Intervention de Édouard Philippe

Réunion du 11 octobre 2018 à 15h00
Questions d'actualité au gouvernement — Violences sur les élus et les fonctionnaires territoriaux

Édouard Philippe :

Monsieur Marc, je voudrais d’abord exprimer avec vous une pensée attristée et adresser un hommage respectueux à la mémoire de Pascal Filoé, le directeur général adjoint des services de la ville de Rodez, qui dirigeait les services de la police municipale et qui a été assassiné la semaine dernière.

J’ai pu mesurer à quel point cet homme suscitait autour de lui une confiance, un engouement et un respect tout à fait exceptionnels. J’étais avec vous, monsieur le sénateur, sur cette place de Rodez, avec les élus et avec un très grand nombre de Ruthénois, qui étaient à la fois bouleversés par l’émotion et, en même temps, marqués, je veux le dire ici, au Sénat, par l’exceptionnelle dignité et l’exceptionnel courage de la famille de Pascal Filoé et de ses collègues de travail.

Au fond, la question que vous posez, monsieur le sénateur, c’est : « Comment protéger ceux qui nous protègent ? » C’est une question importante, car le pacte républicain et la paix civile reposent entièrement sur l’idée que certains nous protègent, dans le respect de la loi.

Bien entendu, nous devons être exigeants avec eux pour qu’ils respectent la loi, mais, je le répète, dans ce cadre, ce sont eux qui nous protègent. Or si ceux-là mêmes qui doivent nous protéger sont, à chaque instant, soumis à des violences, qui peuvent être verbales, mais qui peuvent également être physiques, s’ils deviennent des cibles, s’ils sont l’objet permanent de l’irrespect, de l’incivilité, voire de la violence ou de l’agressivité d’un certain nombre de nos concitoyens, alors, le système entier se trouve fragilisé.

Comment protéger ceux qui nous protègent ? D’abord, monsieur le sénateur, en faisant en sorte de ne rien accepter et de ne rien laisser passer. Il est assez troublant d’avoir à le rappeler, et c’est malheureusement trop facile à dire et extrêmement difficile à obtenir, mais nous ne devons rien laisser passer.

Il y a quelques semaines, Mme la garde des sceaux a adressé à l’ensemble des procureurs du territoire une circulaire leur rappelant que notre droit prévoit déjà des circonstances aggravantes ou des éléments permettant de sanctionner durement ceux qui s’attaquent aux dépositaires de l’autorité publique, qu’ils soient fonctionnaires ou élus ; elle précisait qu’il fallait veiller à ce que les poursuites soient engagées et les réquisitions prises, de manière ferme, car, ce faisant, nous protégeons véritablement la solidité du pacte républicain.

Ensuite, il y a la question des moyens, parce que, pour protéger ceux qui nous protègent, il faut qu’ils soient équipés et en nombre suffisant. C’est un combat délicat, car nous partons peut-être d’un peu trop loin.

Dans le budget de 2019, comme dans celui de 2018 et comme dans ceux qui suivront, vous trouverez des éléments traduisant cette priorité et cet engagement, avec un recrutement supplémentaire, sur l’ensemble du quinquennat, de 10 000 fonctionnaires de police, gendarmes et agents de la DGSI. Ce sont 2 000 recrutements par an en moyenne, même si, avec les effets de lissage, il y en aura parfois 2 500, parfois 1 500, selon les années ; en tout cas, c’est de cet ordre-là, et c’est indispensable. Nous veillerons à ce que ces personnels soient équipés, car, si le nombre est important, la capacité à utiliser des moyens modernes est évidemment décisive.

Enfin, monsieur le sénateur, même s’il est peut-être optimiste de le dire ainsi, je crois qu’il ne faut pas laisser nos forces de l’ordre seules face à ces incivilités.

Il ne faut pas simplement leur dire qu’elles seront plus nombreuses, mieux équipées et mieux protégées par le droit. Il faut aussi, comme cela a été le cas à Rodez, et comme cela doit être le cas partout en France, que nos concitoyens protègent ceux qui nous protègent, dénoncent les incivilités, disent ouvertement aux fonctionnaires de police, aux gendarmes et aux sapeurs-pompiers, qui œuvrent pour notre sécurité et pour notre bien, qu’ils sont fiers d’eux, qu’ils sont derrière eux et que, d’une certaine façon, ils les protègent aussi.

Peut-être est-il optimiste de formuler cela ainsi, dans cette enceinte, au Sénat, mais je suis convaincu que c’est au moins aussi important que les deux éléments que j’ai mentionnés auparavant.

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