Vous évoquez une discordance entre service de santé au travail interentreprises pour les petites entreprises et les services de santé au travail autonomes intégrés dans les grandes entreprises. Il n'y a pas d'impossibilité juridique, tout employeur peut suivre en interne l'état de santé des salariés, mais les PME sont contraintes de recourir à la mutualisation. Nous proposons, nous, une porosité entre les deux systèmes, et que les grandes entreprises qui ont des sous-traitants internes ou externes participent au financement du dispositif mutualisé de la structure régionale. Cinq services ont été identifiés dans le rapport, dont le suivi médical, qui peuvent être pris en charge par les entreprises elles-mêmes - lorsqu'elles en ont les moyens.
Je fus médecin du travail. C'est un métier aujourd'hui mal considéré. Dans la formation universitaire, les futurs praticiens n'abordent les spécificités de cette profession que dans les six derniers mois de leur internat !
Le problème est surtout la densité géographique, très variable selon les territoires. Or la structure régionale aura un rôle de stratège, pour définir un schéma d'implantation, pour mieux répartir les médecins du travail. Je précise qu'il existe aujourd'hui 20 000 antennes de services de santé au travail, il n'est pas question de les démanteler ! En revanche, la gouvernance est resserrée au niveau régional.
Nous formulons des propositions sur le lien entre santé publique et santé au travail, entre médecine de ville et médecine du travail. Nous avons perçu des attentes pour un parcours de santé homogène : c'est le patient qui fait la synthèse entre sa vie privée et l'entreprise. Son dossier médical partagé (DMP) pourrait comprendre un volet « exposition professionnelle », et être accessible à tous les praticiens, y compris le médecin du travail, mais cela ne se fera pas immédiatement, compte tenu des blocages à la mise en place du DMP. Nous avons cherché à établir un calendrier réaliste.
Un mot des données recueillies : l'organisation que nous proposons permet de valoriser le métier dans sa dimension de veille et d'alerte. L'informatisation ne s'est pas diffusée encore dans tous les services de santé au travail, et dans les petits services ruraux, le faible nombre de médecins n'autorise pas la constitution de plateaux techniques importants : la mutualisation des moyens au niveau régional prend tout son sens. La valorisation du métier de médecin du travail passe par un cadre rénové, uniforme, homogène, avec des échanges de pratiques plus fluides qu'actuellement.