Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la sortie prochaine du Royaume-Uni de l’Union européenne impose de s’interroger de nouveau sur le sens de la construction européenne. Les réponses apportées à ce questionnement essentiel déterminent les objectifs de la négociation en cours. Ce débat sur le projet n’est pas sans rapport avec le déclenchement, contre la Hongrie, de la procédure prévue à l’article 7 du traité sur l’Union européenne.
En effet, si l’Union est réduite à un marché unique, à une union douanière ou à une association économique, il est alors possible de concevoir une sortie du Royaume-Uni de l’Europe qui préserve l’essentiel des relations commerciales entre les deux entités. De la même façon, si nous acceptons que les valeurs démocratiques constitutives de l’Union soient bafouées par des États membres, alors il faudra se résoudre à accepter que ces pays s’engagent dans d’autres aventures sécessionnistes, renforcés qu’ils seront par la certitude de pouvoir gagner, in fine, eux aussi, un statut qui préserve leurs intérêts économiques essentiels.
Jusqu’à présent, l’Union européenne s’est construite sur une logique économique libérale qui a eu pour conséquence de détruire les solidarités sociales et nationales, sans jamais les remplacer par des formes supranationales de cohésion sociale, lesquelles auraient pu lui donner une légitimité politique. Ce double processus de dissociation économique et politique aboutit aujourd’hui à une crise majeure des démocraties européennes qui risque de les mener à l’abîme. Nous ne sauverons pas l’Europe sans le remettre radicalement en cause.
Dans l’immédiat, il faut tout mettre en œuvre pour protéger les accords du Vendredi saint et protéger la paix fragile qui règne dans l’île d’Irlande et ne pas oublier les démocrates de la Hongrie et d’ailleurs, qui ont besoin de l’Europe pour défendre leur État de droit. Épargner à l’Europe de nouveaux conflits et de nouvelles crises démocratiques : tels sont les enjeux humanistes que notre pays doit défendre.