Intervention de Emmanuel Roux

Commission d'enquête mutations Haute fonction publique — Réunion du 19 juin 2018 à 9h15
Audition de M. Emmanuel Roux directeur général du groupe aesio

Emmanuel Roux, directeur général du groupe Aesio :

La situation que j'ai décrite correspond à mon expérience entre 2008 et 2010. Depuis lors, elle a été atténuée. D'abord, les secrétariats généraux ont pris plus d'ampleur dans les ministères. C'était vrai dès 2008-2010 dans les ministères régaliens - le ministère de l'intérieur, le ministère des transports, le ministère de l'agriculture -, moins dans les ministères moins directement régaliens ou moins structurés historiquement comme le ministère de la santé. Désormais, entre la direction de la sécurité sociale, la direction générale de l'offre de soins, la direction générale de la santé, la direction de la cohésion sociale devenue depuis la direction de l'action sociale, directions très en résonnance avec la société civile, avec le monde médicosocial, le monde hospitalier, le monde soignant, le besoin de coordination est beaucoup plus fort. À cette époque, le ministère n'avait pas encore fait le choix d'un secrétariat général plus étoffé. C'est un peu différent aujourd'hui.

La décroissance des cabinets ministériels est une excellente nouvelle pour l'administration même si, à court terme, c'est sans doute usant pour les sous-directeurs et les chefs de bureau. J'avais constaté une double chaîne de commandement entre le cabinet et la hiérarchie administrative. Recentrer les cabinets sur l'essentiel, sur le stratégique, sur le politique, et éviter de doublonner tel conseiller pour suivre tel sujet avec tel chef de bureau hypercompétent dans telle sous-direction de tel ministère me semble de nature à changer les choses.

Je vous parle de mon expérience sur une réforme politiquement très forte car, comme le disait Mme Bachelot, c'était une réforme que tout le monde appelait de ses voeux, mais que personne n'avait envie de faire : la direction du budget était attentiste, voire légèrement hostile, la direction la sécurité sociale était méfiante, la Caisse nationale d'assurance maladie était vent debout, passant beaucoup de temps dans ces murs pour expliquer à la représentation nationale tout le mal qu'il fallait en penser.

J'ai passé des heures au Parlement à rédiger amendement contre amendement pour essayer de sortir un titre IV ayant un peu de consistance. Avec le secrétaire général, nous avions construit un pilotage national pour que la CNAM soit un peu plus en synergie avec les agences régionales de santé. Or le texte adopté par la commission ne contenait pratiquement plus rien. Il a fallu remonter jusqu'au comité RGPP, présidé à l'époque par Claude Guéant et Jean-Paul Faugère, pour que l'Inspection générale des affaires sociales refasse un rapport sur le pilotage national de manière à pouvoir redéposer un amendement six mois plus tard. Le combat a donc été très fort, et j'ai beaucoup appris de la sociologie de l'État, du poids des directions, du poids des cabinets, du poids de la présidence de la République.

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