Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 11 octobre 2018 à 10h30
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice — Article 36

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

L’article 36 simplifie le renvoi par le juge d’instruction à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la CRPC, qui a été instaurée en 2004 afin de désengorger les tribunaux correctionnels.

Cette procédure ne peut être mise en place que sous certaines conditions, notamment la reconnaissance des faits de la part de la personne poursuivie, ce qui en fait une procédure de « plaider-coupable » à la française.

Cependant, depuis la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles, le juge d’instruction a la possibilité de renvoyer, avec l’accord des parties et du ministère public, des faits correctionnels reconnus pour être jugés selon cette procédure.

Cette procédure en vigueur est depuis près de sept ans, mais elle n’est que très peu utilisée – les juges n’y ont recours que pour 1 % des informations judiciaires correctionnelles selon l’étude d’impact du projet de loi, soit environ une centaine de dossiers par an au niveau national –, essentiellement car elle ne correspond pas à un besoin véritable, les informations judiciaires auxquelles elle est susceptible d’être appliquée étant de fait très rares.

La CRPC, mode de jugement dégradé et superficiel, apparaît en effet peu compatible avec le niveau de gravité et de complexité que suppose par principe le recours à une information judiciaire.

Le projet de loi prévoit néanmoins de renforcer ce mode de jugement en permettant au parquet de se dispenser du travail de règlement de la procédure et au juge d’instruction d’éviter la rédaction d’une ordonnance de renvoi motivée – une exigence pouvant pourtant considérée comme une garantie fondamentale dans la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, adoptée à la suite de l’affaire dite « d’Outreau ».

Ainsi est étendu le recours à une procédure dont plus de six ans d’expérience n’ont pas démontré l’utilité et qui est de nature à créer de lourdes difficultés dans les quelques dossiers pour lesquels elle serait utilisée, dans l’espoir de gains de temps tout de même très hypothétiques.

Cette extension ne semble être justifiée que par une foi aveugle, et j’oserai dire quelque peu naïve, dans la procédure de CRPC.

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