17 500 réponses ont été enregistrées au questionnaire, qui a été intégralement renseigné dans 7 300 cas. Ce nombre important de contributions nous a permis de croiser les données et de dégager plusieurs constantes. Deux tendances fortes - et paradoxales - ont été constatées : la spécificité de la population des élus locaux et la diversité des situations.
Les élus locaux sont une population spécifique : le premier constat est que les conditions actuelles ne permettent pas à tout un chacun de s'intégrer dans la vie politique locale. Une véritable rupture existe entre la composition des élus locaux français, d'une part, et la distribution de la population, d'autre part. On observe une surreprésentation des préretraités et des retraités (37,5 % parmi les élus, contre 26 % dans l'ensemble de la population). La disponibilité qu'offre la retraite semble être une condition pour certains élus, et c'est également l'une des conditions de fonctionnement de certaines collectivités locales. Le corollaire de ce constat est que seuls 17 % des répondants ont moins de 45 ans (contre 57,1 % de la population). C'est donc toute une partie de la population qui est écartée de l'exercice des responsabilités locales.
Parmi les élus, 51 % exercent une activité professionnelle en parallèle, ce qui laisse apparaître une surreprésentation des fonctionnaires et des catégories dites « intellectuelles supérieures » au détriment des ouvriers, qui semblent avoir presque complètement disparu des assemblées locales (2 % des élus, contre 20 % de la population). Les élus sont plus diplômés que la moyenne (60 % sont titulaires d'un diplôme universitaire, soit deux fois plus que le reste de la population).
Enfin, la distribution selon le genre suit la même tendance qu'ailleurs, à savoir une sous-représentation des femmes, et ce plus encore dans les postes exécutifs, toutes choses égales par ailleurs.
La situation profite donc à certaines catégories, à certaines classes d'âge, et aux hommes. Le recrutement politique apparaît loin d'être aléatoire. Le renouvellement de l'intérêt à la politique nécessite donc de faire évoluer les conditions d'accès.
Des différences importantes existent, par ailleurs, au sein même de la population des élus locaux, ce qui induit des besoins circonstanciés et différenciés. S'il est nécessaire d'établir des mesures homogènes et statutaires pour l'ensemble des élus, il faut tout autant prendre en compte les différences et traiter certaines situations spécifiques du point de vue démographique, géographique, institutionnel et fonctionnel.
Du point de vue de la démographie, une césure forte existe entre les élus ruraux et les autres. Les attentes, en matière de responsabilité pénale par exemple, sont très différentes entre les élus des communes de moins de 1 000 habitants, de 1 000 à 10 000 habitants et de plus de 10 000 habitants. La césure entre le monde urbain et le monde rural parcourt l'ensemble des réponses apportées, que ce soit sur l'articulation entre vie professionnelle et vie active ou en termes de responsabilité pénale, moins bien vécue en zone rurale.
Les attentes varient fortement selon les institutions, notamment au sein du bloc communal, allant de la communauté de communes à la métropole. L'accaparement de la fonction élective est beaucoup plus marqué dans les institutions fortement dotées de compétences par la loi, ce qui caractérise des attentes particulières.
En outre, il faut noter la distinction, commune à l'ensemble des démocraties occidentales, entre les élus ayant des responsabilités exécutives et les autres. Cela induit des situations très différentes, et donc une adaptation pour les postes de maire, d'adjoint, de vice-président et de président, notamment, car les responsabilités exécutives vont souvent de pair avec l'impossibilité d'exercer une profession en parallèle.
Enfin, la dimension géographique, au sens physique, doit être prise en compte. La taille du territoire influe sur les attentes de compensation de déplacement des élus d'une région récemment fusionnée ou d'une large intercommunalité, par exemple.
Ces difficultés peuvent se superposer, donnant des typologies extrêmement différenciées. Un élu rural avec un mandat exécutif et un élu urbain sans fonctions exécutives n'auront pas les mêmes attentes et préoccupations.