaires. Le pantouflage est un peu nécessaire pour qu'ils aient une dernière partie de carrière à la hauteur de ce qui a précédé.

Dans les corps techniques, notamment les plus étroits, il y a un effet d'entonnoir. Ces fonctionnaires exercent des fonctions dans des administrations régionales entre 25 ans et 35 ans. Ils ont ensuite vocation à aller dans les ministères techniques, mais tous ne pourront pas devenir sous-directeurs ou directeurs, compte tenu de l'effectif de ces corps et du nombre réduit de postes, sachant en outre que le nombre de directions a été diminué. Pour ne pas bloquer l'ascension des plus jeunes, le départ vers le privé est donc une nécessité.

Il y a toujours eu une réglementation sur les congés, qui a fait l'objet de nombreux changements depuis deux siècles. Aujourd'hui, tout le monde peut obtenir un congé pour convenance personnelle d'une durée de dix ans. À une époque, il fallait avoir passé plusieurs années dans l'administration avant de pouvoir y prétendre, aujourd'hui, on peut l'obtenir très tôt. En outre, l'administration n'est pas regardante sur le type d'activité pratiquée pendant ces dix ans. Autrefois, on interdisait aux ingénieurs d'avoir des activités financières ou d'ingénieur. Aujourd'hui, on peut faire un peu n'importe quoi.

En revanche, au moment du départ, la commission vérifie si ce que les gens veulent faire est compatible avec ce qu'ils ont fait avant. La commission autorise presque tout, mais émet souvent des réserves. Il existe aussi peut-être un phénomène d'autocensure, certaines personnes renonçant à certaines fonctions en pensant qu'elles leur seront refusées par la commission. En outre, même si la commission rend des avis anonymes, les personnes sont identifiables.

Aujourd'hui, les gens partent de plus en plus tôt en se disant qu'il vaut mieux qu'ils ne prennent pas de responsabilités dans l'administration, au risque de ne pas pouvoir aller où ils veulent ensuite. Ainsi, dans la promotion 2013 de l'inspection des finances, quatre des cinq inspecteurs sont partis en 2017 et 2018 dans le privé, après leurs quatre ans de tournée, qui correspondent à des années de formation. N'ayant pas encore exercé de responsabilités, ils peuvent aller où ils veulent. Deux ou trois ans plus tard, leur départ aurait pu être plus compliqué.

J'ai fait des statistiques sur trente promotions d'inspecteurs des finances. Près d'un tiers des 154 inspecteurs ont démissionné. Les autres sont en grande partie en disponibilité dans des entreprises depuis moins de dix ans et n'ont donc pas encore démissionné. Le pantouflage est donc massif chez les inspecteurs des finances. Dans la dernière promotion, non seulement il est massif, mais il se fait plus tôt. Le risque, si on se montre de plus en plus tatillon sur les conditions de départ, est que les gens quittent de plus en plus tôt la fonction publique.

Les jeunes auront-ils toujours envie d'intégrer les grands corps ? Probablement, car les quatre ans de tournée des inspecteurs des finances sont toujours considérés comme très formateurs. En outre, le fait d'être passé par l'État est encore aujourd'hui un grand atout. Le fait d'être membre de ces grands corps et d'avoir eu une proximité avec le pouvoir administratif et politique est extrêmement précieux. À Polytechnique, les meilleurs éléments choisissent d'aller dans les grands corps techniques civils.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Merci pour ces éléments. L'État ne sait en effet pas bien gérer les membres de ces corps qui n'ont pas une progression de carrière linéaire dans leur administration d'origine. On ne leur propose pas de poste, car la hiérarchie se réduit. Et pourquoi les ferait-on passer devant d'autres qui ont fait toute leur carrière au ministère ?

Vous êtes le premier à voir dans le pantouflage un moyen d'autorégulation du système. Estimez-vous que quelqu'un qui a quitté la fonction publique doit avoir le droit d'y revenir ensuite ?

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

En tant que chercheur, mon rôle n'est pas de faire des prescriptions.

Jusqu'en 1946, les inspecteurs des finances n'avaient droit qu'à un congé d'un an, à l'issue duquel ils devaient choisir entre revenir ou démissionner. Un certain nombre d'entre eux ont démissionné dans les années vingt, mais lors de la crise des années trente, certains ont perdu leur emploi et ont essayé d'être réintégrés. Depuis, la durée du congé a été portée à dix ans pour tout le monde.

Aujourd'hui, certains font le choix par défaut de revenir parce que leur carrière dans le privé n'a pas pris le tournant qu'ils espéraient. D'autres font de brefs retours qui leur permettent de remettre les compteurs à zéro et de prendre un autre congé.

Ce n'est pas forcément intéressant de revenir. Certains réintègrent leur corps, mais occupent des fonctions subalternes jusqu'à la fin de leur carrière. D'autres prennent des responsabilités et reviennent pour occuper un poste de directeur de cabinet ou de directeur d'administration centrale. Ils font alors le choix de sacrifier leur salaire et de le diviser par quatre ou cinq. Je pense par exemple à Stéphane Richard, qui est revenu un temps à la direction du cabinet du ministre des finances. De tels retours sont généralement très provisoires et sont un tremplin avant un nouveau départ dans le privé. Ainsi, Stéphane Richard occupait une fonction de second rang chez Véolia. Il a ensuite pris la direction du cabinet du ministre des finances avant de devenir PDG d'Orange.

Il en est de même pour François Pérol, ensuite parti à BPCE ; il a tiré des bénéfices de son retour dans le public. Ce retour est-il lié à une extraordinaire vocation à servir l'État ou à un retour provisoire ? Faut-il encourager ces allers-retours ? Cette expérience du privé est positive pour des hauts-fonctionnaires qui en ont peu - hormis lors de leurs brefs stages. En Allemagne, pour des responsabilités semblables, les impétrants ne sont pas nécessairement fonctionnaires ; ils peuvent avoir une longue expérience dans le secteur privé. Si cette expérience du privé, en soi intéressante, ne sert que de tremplin, elle constitue un risque : le haut-fonctionnaire n'aura en tête que sa propre carrière, il n'exercera pas ses fonctions en toute indépendance.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Ces gens brillants occupent des places que d'autres auraient pu occuper. Certes, ils ont réussi des concours très exigeants, mais ce n'est pas le baccalauréat... Le vivier est beaucoup plus important de gens compétents et potentiellement plus motivés que ceux sélectionnés par les moyens actuels.

Des fonctions comme celles de directeur général du Trésor ne sont pas seulement techniques : on ne recrute pas des mathématiciens ! Plus ils sont jeunes, plus ils sont créatifs... Il faudrait qu'ils aient l'expérience des personnes touchées par leurs décisions...

Vous réduisez l'explication du phénomène à un problème de régulation de l'administration. Certes, et il faut probablement la changer. Mais vous oubliez une autre dimension : l'existence de ces passages entre le public et le privé n'est pas un hasard, et je me demande si la difficulté à lutter sérieusement contre l'évasion fiscale n'y est pas liée : une même personne lutte contre l'évasion fiscale au ministère et fait l'inverse ensuite dans le privé ? Je soupçonne qu'il faille « ne pas désespérer les banques », pour sauvegarder son parachute quelque part... Ce système vous semble-t-il sain ?

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Certes, mais le phénomène n'est pas récent...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Sur un siècle et demi, il a un peu évolué, mais il est resté massif et consubstantiel au système administratif auquel il permet de respirer. Peu d'ingénieurs du corps des Mines ou des Ponts rêvent de finir directeur de Direccte (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) ou de Dréal (Directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement). Leur corps leur promet une vocation de stratège, qui brasse des affaires importantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

L'État s'est vidé de son expertise, et fait de plus en plus appel à des cabinets extérieurs pour les partenariats public-privé ou pour certains grands marchés. C'est la contrepartie de l'absence de ces hauts-fonctionnaires.

Tous les pantouflages n'ont pas le même impact politique - les ex-ingénieurs du Roi en ont peu, ils continuent leur métier ailleurs... Quel peut être l'impact de ces pratiques ? Ce n'est pas qu'un problème de moralité, c'est un problème systémique.

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Et aussi un problème de salaire, vous l'avez évoqué...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

L'impact sur la prise de décision publique est différent entre un ingénieur des Ponts et un spécialiste décidant de la politique fiscale du pays...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

C'est très difficile à démontrer. La direction des impôts et la direction du budget ne sont pas les lieux où l'on pantoufle le plus, et tout le monde ne pantoufle pas. Je m'interroge sur votre vision d'un contrôle fiscal insatisfaisant en raison de personnes qui vendraient leur âme au diable...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

L'administration n'est pas faite d'individus isolés, sans contrôle...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je parle de la conception globale de la fiscalité, de l'équilibre budgétaire...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Si l'on empêche les départs dans le secteur privé, ces fonctionnaires seront-ils plus intègres ou exigeants ? Je n'en suis pas convaincu... Plus largement, on ne peut pas pénaliser plus les entreprises françaises que les entreprises étrangères. Dans la concurrence internationale, la France a des impôts plus élevés qu'ailleurs. Je me méfie des simplifications qui verrouillent une personne sur sa fonction.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Le problème est l'aller-retour. S'ils s'en vont, qu'ils le fassent définitivement !

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Les allers-retours sont très limités.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il y en a un certain nombre dans la haute fonction publique...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Les allers-retours réussis sont rares. Souvent, la personne a raté son passage en entreprise, et se retrouve alors sur la touche lors de sa réintégration. Les quelques cas ayant abouti à des responsabilités de premier plan sont très minoritaires.

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Faut-il interdire complètement ces allers-retours ? Ces personnes sont fonctionnaires de carrière. Aux États-Unis, en Allemagne, ils seraient issus du secteur privé. La France a connu une exception : le directeur général de l'industrie de François Madelin durant deux ans, Jacques Maisonrouge, était PDG d'IBM France. C'est un cas unique. En France, de tels postes sont réservés aux fonctionnaires de carrière, même s'ils ont parfois fait un petit tour dans le privé auparavant...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Faut-il aller contre cette tendance et cloisonner ? Je n'en suis pas sûr...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Cuypers

On ne verrait jamais une personne ayant quitté une entreprise privée revenir pour avoir un poste prédéfini jusqu'à la fin de sa carrière. Quel est le coût de l'opération ? En France, forme-t-on autant de fonctionnaires qu'il y a de besoins ou sont-ils trop nombreux par rapport aux postes disponibles ?

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Le retour dans l'administration peut avoir un coût. Un ingénieur des Mines ou un inspecteur des finances restant dans son corps d'origine a peu d'avenir : il peut devenir directeur du corps ou l'un de ses deux adjoints. Le corps n'existe que par les fonctions exercées par ses membres à l'extérieur.

Combien de fonctionnaires faut-il ? Il y a cinq inspecteurs des finances par an depuis très longtemps. Les ingénieurs des Mines furent quatre ou cinq jusqu'en 1945, puis leur nombre a augmenté à dix puis vingt après la fusion avec l'école des Télécommunications. Tous les ans depuis 2014, il y en a un de moins - je ne sais pas à quel savant calcul cela correspond. À quoi sont-ils destinés ? Les directeurs de Direccte et de Dréal sont rarement d'anciens élèves ingénieurs de ces corps. Beaucoup y sont parvenus par la promotion interne, et exercent ces fonctions plus ingrates. Lorsqu'ils partent, ils sont facilement remplacés. Il n'y a donc pas besoin d'appartenir à cette étroite élite pour exercer ces fonctions. Je ne suis pas sûr qu'il y en ait un nombre prédéfini puisque beaucoup s'en vont : on pourrait en recruter plus, ou moins.

Pourquoi garde-t-on deux niveaux de recrutement ? Il pourrait y avoir un seul niveau de recrutement, au niveau d'attaché ou d'ingénieur TPE. La France aime ce genre de hiérarchie : des professeurs agrégés ou certifiés font le même métier...

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Peut-être faudrait-il revoir les conditions pour conserver le maximum de personnes formées pour travailler dans la fonction publique. Quelles sont les conditions de formation de ces hauts fonctionnaires ? L'État prend-il cette formation en charge, avec quels contrats ? Un départ dans le secteur privé lui coûte cher...

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Le renforcement de l'engagement décennal contrecarre-t-il la fuite à la fin de la tournée des inspecteurs des finances ?

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Les conditions se sont effectivement durcies. Plusieurs arrêtés - dont un de l'inspection des finances concernant Emmanuel Macron - rappellent le remboursement de l'engagement décennal.... Mais souvent cet engagement est compté généreusement : les années de formation en école sont comptabilisées, il suffit de quelques années en administration. Souvent, le salaire dans le privé n'est pas un obstacle au départ : la pantoufle fera partie des négociations avec l'entreprise. À la sortie de Polytechnique, quel discours est tenu aux élèves ; qu'ils s'engagent dans l'administration ou bien qu'ils feront un tour dans un corps avant de passer dans le privé et qu'ainsi, ils auront une meilleure carrière ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Je suis un cas particulier : J'ai intégré le corps des Ponts après l'École normale supérieure (ENS). Il m'a fallu passer 45 minutes devant un jury de quinze personnes pour les convaincre de ma volonté d'intégrer ce corps. J'ai été démarchée par le secteur privé : on me proposait un salaire largement supérieur à celui que j'avais en restant dans le corps, et le remboursement de ma pantoufle.

Par contre, mon mandat de parlementaire n'est pas considéré comme un service dans le secteur public - alors que je sers l'État ! Je suis mise à disposition depuis 2017.

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Les archives que j'ai pu consulter ne sont pas très récentes - on ne peut pas avoir accès aux données personnelles de ces dernières années. Au début du XXe siècle, certains ingénieurs des Mines ou des Ponts ont pantouflé, avec des écarts de salaire énormes. Ainsi, Henri Malcor, ingénieur des Mines, a quitté très vite le corps pour la sidérurgie. Il n'avait pas les moyens de nourrir sa famille de quatre enfants sinon. La question du salaire est ancienne, et n'a pas tendance à se creuser : jamais l'État ne pourra suivre les salaires du privé et la progression de carrière. Avec une augmentation de 10 à 15 %, on ne résout pas le problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

C'est peut-être une question d'organisation de carrière au sein de la fonction publique plutôt qu'uniquement une question de salaire...

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Auparavant, une des principales motivations pour quitter la haute fonction publique, notamment dans les corps des Mines et des Ponts, était qu'il fallait bouger tous les trois à quatre ans en province. Dans le privé, les ingénieurs vont dans les directions parisiennes de grandes entreprises. Certes, les entreprises obligent de plus en plus les jeunes qui pantouflent à partir quelques années à l'étranger dans une filiale, mais ce phénomène est récent. Les ingénieurs, souvent parisiens, vivaient mal leur exil en province. Désormais, il faut raisonner par couple car la femme travaille ; et de plus en plus, ces corps sont féminisés.

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Il y a davantage de femmes dans les corps des Mines et des Ponts que dans les autres écoles d'ingénieurs ; elles sont souvent brillantes et préfèrent rester dans le corps en raison de moindres contraintes horaires que dans le secteur privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Merci pour vos analyses qui enrichissent nos réflexions. C'est un sujet très complexe.

Debut de section - Permalien
Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS

Votre rôle est de dire ce qu'il faut faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Nous avons besoin de vos éclairages pour que nos propositions soient efficaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Je vous remercie. Nous nous retrouverons mercredi prochain pour la suite de nos auditions.

La réunion est close à 17 heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Je vous remercie. Nous nous retrouverons mercredi prochain pour la suite de nos auditions.

La réunion est close à 17 heures.

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