Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les corapporteurs, mes chers collègues, la justice est le parent pauvre, l’institution à laquelle nous n’avons pas, dans le passé, donné suffisamment de moyens ; chaque gouvernement s’en préoccupe de manière plus ou moins heureuse.
Entre 2007 et 2012 – souvenons-nous tout de même de cette période ! –, se consacrer à la justice, c’était réduire à quatre-vingts l’effectif des promotions de magistrats recrutés, magistrats qui font cruellement défaut aujourd’hui. C’était la réforme de la carte judiciaire, qui laisse encore des doutes dans les esprits ; madame la garde des sceaux, vous le savez bien. C’était aussi la loi pénitentiaire de 2009, qui permettait de ne pas exécuter certaines peines d’emprisonnement de moins de deux ans ; cela a par la suite permis à certains d’en faire leurs choux gras, en disant que les peines ne sont pas exécutées !
Sous le précédent quinquennat, la garde des sceaux, Mme Taubira, avait lancé les états généraux de la justice. Ce grand débat aurait pu inspirer le gouvernement actuel, qui a préféré mener cinq chantiers rapides, dont les résultats rejoignent d’ailleurs pour partie ce qui a été dit lors des états généraux ou au sein de la mission d’information sénatoriale que présidait M. le président de la commission des lois et à laquelle j’avais participé au nom de mon groupe.
La garde des sceaux de l’époque avait, en matière pénale, fait une proposition que d’aucuns ont beaucoup décriée : la contrainte pénale.
Son successeur avait envisagé que l’on permette à des époux, qui sont d’accord pour mettre fin à leur union, de s’organiser, chacun avec son avocat, pour établir une convention de divorce. Ainsi, ils n’auraient pas été obligés de se présenter devant le juge. Dans la mesure où ils étaient d’accord, ce dernier n’avait qu’un rôle : homologuer cette convention.
Madame la garde des sceaux, les réformes que vous nous proposez depuis lors relèvent, avant tout, de la programmation financière. Cette dernière devait s’établir sur cinq ans, mais à compter de l’année qui s’achève. À juste titre, les corapporteurs ont observé qu’il vaudrait mieux élaborer une programmation pour les cinq ans à venir, à partir de 2019.
D’ailleurs, en examinant le budget de la justice, il semble déjà que l’augmentation n’est pas tout à fait à la hauteur des objectifs inscrits à l’article 1er de votre projet de loi. L’article 1er proposé par nos corapporteurs fixe des montants supérieurs et conformes à ce qui avait été annoncé lors du vote de la proposition de loi défendue par M. Bas, en octobre 2017.
Qu’importe : l’essentiel c’est que des efforts soient accomplis, et qu’ils s’inscrivent dans la durée, ce qui, étant donné l’annualisation budgétaire, n’est jamais garanti.
Toutefois – je vous l’avais dit lors de la discussion générale –, ce que l’on voyait poindre nettement derrière cette réforme, c’était le moyen de faire des économies, au risque d’entraîner une déjudiciarisation et une déshumanisation. Or nos concitoyens ont besoin de la justice.
Je reprends l’exemple du divorce. Certes, lorsque les époux sont d’accord, ils n’ont pas besoin d’aller voir le juge ; mais lorsque l’un veut divorcer et l’autre non, lorsque le couple a des enfants et que telle ou telle disposition s’impose, les époux doivent être en mesure de voir un juge très rapidement.
Aujourd’hui, la conciliation de divorce n’a plus vocation à concilier des époux, …