Je prends la parole sur cet article pour expliquer la position de mon groupe sur l’ensemble du titre IV du projet de loi, dont l’intitulé, au fond, dit très bien, madame la garde des sceaux, quel est votre état d’esprit : simplification et renforcement de l’efficacité de la procédure pénale. Au moins ne feignez-vous pas de renforcer les droits…
Ce titre comporte des mesures très disparates et d’intérêt inégal, sur lesquelles nous reviendrons, mais il marque une volonté générale : l’accroissement des pouvoirs du parquet, une marginalisation de l’information judiciaire, une simplification et une réduction des garanties et une forme de défiance vis-à-vis du juge, avec un statut du parquet dont nous savons qu’il n’est toujours pas modifié et qui fait évoluer de manière implicite notre système vers, peut-être, un système anglo-saxon.
Nous sommes préoccupés par cette simplification, qui a vocation à accroître les pouvoirs du parquet sans contrôle, à faciliter le recours à des techniques spéciales et à banaliser des procédures normalement réservées à l’état d’exception. Nous sommes inquiets pour les droits de la défense et pour l’équilibre des droits.
Madame la garde des sceaux, vous avez proposé l’abaissement du seuil des crimes ou délits permettant d’étendre largement des procédures d’exception. Vous souhaitez multiplier par deux la durée de l’enquête de flagrance, à laquelle correspondent des pouvoirs exorbitants permettant des géolocalisations ou des interceptions judiciaires.
Vous souhaitez également étendre les possibilités de perquisition à un plus grand nombre de délits, autoriser la pénétration dans un domicile hors du cadre de la perquisition et rendre facultative la présentation au procureur de la République pour une prolongation de garde à vue.
Autant de mesures qui étendent de manière importante les droits du parquet – encore faut-il mentionner le doublement de la durée pendant laquelle une personne ayant déposé une plainte simple et que le procureur de la République n’a pas reçue ne pourra pas encore déposer plainte avec constitution de partie civile.
Si la commission des lois a fort bien travaillé en supprimant des dispositions excessives ou préoccupantes, ce rééquilibrage ne va pas suffisamment loin – l’examen des nombreux articles de ce titre nous permettra de le démontrer dans le détail. De fait, nous sommes toujours devant une forme de confusion entre l’objectif de simplification et la réduction des garanties pour les libertés, sans certitude, il faut bien en convenir, de gains opérationnels.
C’est pourquoi, malgré les avancées incontestables réalisées en commission, nous défendrons des amendements destinés à renforcer les libertés et à rééquilibrer les pouvoirs entre la partie poursuivante et la partie poursuivie.