Intervention de Nicole Belloubet

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 25 septembre 2018 à 17h40
Projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions — Audition de Mme Nicole Belloubet garde des sceaux ministre de la justice

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Vous n'imaginiez pas autre chose, monsieur le président...

Il importe d'avoir une réflexion globale : on ne construit pas des places de prison pour les remplir. La loi pénale que nous allons modifier aura des incidences sur le nombre de places nécessaires. Je le dis avec beaucoup d'humilité, parce que l'on touche là aux comportements humains et je ne puis en être certaine à 300 %, mais l'étude d'impact prévoit 8 000 personnes détenues en moins, ce qui a des conséquences sur les constructions pénitentiaires.

Vous relevez que les centres de semi-liberté ne sont pas pleins ; vous avez raison. C'est précisément la raison pour laquelle nous voulons modifier la manière dont les tribunaux vont rendre leurs jugements, non pas que j'ai à leur imposer quoi que ce soit de ce point de vue, mais je veux leur donner des outils extrêmement concrets, telle une application spécifique, pour prononcer la peine la mieux adaptée à la situation de la personne concernée. Nous allons recruter davantage de conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation, pour les placer en pré-sentenciel en vue de réaliser les enquêtes de personnalité. Bref, nous souhaitons que les juges soient dotés de tous les outils leur permettant d'utiliser pleinement toute la palette des peines. C'est un défi pour nous, mais c'est à cette condition-là que notre réforme fonctionnera.

Vous me dites que vous êtes la chambre des libertés, mais nous sommes le gouvernement des libertés, monsieur le président ! Oui, nous souhaitons donner des pouvoirs au procureur pour des raisons de rapidité, de réalité, de prise en compte des besoins du terrain, mais nous veillons systématiquement à ce que l'équilibre avec les libertés individuelles soit préservé ; le juge des libertés et de la détention est d'ailleurs présent dans plusieurs étapes. Je ne méconnais pas la préoccupation des juges d'instruction - ils interviennent dans 3,5 à 4 % des affaires -, mais celle-ci n'est pas nouvelle. C'est pourquoi je ne prétends pas avoir fait le grand soir de la réforme pénale - des évolutions nouvelles seront peut-être nécessaires. Je dis simplement que j'ai déverrouillé un certain nombre de choses pour faire évoluer notre procédure.

Enfin, concernant la question de la création du parquet national antiterroriste, vous dites que les choses fonctionnent bien aujourd'hui. Il serait inconvenant de ma part de dire que le procureur de Paris ne fait pas bien son travail ; nous pensons évidemment tout le contraire. Toutefois, indépendamment de la qualité des hommes, le procureur de Paris a une fonction pleine et entière. Le parquet de Paris, c'est le parquet de France le plus important. Il me semble que la lutte contre le terrorisme justifie aujourd'hui qu'une personne s'y consacre pleinement, en ayant des relais sur le territoire, en animant une politique nationale en matière de lutte contre le terrorisme. Nous avons prévu la possibilité pour le procureur national antiterroriste de mobiliser des magistrats du parquet de Paris en tant que de besoin lors d'événements exceptionnels, à partir d'une liste dressée en accord avec le procureur de Paris.

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