Intervention de Jean-Marie Bockel

Délégation aux collectivités territoriales — Réunion du 27 septembre 2018 : 1ère réunion

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel, président :

Un mot de méthode, en vous remerciant, Madame la ministre, de venir devant notre Délégation. Nous avons eu cet été une séance de travail avec vos services sur l'exercice des mandats locaux, elle a été fructueuse, nous avons donc pu travailler en amont sur nos recommandations - adoptées par notre Délégation en juillet dernier. Nos travaux seront ensuite rendus publics, à travers notre rapport, mais aussi parce que je vais en rendre compte, dès la mi-octobre, devant la Conférence nationale des territoires. Je salue la présence de Mme Keller à cette audition.

Vous le savez, nous avons commencé par un vaste questionnaire aux élus, diffusé via l'Association des maires de France (AMF) ; il a reçu plus de 17 500 réponses, venues surtout de maires ; puis nous avons organisé sept tables rondes, en lien avec les élus et la Direction générale des collectivités locales (DGCL), nous avons retenu des thématiques que nous avons confiées à une quinzaine de rapporteurs.

Dans tous nos travaux, nous recherchons la cohérence avec le monde d'aujourd'hui et le pragmatisme, pour des réformes tangibles. Notre objectif, c'est que chaque Français désireux de s'engager au service de ses concitoyens puisse accéder à un mandat local, l'exercer et en sortir dans des conditions maximales d'efficacité, d'équité et de respect des principes de notre démocratie locale - ceci sur fond de crise des vocations.

Sur le volet du régime indemnitaire, après avoir examiné les situations dans d'autres démocraties, notamment en Allemagne, nous avons opté pour le maintien du bénévolat, avec un régime indemnitaire qui compense effectivement les frais liés à l'exercice du mandat. Ce choix de ne pas professionnaliser le mandat nous a paru plus conforme à notre modèle de démocratie locale. Nous pensons, cependant, qu'une revalorisation est nécessaire, que le financement entre communes doit être davantage mutualisé, que les remboursements de frais doivent mieux correspondre aux réalités locales - distances géographiques élargies du fait des fusions et regroupements... - et que la fiscalité de la fraction représentative des frais d'emploi doit être davantage conforme à son objectif.

Sur le volet social, nous estimons que le régime social des élus locaux doit être clarifié, complété et mieux adapté à l'exercice d'une vie professionnelle ou personnelle. Il faut simplifier ce régime social, pour qu'il soit mieux connu et mieux compris, dans des aspects aussi variés que la couverture sociale, le régime de retraite complémentaire, le système d'arrêt maladie, l'accès aux prestations sociales... Nous proposons en particulier de renforcer le régime de retraite des élus locaux et de rendre plus systématique la retraite complémentaire. Toujours sur le volet social, nous recommandons de revaloriser le volume trimestriel des crédits d'heures.

Sur le volet de la formation et de la reconversion, nous avons constaté les améliorations liées à la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice par les élus locaux de leur mandat. Nous recommandons ici une montée en puissance de ce qui existe, par exemple le droit individuel à la formation, mais aussi l'instauration de dispositifs innovants pour améliorer la sortie de mandat, diminuer le « spleen » d'après mandat, faciliter la reprise d'une vie professionnelle normale par les anciens élus, par exemple via la création d'une entreprise ou l'accès à la préparation aux concours du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).

Sur le volet de la responsabilité pénale et de la déontologie, enfin, la table ronde nous a convaincus que nous n'allions pas changer la donne en quelques recommandations et que le principe d'égalité devant la loi était déterminant. Nous avons aussi constaté la difficulté de mesurer objectivement le risque pénal encouru par les élus dans l'exercice de leur mandat. C'est pourquoi nous avons estimé qu'en matière d'infraction non intentionnelle comme en matière de délit de favoritisme et de prise illégale d'intérêt, il serait imprudent d'engager de nouvelles modifications législatives significatives sans disposer d'une étude précise des tendances de la jurisprudence. Nous avons l'intention de lancer une étude à ce sujet.

Pour autant, des évolutions ciblées peuvent être envisagées sans attendre. Une certaine régulation de ce que l'on appelle le cumul des responsabilités est envisageable : il s'agirait d'inciter les victimes, dans les cas d'infraction non intentionnelle, à privilégier la mise en cause des collectivités territoriales en régulant la possibilité de lancer simultanément des poursuites contre les élus mis en cause pour les mêmes faits.

Madame la ministre, merci, donc, de nous donner votre point de vue et de répondre à nos questions.

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