Intervention de Pierre Ouzoulias

Réunion du 11 octobre 2018 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice — Article 42

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

Notre amendement tend à supprimer cet article, qui prévoit la création et l’expérimentation d’un tribunal criminel départemental.

Cette expérimentation prévoit que, dans un certain nombre de départements, pendant une durée de trois ans, « à titre expérimental », les personnes accusées de crimes punis de quinze ou vingt ans de prison seront jugées en premier ressort par un tribunal criminel départemental, composé uniquement de magistrats.

Cette disposition, proposée sans aucune concertation avec les différents acteurs, aurait pour conséquence probable la disparition de la cour d’assises, lieu de justice dans lequel celle-ci est rendue au nom du peuple, par des jurés populaires.

Écoutons sur ce sujet Mme Marie-Aimée Peyron, bâtonnière du barreau de Paris : « Les cours d’assises actuelles, composées de jurés populaires, fonctionnent très bien. L’oralité des débats permet de prendre le temps du procès. L’institution de ces tribunaux revient, sous couvert de gagner du temps, à instaurer de “petits crimes”, comme le viol, en réduisant le droit des victimes à un procès. »

L’article 42 est loin d’être anodin : il s’attache à repenser un pan essentiel de notre justice pénale, tant il témoigne de l’histoire de France et de ses évolutions : les jurés populaires au sein des cours d’assises.

Ainsi, le Gouvernement, en vue d’améliorer la justice pénale rendue dans les cours d’assises, propose de créer un tribunal criminel départemental, composé uniquement de magistrats professionnels.

Tout d’abord, le délai d’audiencement devant cette instance serait d’un an seulement. Sa compétence serait limitée au jugement de certains crimes, la cour d’assises retrouvant tout son pouvoir pour les crimes punis de trente ans de réclusion ou encore de la réclusion criminelle à perpétuité.

Néanmoins, une grande partie de la justice criminelle française sera rendue sans jurés, et cela semble remettre en cause la démocratie dont étaient imprégnées les assises. M. Jean-Pierre Getti, président de cour d’assises, disait en effet que « la délibération à la cour d’assises est le lieu le plus démocratique qui soit dans notre vie de citoyen ».

Madame la garde des sceaux, ces jurés populaires, comme vous l’avez indiqué récemment dans un journal dominical, ne relèvent pas que de « l’attachement à la tradition française ». Nous défendons ici non pas une position de « Gaulois réfractaires », mais, au contraire, une conquête majeure, révolutionnaire : la justice rendue par le peuple.

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