Intervention de Jacques Bigot

Réunion du 9 octobre 2018 à 14h30
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – renforcement de l'organisation des juridictions — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi et d'un projet de loi organique dans les textes de la commission

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

Cette méthode ne me paraît pas la bonne dans la mesure où elle conduit à une déjudiciarisation, à une déshumanisation et à un manque de proximité de la justice. Nous serons amenés à revenir sur tous ces sujets au cours du débat.

La numérisation du monde de la justice relève moins du décret ou même du règlement que de l’organisation et des méthodes. Le rapport de la mission d’information le soulignait et chacun en est conscient : l’organisation de l’informatisation des juridictions connaît un retard phénoménal. Aucun des premiers présidents de cour d’appel que j’ai rencontrés ne m’a dit le contraire !

L’idée de développer la conciliation et la médiation est intéressante, à condition qu’elle soit bien mise en œuvre. Il ne doit pas s’agir de renvoyer à des médiations obligatoires et à des systèmes privés coûteux. La conciliation peut être une bonne solution, mais alors comment comprendre, madame la garde des sceaux, que vous proposiez de la supprimer dans le divorce contentieux ?

Certes, il est très rare que des juges aux affaires familiales réconcilient des époux, mais ce préalable de la tentative de conciliation, que vous imposez, madame la garde des sceaux, dans d’autres procédures civiles, est le moment où le juge aux affaires familiales entend les époux, qui doivent être présents, discute avec eux des mesures provisoires et les fixe. C’est un moment important, et sa suppression procède d’une forme de déshumanisation de la justice. Les justiciables, dans ces périodes difficiles, ont besoin de rencontrer un juge.

Ensuite, sans doute pour permettre sans doute aux juges de mieux travailler, vous développez la représentation obligatoire. Or, cela représente un coût, et vous ne prévoyez pas de moyens supplémentaires pour l’aide juridictionnelle, sauf à ce que vous nous les annonciez aujourd’hui. Les corapporteurs le savent, nous ne sommes bien entendu pas favorables au rétablissement du droit de timbre. Cela reviendrait à faire payer par certains l’accès à la justice. Les moyens ne sauraient être augmentés que via le budget de l’État.

Comme nous l’indiquions dans le rapport sur la proposition de loi adoptée en octobre dernier, nous partageons votre idée de regrouper tribunaux d’instance et tribunaux de grande instance. Mes chers collègues, en tant que représentants des collectivités locales, il nous appartient de relayer les inquiétudes exprimées par les élus dans les territoires.

Vous avez dit, madame la garde des sceaux, que les hautes juridictions ne disparaîtraient pas. Il faudrait que les locaux des anciens tribunaux d’instance puissent rester des lieux de justice, où d’autres juges viendraient entendre les justiciables. Par exemple, si, dans le ressort d’un ancien tribunal d’instance, le nombre de dossiers relevant de sa compétence le justifie, pourquoi un juge des enfants ne pourrait-il pas aller y tenir des audiences ?

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