Monsieur le président, madame la garde des sceaux, messieurs les corapporteurs, mes chers collègues, l’ambition des deux textes qui vont être mis aux voix dans un instant est-elle à la hauteur de leur intitulé ? Est-ce une « réforme pour la justice » ? Est-ce bien l’électrochoc dont notre système a besoin ?
À nos yeux, avant que le Sénat ne s’en saisisse, la réponse était négative. Nous avions un florilège de mesures, souvent intéressantes d’ailleurs, mais non une réforme ambitieuse. Nous avions un catalogue assez fourni que l’on aurait pu appeler « diverses dispositions en matière de justice ».
Vous avez pu le constater, madame la garde des sceaux, le Sénat n’a pas été avare de propositions lors des semaines d’examen des deux projets de loi, et pour cause : notre commission des lois est mobilisée sur ce sujet depuis des années, notamment pour ce qui concerne son aspect budgétaire, qui ne règle pas tout, évidemment, mais qui est fondamental.
Notre collègue Yves Détraigne, dont je salue l’implication dans ce dossier, nous alerte inlassablement lors de chaque projet de loi de finances sur de nombreux problèmes : le manque criant de moyens, l’état de délabrement des juridictions, l’insalubrité de nombreuses prisons, ou encore les moyens informatiques d’un autre âge avec lesquels greffiers et magistrats travaillent au quotidien.
Nous avons donc modifié l’article 1er du projet de loi, qui fixe la programmation pluriannuelle, conformément à ce que nous estimons indispensable au redressement de notre justice.
La réflexion du Sénat sur le sujet ne se limite pas à cet aspect financier qui, je le répète, ne règle pas tout.
Nos corapporteurs se sont appuyés sur les travaux de la mission d’information sénatoriale sur le redressement de la justice, lancée en 2016. Celle-ci avait abouti à pas moins de 127 propositions, et elle a conduit à l’adoption par le Sénat de la proposition de loi d’orientation et de programmation pour le redressement de la justice, le 24 octobre 2017.
Nous avons fait de très nombreuses propositions, qui ont souvent reçu ici un très large assentiment, au-delà des frontières entre groupes politiques.
Malheureusement, madame la ministre, force est de constater qu’au cours des deux semaines de travaux en séance le Gouvernement n’a eu qu’une seule ligne de conduite, claire : tenter de rétablir, point par point, presque obstinément, le texte initial.
Je reconnais que vous avez toujours cherché à argumenter vos positions, et que la qualité de nos débats mérite d’être saluée.