Je propose, par cet amendement, de rétablir le périmètre de l’expérimentation tel qu’il avait été initialement envisagé dans le projet de loi, avec comme objectif la déjudiciarisation de la modification de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. Il ne me semble pas, madame Assassi, que cette disposition porte atteinte à la démocratie.
Limiter cette expérimentation aux seules situations où les parents sont d’accord sur le montant modifié de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, comme le propose la commission des lois, apparaît inutile par rapport à la situation actuelle.
En effet, depuis le 1er avril 2018, le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales peut déjà donner force exécutoire à l’accord par lequel les parents qui se séparent fixent le montant de cette contribution, sous certaines conditions.
L’expérimentation, pour être utile, doit donc viser d’autres hypothèses que celle de l’accord entre les parents sur le montant de la pension alimentaire.
Afin de permettre une appréciation objective de la situation des parents, l’organisme chargé de la délivrance de titres exécutoires s’appuiera, comme je l’ai indiqué, sur le barème qu’utilisent déjà les juridictions et les avocats.
En cas de carence d’un parent qui ne produirait pas les renseignements nécessaires pour apprécier la demande, l’organisme saisi pourrait appliquer un forfait pour le montant de la pension. Ce dispositif est donc incitatif pour les parents ; il permettra de délivrer dans des délais brefs un titre exécutoire établi en fonction de documents qui seront échangés contradictoirement, sur le fondement d’un barème connu et objectif.
À ceux qui s’inquiètent du respect des droits des parties et de l’intérêt de l’enfant, je rappelle, d’une part, que l’échange des pièces est obligatoire et, d’autre part, que la possibilité de former un recours devant un juge aux affaires familiales demeure. La seule différence, madame la sénatrice, est que vous souhaitez un recours a priori, alors que je le propose a posteriori, en cas de contestation du titre.
Rappelons en outre qu’il est ici demandé à la CAF de se prononcer sur une question d’ordre exclusivement financier, après une fixation initiale par le juge ou par accord entre les parents, en dehors de toute question relative à l’autorité parentale.
J’entends également que certains craignent une sorte de conflit d’intérêts pour les organismes désignés. Ils soutiennent en particulier que les CAF seraient juge et partie, puisqu’elles distribuent des prestations familiales en cas de carence ou d’insuffisance de la pension alimentaire. Elles pourraient donc être tentées d’en augmenter le montant pour payer moins de prestations.
En premier lieu, comme toute personne morale chargée d’une mission de service public, la CAF, dans son fonctionnement, répond aux exigences de neutralité et d’impartialité – il est important de le souligner. Il lui appartient, le cas échéant, d’adapter son organisation interne en conséquence.
En deuxième lieu, le montant de la pension résultera de l’application d’un barème préétabli. La CAF sera tenue par ce barème et ne pourra pas majorer ou minorer la pension à sa guise.
Enfin, en troisième lieu, la CAF n’aurait aucun intérêt à majorer sans justification le montant des pensions alimentaires. Cela entraînerait presque automatiquement la défaillance du débiteur et la CAF serait alors obligée de verser la prestation compensatoire correspondante.
En outre, dans ces situations, la CAF doit lancer une procédure de recouvrement qui conduit à un travail supplémentaire, coûteux et inutile pour elle.
Cette expérimentation que je propose apparaît donc mesurée et encadrée. Elle devrait permettre, par une meilleure prévisibilité du montant de la pension, une relative pacification des relations entre les parents séparés.