Les éléments statistiques apportés par Éric Kerrouche mettent en lumière la diversité des situations, et font apparaître une « nouvelle donne des mandats locaux », rendant nécessaire une évolution du statut de l'élu. Aux dernières élections municipales, on observait déjà une désaffection, avec une soixantaine de communes ne présentant aucun candidat. Cette situation semble se pérenniser. Les chiffres issus de la consultation montrent les différences de préoccupations et de besoins selon les types de collectivités, les strates de population et les types de territoires. Cette diversité est connue, mais souvent oubliée à l'heure des propositions. Les exigences de performance et d'expertise sont les mêmes pour tous, malgré l'existence, de ce point de vue, d'une réelle césure entre les territoires et les catégories d'élus.
La désaffection des élus s'accompagne d'une désaffection des candidats dans les petites collectivités. Le maire, jusqu'ici protégé du discours ambiant de remise en cause du politique, s'en trouve lui aussi éclaboussé. Au-delà des préconisations, il est important de valoriser l'engagement des élus et de présenter à nos concitoyens, qui n'en ont pas toujours conscience, leur quotidien et les exigences auxquelles ils sont soumis. Je souscris pleinement à la déclaration du Président du Sénat : « La chance de la France, c'est sa trame de 500 000 élus locaux ». Pour illustrer ce propos, je souhaite partager le témoignage d'une maire d'une petite commune rurale, recueilli au cours de l'enquête réalisée en 2017 par l'Association des maires de France (AMF) : « Dans nos villages, les gens appellent à 4 heures du matin pour nous dire que des vaches divaguent au milieu de la route. Idem s'il y a une fuite d'eau quelque part. Chez nous, tout le monde a notre numéro de portable. Depuis mon élection en 2008, pour le bien-être de mes concitoyens, j'ai mis ma vie familiale et personnelle entre parenthèses ». Et cette maire s'interroge : « en 2020, y aura-t-il encore des gens pour continuer à se sacrifier et représenter les villages ? ».
Ce sujet, au-delà de notre réflexion, doit être saisi par la CNT, en raison de la désaffection des candidats et des taux croissants d'abstention aux élections municipales. Or lorsque nos concitoyens rencontrent des problèmes, la mairie, guichet unique, représente la dernière lumière de la solidarité et de la République. Il est nécessaire que des règles claires, renforçant la protection des élus, trouvent une traduction normative, qu'elle soit réglementaire ou législative, bien que cette dernière risque parfois d'être d'une simplicité excessive pour tenir compte de la diversité des situations, comme constaté dans les propositions faites aux élus locaux dans le projet de révision constitutionnelle.