Afin de ne plus considérer la victime comme une demi-partie dans le déroulement du procès pénal, cet amendement prévoit de créer un droit d’appel pour les victimes en cas d’acquittement du criminel par la cour d’assises. Aujourd’hui, ce droit n’existe pas : la victime peut certes faire appel sur ses intérêts civils, mais elle ne peut pas demander la tenue d’un second procès pénal, qui pourrait aboutir à l’établissement de la culpabilité pénale du mis en cause.
Cette situation est souvent vécue comme un second traumatisme pour la victime. Car une décision d’acquittement ne signifie pas seulement que son agresseur présumé est innocenté : aux yeux de la société, c’est la victime elle-même qui devient une menteuse potentielle, ce qui est particulièrement ravageur dans les cas de violences sexuelles, parfois difficiles à prouver matériellement.
Il faut s’imaginer la détresse d’une victime qui voit le ministère public requérir une très lourde peine, puis ne pas faire appel de l’acquittement prononcé par la cour. Et cet exemple n’est pas isolé : entre 2003 et 2005, les cours d’assises d’appel n’ont eu à juger que 76 affaires dans lesquelles un acquittement avait été prononcé, alors que le nombre d’acquittements annuel dépasse les 200 – il était de 250 en 2006. Il ne fait donc pas de doute que la majorité des acquittements n’est pas frappée d’appel par le parquet.
Le droit d’appel de la victime en cas de relaxe serait en outre le prolongement naturel et cohérent des droits dont bénéficient actuellement les victimes. En effet, la victime déclenche l’enquête en portant plainte, peut passer outre un classement sans suite du procureur par une constitution de partie civile et a la capacité de faire appel des ordonnances de non-lieu du juge d’instruction. C’est pourquoi des magistrats éminents, comme Claude Mathon, avocat général près la Cour de cassation, ont pu défendre l’idée que le droit d’appel de la victime en cas de relaxe ou d’acquittement constituerait une mise en cohérence de notre système juridique.