Intervention de Patrick Roult

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 2 février 2018 : 1ère réunion
Jeunesse des outre-mer et le sport — Visite de l'institut national du sport de l'expertise et de la performance insep

Patrick Roult, directeur du pôle haut niveau :

La reconversion ne s'entend pas, pour nous, au moment où la carrière s'arrête mais au moment où elle commence. Plus le double projet est construit en amont et plus la reconversion est facile. Plusieurs collaborateurs du pôle haut niveau ont pour mission d'aider les sportifs à monter leur parcours de performance mais aussi leur parcours de développement personnel. Les débouchés professionnels pour les sportifs de haut niveau sont aujourd'hui plus diversifiés qu'ils ne l'étaient auparavant car nous mobilisons des moyens pour accompagner le sportif et lui proposer la meilleure formation en accord avec ses centres d'intérêt et ses compétences. En outre, les instituts de formation ont la tâche de créer des parcours de formation qui s'adaptent au mieux aux conditions d'entraînement. Par exemple, bon nombre de sportifs deviennent kinésithérapeutes, et nous sommes en mesure de leur proposer un parcours en 8 ans au lieu de 4 ans, chaque année étant dédoublée pour leur permettre de gérer de front l'entraînement et les cours.

Dans l'immense majorité des cas, les jeunes qui intègrent l'INSEP parviennent à construire un projet cohérent, suivent une formation et obtiennent une certification qui leur permet de trouver un débouché professionnel après avoir mis un terme à leur carrière sportive, de manière volontaire ou à cause d'une blessure. Un agent, dont le périmètre d'action est national et non pas circonscrit à l'INSEP, est spécialement dédié à cette mission d'accompagnement. Toutefois, cet agent se consacre aux sportifs de haut niveau qui figurent sur la liste ministérielle et sont dans le giron de notre activité olympique, et non pas aux sportifs professionnels, en football et en rugby notamment, qui évoluent dans des clubs et nous échappent totalement.

Il arrive parfois que des sportifs changent plusieurs fois de formation et peinent à construire un projet professionnel cohérent, ce qui se traduit par une reconversion difficile malgré les efforts déployés par l'État pour les accompagner.

Dans tous les cas, l'INSEP continue d'accompagner les athlètes longtemps après la fin de leur carrière sportive. Certains d'entre eux nous sollicitent des années après leur départ pour bénéficier d'un accompagnement dans le cadre de leur reconversion, et nous mettons un point d'honneur à les aider à trouver une formation adaptée. Certains quittent le monde du sport avec un peu d'amertume, d'autres prennent de la distance en rentrant dans leur territoire d'origine pour débuter une nouvelle carrière. Dans ces situations, les anciens sportifs peuvent se sentir démunis et quand ils oublient qu'ils peuvent toujours compter sur « l'équipe derrière l'équipe » qu'est le pôle haut niveau.

Par ailleurs, nous sommes très attentifs à ne pas certifier trop tôt les diplômes professionnels car les jeunes doivent continuer à faire fructifier les compétences acquises dans le cadre de leur formation tout au long de leur séjour à l'INSEP. Si la certification intervient trop tôt et que le jeune n'a pas continué à se former, la valeur du diplôme ainsi acquis et l'employabilité du sportif s'en trouvent amoindris. Nous veillons donc à ce que chacun puisse intégrer l'INSEP et en sortir à tout moment en ayant en poche un diplôme valorisé.

Les parcours scolaires et professionnels de nos sportifs sont extrêmement variés. L'année dernière, l'un d'entre eux a intégré l'École Polytechnique, alors que d'autres, éloignés des structures scolaires depuis longtemps ou récemment naturalisés, suivent des cours de français langue étrangère. Nous venons également en aide à certains jeunes qui confondent le créole et le français et dont l'expression ne permet pas de répondre aux conditions d'exigence d'un diplôme. Enfin, nous aidons les jeunes en situation d'échec scolaire à acquérir les compétences minimales pour pouvoir rentrer dans une formation qui leur permettra d'obtenir un diplôme professionnel.

En ce qui concerne le handisport, la France est très en retard par rapport à d'autres pays, même si des progrès ont été faits ces dernières années. Les soldats français blessés sur les théâtres d'opération extérieurs, par exemple, étaient jusqu'à présent considérés comme des invalides de guerre, et l'armée française les gardaient en son sein. La création des Invictus Games, à l'initiative du Royaume-Uni, a changé le regard que l'on porte sur les vétérans, qui ne sont plus considérés comme des invalides de guerre. Ce changement de perspective a fait qu'aujourd'hui l'armée française encourage ces militaires à intégrer des programmes sportifs pour se reconstruire et retrouver un statut social. Ce travail sur la représentation du handicap est primordial car le handisport a émergé tardivement en France, grâce à la mobilisation d'associations familiales.

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