... la durée des AMM dérogatoires accordées aux médicaments dérivés du sang produits à partir de plasma « non éthique ».
Au terme d'un débat très intéressant, parfois vif, au sein de la commission des affaires sociales, M. le rapporteur a été convaincu par nos arguments et a finalement renoncé à déposer un amendement portant cette durée à cinq ans. Nous l'en remercions, bien sûr, mais la disposition adoptée par l'Assemblée nationale ne nous satisfait pas et nous tenons à faire entendre la voix des donneurs de sang bénévoles.
L'amendement qui est devenu l'article 9 bis était motivé ainsi : il serait risqué de s'appuyer uniquement sur le bénévolat et une telle mesure permettrait de faire face à une éventuelle pénurie. Or, nous contestons la validité de cette argumentation.
Le risque d'une pénurie supérieure à deux ans n'existe pas ou est extrêmement faible, de l'avis de la FFDSB, qui a toujours su mobiliser les donneurs de sang bénévoles français afin de faire face à la demande, mais aussi de l'Établissement français du sang, l'EFS, unique fournisseur de plasma « éthique » dans notre pays, et du LFB, fractionneur national.
La FFDSB est représentée au sein des conseils d'administration de l'EFS et du LFB ; elle peut attester de cette vision, spécifiquement française, qui est souvent réaffirmée.
Le bénévolat, inscrit dans la loi française, constitue un choix de société, porté notamment par les donneurs de sang bénévoles. Il n'est donc naturellement pas négociable.
Sa remise en cause constituerait une brèche volontaire dans l'éthique française de non-commercialisation de toutes les parties du corps humain, dont nous avons débattu avec notre collègue le professeur Francis Giraud, notamment, lors de l'examen des lois de bioéthique. Elle permettrait ainsi à des produits provenant d'un don de sang rémunéré de s'installer durablement dans notre pays.
Cette mesure, outre qu'elle rendrait la France dépendante des importations de produits sanguins, exprimerait un certain mépris pour les donneurs de sang bénévoles dans notre pays.
Contrairement à son objectif affiché, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale conduira donc à démotiver les donneurs de sang et, in fine, à ruiner les efforts accomplis par la FFDSB, l'EFS et le LFB en vue de subvenir à tous les besoins des malades français, un objectif qui, jusqu'à présent, a toujours été atteint.
Nous jugeons également que plus de transparence serait nécessaire : le caractère dérogatoire de ces AMM n'étant pas public, la FFDSB ne connaît pas exactement l'ampleur des exceptions accordées.
Certes, cette pratique est aujourd'hui encadrée, mais comment ne pas y voir la première étape d'une dérive à l'anglo-saxonne et la volonté de positionner les firmes françaises sur ce marché ? Lorsque le secteur privé contrôlera entièrement ce secteur, la commercialisation des produits issus du corps humain ne pourra plus être empêchée !
Ces considérations font écho à la réponse à une question écrite que j'ai reçue récemment, et je vous en remercie, monsieur le ministre ; j'ai attendu cette réponse durant des mois, mais je conçois qu'il n'était pas facile de l'élaborer.
Ma question portait sur le décret du 22 février 2006 relatif aux conditions d'importation des produits sanguins labiles et des pâtes plasmatiques. Dans votre réponse, vous m'avez précisé, monsieur le ministre, que le LFB pouvait être autorisé par l'AFSSAPS à importer du plasma étranger « pour faire face à des besoins inattendus en médicaments dérivés du sang ». C'est donc exactement la même logique qui est à l'oeuvre.
Mes chers collègues, je ne vous convaincrai certainement pas aujourd'hui, mais je tenais à ce que nous débattions au fond de cette question essentielle, qui renvoie aux lois de bioéthique.