Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du 16 octobre 2018 à 21h30
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice — Articles additionnels après l'article 50 bis

Nicole Belloubet :

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais également me situer dans la droite ligne des propos du Président de la République que M. Alain Marc vient de rappeler, mais en suggérant une modalité de vote différente de la sienne.

Permettez-moi de penser que la solution que je vais proposer est moins complexe à mettre en œuvre sur le plan opérationnel et qu’elle apporte plus de garanties en termes de sincérité du vote. Je préfère donc cette solution, qui a été élaborée conjointement avec les services du ministère de l’intérieur pour en assurer la sécurité, la faisabilité et, évidemment, la conformité juridique.

Il s’agit d’instaurer une nouvelle modalité d’exercice du droit de vote pour les détenus, au-delà des dispositions existantes. En effet, les détenus – ceux, bien évidemment, à qui le droit de vote n’a pas été retiré – peuvent actuellement voter, soit par procuration, soit à l’urne s’ils bénéficient d’une permission de sortir.

Or force est aujourd’hui de constater que la plupart d’entre eux n’exercent pas ce droit de vote, y compris à l’occasion des grands scrutins nationaux. Le vote reste faible, voire anecdotique, et il n’est pas plus exercé du fait du vote par procuration, puisque l’absence, dans la plupart des cas, de mandataires à qui donner la procuration est souvent rédhibitoire.

Le Président de la République a donc annoncé, au printemps 2018, vouloir faciliter le vote des détenus dès les prochaines élections européennes, donc dans les six mois qui viennent, et, évidemment, nous tenons à respecter cet engagement. Je propose donc d’instaurer une modalité optionnelle de vote par correspondance, sous pli fermé, pour les détenus inscrits sur les listes électorales qui le souhaiteraient.

Les détenus ayant choisi de voter par correspondance ne pourront dès lors plus voter à l’urne ou par procuration, mais, en cas de libération, ils pourront exercer une voie de recours devant le tribunal d’instance pour être autorisés à voter à l’urne.

Une commission électorale unique, qui sera installée auprès de la Chancellerie, aura pour rôle d’établir la liste des détenus qui seront admis à voter par correspondance, en lien avec l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE. Elle aura également pour mission de recenser les votes.

La procédure proposée par le Gouvernement permet donc de respecter le principe du secret du vote, protégé par l’article 3 de la Constitution. Y compris dans les établissements où un seul détenu serait amené à voter par correspondance, il ne sera pas possible de connaître le sens de son vote personnel.

La liste des électeurs admis à voter par correspondance ne sera pas communicable, ce qui évitera toute stigmatisation des détenus.

Un décret en Conseil d’État fixera les modalités d’application de l’article soumis à l’examen du Parlement. Il précisera, en particulier, les conditions qui permettront de garantir le caractère secret et personnel du vote, la sincérité du scrutin, la composition de la commission électorale.

Tel est le mécanisme que nous vous proposons, mesdames, messieurs les sénateurs. Nous avons beaucoup travaillé dessus pour en assurer, et la faisabilité, et la sécurité juridique.

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