Intervention de Daniel Marsin

Réunion du 3 décembre 2007 à 15h15
Loi de finances pour 2008 — Outre-mer

Photo de Daniel MarsinDaniel Marsin :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, chacun d'entre nous sait que l'outre-mer souffre de ses différences et de son éloignement. Mais l'outre-mer souhaite transformer ses spécificités ainsi que ses ressources naturelles, culturelles et humaines en une force pour son développement et en un atout pour la France, à travers son rayonnement sur les cinq continents.

Dès votre prise de fonction, monsieur le secrétaire d'État, vous avez compris, me semble-t-il, l'ampleur de la tâche que vous avait confiée le Président de la République, à savoir promouvoir un vrai développement économique et créer les conditions d'une réelle égalité des chances en outre-mer.

Pour appréhender au mieux et au plus vite les spécificités de chacun de ces territoires ultramarins, vous faites preuve, il faut vous l'accorder, d'une forte présence sur le terrain.

Ce volontarisme, monsieur le secrétaire d'État, est de nature à rassurer a priori nos compatriotes, qui, malgré la permanence des problèmes et la dureté de la vie, continuent à croire que les choses peuvent changer favorablement. Encore faut-il effacer rapidement les effets des trois dernières catastrophes qui viennent de frapper nos deux départements antillais.

D'abord, le cyclone Dean a ravagé nos îles en août dernier. L'état de catastrophe naturelle vient d'être déclaré : 1, 965 million d'euros ont déjà été débloqués sur les 73, 125 millions d'euros prévus, mais cela reste très maigre vu l'ampleur des dégâts, évalués à près de 500 millions d'euros, et l'urgence des besoins de la population défavorisée comme des acteurs économiques les plus fragiles. Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d'État, pour que d'ici à la fin de l'année l'aide soit plus substantielle ?

Dans le même registre, pouvez-vous nous assurer que la solidarité nationale joue à plein et que, contrairement à ce que suspecte un de nos collègues de l'Assemblée nationale, les fonds mobilisés pour la circonstance ne sont pas prélevés sur des lignes budgétaires dédiées à d'autres actions autrement importantes pour nos sociétés ultramarines ?

Il y a eu ensuite la pollution de nos sols par les pesticides, le chlordécone en particulier. Même si le rapport du Pr. Belpomme fait l'objet d'une réception controversée et qu'il a pu donner lieu à des interprétations sans doute excessives, il a eu au moins le mérite de pointer un dossier majeur, depuis longtemps connu de tous, et de mettre l'accent sur la nécessité d'accélérer les investigations scientifiques et techniques pour conjurer les effets de la pollution sur le plan économique et sanitaire. Pouvez-vous nous dire, après l'audition à laquelle nous avons procédée dans le cadre de la commission des affaires sociales mais aussi de la commission des affaires économiques, où nous en sommes aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État ?

Enfin, pour couronner le tout, un séisme d'une rare intensité - il a atteint une magnitude de 6, 8 à 7, 3 sur l'échelle de Richter - a frappé les Antilles jeudi dernier.

Nous l'avons échappé belle, monsieur le secrétaire d'État, puisque, grâce à la profondeur de l'épicentre, les dégâts ont été limités, mais j'ai eu très peur, car je connais l'extrême fragilité de ces grandes barres d'habitat collectif hors normes qui jonchent le sud de ma bonne vieille ville des Abymes. Et j'ai encore très peur, car un prochain séisme pourrait être beaucoup moins profond et donc beaucoup plus dangereux !

Vous comprendrez donc, monsieur le secrétaire d'État, pourquoi je désespère... Allons, je continue à espérer : vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, pourquoi j'espère voir valider l'important programme de renouvellement urbain pour les quartiers dégradés de ma ville, dont l'aboutissement à l'ANRU, l'agence nationale de la rénovation urbaine, dépend des engagements que vous voudrez bien prendre quant à la participation de l'État à son financement.

Cela étant dit, monsieur le secrétaire d'État, il s'agit de votre premier budget et, comme tout premier budget, il connaît des faiblesses.

À première vue, les crédits de la mission pour 2008 dénotent une sensible baisse par rapport à 2007 : 1, 73 milliard d'euros en crédits de paiement pour 2008 contre 1, 86 milliard d'euros pour 2007 et 1, 76 milliard d'euros en autorisations d'engagement pour 2008 contre 1, 91 milliard d'euros pour 2007.

Mais, bien sûr, il convient d'aller plus en profondeur et de relever deux éléments sur le « bleu budgétaire ».

Il faut ainsi d'abord constater un changement de périmètre : la disparition du programme 160 « Intégration et valorisation de l'outre-mer » entraîne des transferts nécessaires pour améliorer la gestion comptable et administrative des crédits, mais j'aurais aimé que ces transferts soient davantage lisibles.

Ensuite, il y a un retraitement des données 2007, afin, semble-il, de permettre une comparaison plus efficace des crédits avec ceux qui sont prévus pour 2008.

À cet égard, on ne peut que regretter que la différence de périmètre utilisé entre les données 2007 et les données 2008 fasse apparaître un budget en recul alors qu'en réalité, selon les observations de trois de nos commissions, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, le budget serait en augmentation de plus de 3 % en crédits de paiement et de 2 % en autorisations d'engagement.

Sur ce point, le document reste très obscur et cela ne nous aide ni vous ni nous, monsieur le secrétaire d'État. Aussi, une fois de plus, j'exprime le souhait que nous ne soyons plus confrontés à ces difficultés récurrentes d'analyse pour les budgets à venir.

En détaillant les programmes de la mission, il apparaît tout d'abord que le programme°123 « Conditions de vie outre-mer » connaît une hausse de 2, 21 % par rapport à 2007 pour les crédits de paiement.

L'action relative au logement enregistre en apparence une forte augmentation, tant en crédits de paiement qu'en autorisations d'engagement, mais les crédits alloués au logement vont-ils servir à payer des dettes ou à financer de nouveaux logements ?

Je souhaite d'autant plus vous entendre à ce sujet, monsieur le secrétaire d'État, que, lors de la conférence nationale du logement outre-mer, tant M. Jean-Louis Borloo que votre prédécesseur M. François Baroin avaient reconnu que, pour assurer la relance du logement social outre-mer, il était nécessaire non seulement d'éponger les dettes, mais aussi d'augmenter les dotations. À supposer que la dette de 2006 ait été soldée, qu'en est-il pour 2007, monsieur le secrétaire d'État ?

Il est indispensable que les crédits servent véritablement à financer de nouveaux programmes nouveaux, car, comme l'a confirmé le Président de la République au secrétariat d'État de l'outre-mer le 13 juillet 2007, le logement est « l'élément de base du cadre de vie, il fait partie de la dignité de la personne ».

Aujourd'hui, il est plus que temps, comme le prévoit le volet « logement » du plan de cohésion sociale de M. Borloo, complété par la loi portant engagement national pour le logement, de fixer les objectifs et de nous doter, dans un cadre pluriannuel, des moyens adaptés, et je ne vois pas, monsieur le secrétaire d'État, comment nous pourrions atteindre ces objectifs sans un doublement des crédits !

L'action 3 relative à la continuité territoriale voit pour sa part l'ensemble de ses crédits stagner.

Je regrette, monsieur le secrétaire d'État, que les fonds alloués au passeport mobilité régressent, alors que ce dispositif connaît un vrai succès parmi les jeunes.

Sur un plan plus général, Nicolas Sarkozy a affirmé en tant que candidat, puis en tant que Président de la République que la continuité territoriale était un « gage de cohésion nationale ». Dans ce domaine, monsieur le secrétaire d'État, comment les dossiers ont-ils avancé ?

Comme les acteurs socioprofessionnels, je m'inquiète que, pour pallier les difficultés rencontrées par l'État pour assurer ses missions régaliennes en matière de sûreté et de sécurité aéroportuaires, il ait fallu instaurer une taxe supplémentaire de 0, 88 euro par passager sur le prix des billets d'avion.

J'en viens au programme°138 « Emploi outre-mer ».

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