Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 17 octobre 2018 à 14h30
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice — Article 53

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

J’ai été très intéressé par ces deux exposés. Je partage, comme mon groupe, la position définie par la commission, mais je constate que les différences se sont réduites et je relève, de manière générale, un certain nombre d’avancées.

Cela dit, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quelque chose de terrible dans la politique : on observe toujours une grande différence entre ce que vous voulez faire et ce que les gens comprennent, entre ce que vous dites et ce que les gens entendent.

J’en prendrai un exemple très simple, madame la garde des sceaux. Vous vous êtes venue récemment dans mon département, dont je parle rarement : le Loiret. Arrivée à Orléans, vous avez pu constater une crainte qui existe et que, toutes les semaines, j’entends s’exprimer. Vous savez bien que se trouve dans le Loiret, à 90 kilomètres d’Orléans, Montargis. Entre ces deux villes s’étend une forêt magnifique, la plus grande forêt domaniale de France. Or Montargis a déjà perdu son tribunal de commerce, et ses habitants croient que, par cette réforme, vous allez encore fermer son tribunal de grande instance. Je leur explique que, ni dans la proposition de la commission ni dans celle du Gouvernement, tel ne sera le cas, mais ils ont en eux cette peur, parce qu’on a déjà parlé de tellement de choses.

J’estime, madame la ministre, que vos propos sont de nature à complètement les rassurer, de même que ceux de M. le rapporteur.

Cela dit, il subsiste encore un problème : la spécialisation. Selon vous, madame la garde des sceaux, peut-être les deux tribunaux de grande instance du département demeureront-ils, mais ils seront spécialisés. Je ne crois pas être le seul à avoir entendu cela. Beaucoup d’affaires portées dans un tribunal partiront vers l’autre. Dès lors, quand les justiciables seront concernés, ils devront faire ces 90 kilomètres, alors qu’il n’y a plus de train – on a fait l’erreur de le supprimer voilà longtemps.

Vous nous dites, madame la ministre, de ne pas nous inquiéter. Vous feriez, à vous entendre, de l’homéopathie. Vous nous assurez que, de toute façon, la spécialisation ne concernera que très peu d’affaires, 10 % tout au plus.

Pour ma part, je n’ai pas de raison de ne pas vous croire, mais j’ai envie de vous poser une question : si c’est si homéopathique, à quoi cela sert-il ? Les gens, qui ont un certain bon sens, le voient ainsi : soit cela sert à quelque chose de répartir ainsi les tâches, auquel cas on devra aller loin, ce sera coûteux et la justice ne sera plus aussi proche, soit c’est homéopathique, et dans ce cas, pourquoi le faire, madame la ministre ?

Je me permets de me faire ici l’écho de réflexions peut-être simplistes, mais que voulez-vous ? Nous sommes au milieu des habitants de ces villes, nous tous les rencontrons tous les jours ; c’est pourquoi je me suis permis de m’exprimer ainsi.

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