Madame la garde des sceaux, je pense que vous avez raison : nous ne sommes pas, ni les uns ni les autres, si éloignés que cela sur le sujet. J’ai pu le mesurer au cours du travail que nous avons conduit ensemble, François-Noël Buffet et moi-même, à la demande de la commission, sur la nature, l’exécution et l’efficacité de la peine.
Face à la surpopulation carcérale et à l’importance de la récidive, nous sommes convaincus que la sanction est nécessaire et qu’elle doit exister en tant que telle, mais qu’il faut aussi, à côté de la sanction, se préoccuper de la réinsertion. Nous n’aurons pas un texte parfait, mais l’intérêt de l’article 43 tel qu’il a été modifié par les rapporteurs est d’abord d’affirmer clairement quelles sont les peines.
La détention à domicile est une peine d’emprisonnement, même si elle est exécutée au domicile et sous bracelet électronique. C’est la raison pour laquelle il faut dire qu’il s’agit bien d’une modalité d’exécution.
La probation telle qu’elle est proposée n’est pas un sursis à l’exécution d’une peine d’emprisonnement. C’est une peine en tant que telle, qui impose des obligations. Cette peine peut compléter une peine d’emprisonnement effective, mais peut aussi se substituer à la peine d’emprisonnement qu’encourt le délinquant, parce que, derrière les obligations qui lui sont imposées dans la probation – on y reviendra plus loin lors de l’examen des articles sur ce thème –, il y a une mise en œuvre. Lorsqu’on regarde ce qui se passe dans d’autres pays européens, on voit des choses de cette nature.
Quand vous dites que la contrainte pénale n’a pas été appliquée, je pense plutôt que celle-ci n’a pas été comprise par les magistrats. Les moyens n’ont pas été donnés, et les magistrats ont confondu cette contrainte pénale avec le sursis avec mise à l’épreuve. D’ailleurs, vous avez vous-même dit au début de votre travail que vous vouliez faire une synthèse entre le sursis avec mise à l’épreuve et la contrainte pénale.
Je crois que l’on y arrive, mais, pour moi, l’article 43 pose avant tout le principe des peines. Ce n’est qu’ensuite qu’il convient de s’intéresser aux modalités d’exécution de ces peines, y compris pour le suivi socio-judiciaire, parce que ce dispositif peut être une peine imposée en tant que telle. Doit-on envoyer en prison une personne qui consulte des sites pédopornographiques ? Non ! Faut-il lui imposer une peine de probation ? Je n’en sais rien. En revanche, lui imposer un suivi socio-judiciaire peut être utile.
C’est ce qu’il faut bien voir : il y a d’un côté les peines et, de l’autre, les modalités de leur exécution en sachant que, pour nous, ces modalités devraient être examinées par les magistrats au moment du prononcé. Ce n’est que si les magistrats ne sont pas en mesure de le faire qu’il faut effectivement prévoir la faculté de déléguer ce rôle, comme c’est déjà le cas, au juge de l’application des peines.