Intervention de Anne Debar

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 19 février 2018 : 1ère réunion
Risques naturels majeurs dans les outre-mer — Visite du siège de météo france à saint-mandé

Anne Debar, directrice générale adjointe de Météo France :

Sur l'hexagone, la légende de la carte de vigilance comporte quatre couleurs : jaune, orange, rouge et vert. Lorsqu'il y a vigilance jaune, le citoyen doit être l'acteur de sa propre sécurité car le niveau de dangerosité ne nécessite pas le déploiement d'actions publiques. À partir de la vigilance orange s'instaure une chaîne d'alerte, de secours et d'assistance par laquelle les autorités préfectorales et locales mettent en place des actions d'évacuation et d'hébergement.

Cette carte est diffusée deux fois par jour, à 6 heures et à 16 heures, ou plus fréquemment en cas d'évolution rapide d'un phénomène météorologique. Elle est complétée par plusieurs bulletins de situation nationaux et régionaux.

Pour compléter ce tour des missions de Météo France, j'aborderai les questions de défense. Contrairement à d'autres pays, la météorologie civile et la météorologie militaire forment un système intégré. Ainsi, les personnels prévisionnistes militaires sont formés au sein de notre Météopole qui accueille par ailleurs un centre interarmées chargé des prévisions sur les théâtres d'opérations extérieurs.

En outre, notre action de soutien à la sécurité du trafic aérien est fondamentale car la météo peut être un facteur aggravant des accidents aériens. Météo France détient la certification de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) pour rendre ce service en métropole et en outre-mer. Il s'agit donc à la fois d'un enjeu sécuritaire et économique majeur, compte tenu de la croissance du trafic aérien. Pour être en mesure d'absorber ces évolutions, il est nécessaire d'affiner le service météorologique que nous apportons à la navigation aérienne.

Au-delà de nos missions institutionnelles, nous développons des activités commerciales, notamment pour les secteurs du transport, de l'agriculture et des assurances. Travailler à répondre aux besoins du secteur privé nous permet de nous maintenir à la pointe de l'innovation pour améliorer notre qualité de service. À titre d'exemple, nous avons récemment conclu un partenariat avec l'institut agronomique Arvalis dans le but de concevoir un service proposant à la fois des données météorologiques et des données agricoles. Ce système pourra permettre aux agriculteurs d'anticiper les périodes pour semer ou récolter.

Nous nous appuyons également sur trois filiales qui complètent notre expertise : Météorage, qui fournit des alertes spécifiques au risque de foudre, Predict-services, qui assiste les collectivités locales exposées aux risques d'inondation, et Météo France International, qui apporte notre savoir-faire à des pays développant leur propre système météo.

Enfin, la dernière de nos missions est liée au climat. Nous travaillons de plus en plus à prévoir, sur le long terme, l'évolution météorologique globale afin d'accompagner au mieux les diagnostics sur le changement climatique. Nous disposons pour cela d'une certaine mémoire du climat, puisque nous nous appuyons sur plusieurs décennies d'observations indispensables pour se projeter sur les cent prochaines années. Les modèles de Météo France sont utilisés dans le cadre du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC).

La direction de la recherche de Météo France compte 300 chercheurs, principalement basés à Toulouse. Il existe également à La Réunion une unité mixte de recherche avec le CNRS et l'université de La Réunion qui compte une vingtaine de permanents, des doctorants et des post-doctorants. Cette structure est spécialisée dans les questions cycloniques.

Au plan international, Météo France travaille en étroite collaboration avec d'autres services météorologiques car la météo ne s'arrête pas aux frontières et nous devons pouvoir disposer d'informations sur l'ensemble du globe. En Europe, seuls la France avec ARPEGE, l'Allemagne et le Royaume-Uni possèdent un modèle météorologique capable de faire des prévisions à l'échelle mondiale. L'organisation météorologique mondiale (OMM) organise cette coopération. Nos données sont donc mises à disposition de l'ensemble de la communauté. Une quinzaine de pays, dont la France, est chargée de redistribuer les données collectées. Par ailleurs, l'OMM organise une mutualisation de certains services opérationnels. Ainsi, certains pays sont chargés de la veille sur des phénomènes dans une zone donnée via les centres météorologiques régionaux spécialisés (CMRS). C'est le cas de la France pour la sécurité maritime en Méditerranée et en Atlantique, ainsi que pour la veille cyclonique dans l'océan Indien.

Cette présentation me permet de revenir plus particulièrement sur la comparaison entre les modèles français et américain qui a été évoquée à l'occasion des cyclones qui ont frappé les Caraïbes. Il est important de rappeler qu'il n'existe pas de concurrence entre les modèles. Au contraire, les météorologues tirent bénéfice de la complémentarité des modèles qu'ils utilisent. Cet exercice de comparaison est essentiel pour que nous puissions améliorer nos prévisions. À l'approche d'Irma, nos collègues de la direction interrégionale Antilles-Guyane ont travaillé avec le modèle de Météo France, mais aussi avec ceux du National Hurricane Center (NHC) américain et du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT). Ce centre, basé en Angleterre, a été créé dans les années 1970 à l'initiative de la France afin de mutualiser à l'échelle européenne la capacité de modéliser au-delà de 4 jours. ARPEGE, qui possède une maille plus fine sur l'Europe de l'ouest, est donc complémentaire au système développé par le CEPMMT car plus performant pour le court terme.

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