Intervention de Georges Othily

Réunion du 3 décembre 2007 à 15h15
Loi de finances pour 2008 — Outre-mer

Photo de Georges OthilyGeorges Othily :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la discussion des crédits de la mission « Outre-mer » constitue chaque année un moment important de la vie de près de 2 millions de nos compatriotes qui vivent dans les neuf départements et collectivités d'outre-mer.

De façon classique, la mission « Outre-mer » ne regroupe que les crédits gérés en propre par le secrétariat d'État chargé de l'outre-mer. Elle est dotée pour 2008 de 1, 73 milliard d'euros en crédits de paiement et de 1, 764 milliard d'euros en autorisations d'engagement.

À périmètre constant, les crédits de la mission augmentent de 3 % par rapport à 2007, soit un taux supérieur à la norme de dépenses de l'État. Ces crédits ne représentent que 13, 5 % de l'effort budgétaire de l'État en direction des collectivités ultramarines. L'ensemble de la politique transversale « outre-mer » est abondé à hauteur de 12, 84 milliards d'euros, auxquels il convient d'ajouter 2, 814 milliards d'euros de dépenses fiscales, soit un total de près de 15 milliards d'euros. C'est bien, et je me félicite que, avec 5 629 euros par habitant, la Guyane soit l'une des collectivités les mieux dotées.

Mais des problèmes subsistent. L'outre-mer doit faire face à de graves difficultés, en particulier dans le domaine du logement social, qui connaît actuellement une crise aiguë. Cette crise entraîne une triple conséquence : une forte baisse de l'offre, une dégradation du taux d'effort et des conditions d'accès des familles modestes à un logement décent, enfin, un regain de l'habitat indigne. La situation a tellement dégénéré que, en Guyane, la production d'habitat spontané et insalubre dépasse désormais l'offre de logements décents. L'ensemble des acteurs du logement social outre-mer estiment à bon droit qu'il est urgent de relancer aujourd'hui la construction de logements sociaux et de mener une véritable bataille contre l'insalubrité, dans la perspective de la mise en oeuvre du droit au logement opposable.

Au vu de ce contexte très préoccupant, l'examen des crédits alloués à la ligne budgétaire unique me laisse perplexe : 175 millions d'euros avaient été inscrits en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2007, auxquels il convient d'ajouter 30 millions d'euros au titre de redéploiements de crédits et de règlement de la dette de l'État envers des opérateurs sociaux. Or les 200 millions d'euros inscrits en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2008 s'apparentent à une diminution budgétaire maquillée, à laquelle il faut ajouter la baisse de 24 millions d'euros des autorisations d'engagement.

Monsieur le secrétaire d'État, quelles précisions pouvez-nous nous apporter concernant ces chiffres ? Comment démêler le vrai du faux ?

La relance de la construction de logements sociaux passe nécessairement par le maintien de l'effort de l'État, mais aussi par des mesures significatives. L'urgence est patente en termes d'actualisation des aides personnelles, de mise à niveau du « forfait charges » spécifique des DOM, de libération de foncier pour la construction. Dans tous les cas, le futur projet de loi de programme pour l'outre-mer devra impulser une nouvelle dynamique.

J'évoquerai également l'incertitude quant au sort du FEDOM, après la promulgation de l'ordonnance du 12 mars 2007 relative au code du travail. Ce fonds, qui permet aux parlementaires de l'outre-mer de s'associer à l'État dans la définition de la politique de l'emploi outre-mer, a fait ses preuves. Les populations ultramarines connaissent son apport. Or il semblerait que, de façon assez complexe, les crédits de ce fonds aient été transférés vers le ministère de l'emploi.

Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'État, que vous éclairiez de vos lumières la Haute Assemblée et que vous nous précisiez quel sort le Gouvernement a réservé aux 150 millions d'euros qui abondaient le FEDOM et aux aides indispensables qu'il soutenait.

La Guyane a aujourd'hui besoin d'un développement par l'excellence. L'ère du rattrapage est révolue. Le schéma régional de développement économique a parfaitement synthétisé les maux dont souffre aujourd'hui notre région : isolement géographique naturel de la plus grande partie du territoire, stagnation du revenu moyen par habitant, persistance d'un taux de chômage élevé, fragilité financière des PME, insuffisances des infrastructures et des services publics. J'y ajouterai la rapidité de la croissance démographique, alimentée par des flux migratoires hors de contrôle.

La Guyane n'a pas d'autre choix que celui d'une croissance économique rapide et riche en créations d'emplois. Si nous ne relevons pas ce défi dans les meilleurs délais, ne soyez pas étonné, monsieur le secrétaire d'État, qu'une grave crise sociale éclate en Guyane. Tous les élus sont conscients des contraintes budgétaires, a fortiori dans une Europe élargie. Nous n'en aspirons pas moins à pouvoir bénéficier du principe d'égalité des chances entre régions des États membres que les traités européens promeuvent.

En cela, le projet gouvernemental de zone franche globale d'activité peut constituer le levier qui nous manque tant et sur lequel prendrait appui un développement économique et social harmonieux.

Mais ce dispositif ne doit pas être mis en place à n'importe quel prix. Il doit s'inscrire sur le long terme - dix ans au minimum - afin d'assurer une réelle continuité dans la mise en place de ses mécanismes et d'avoir un effet favorable sur le développement économique.

Cette stabilité garantirait pour les investisseurs une lisibilité des dispositions fiscales ainsi créées. Cette durée doit conduire à rendre la mise en oeuvre de ce dispositif cohérente avec la LOOM et la LOPOM, mais aussi avec les zones franches urbaines, sous peine d'écraser toute initiative sous le poids des réglementations.

Il serait tout autant contreproductif que la zone franche globale d'activité fasse table rase des acquis précédents, alors que leur jeunesse rend leur évaluation encore incertaine. Les spécificités des marchés actuels des entreprises guyanaises - Antilles et marchés intracommunautaires - requièrent d'agir avec réalisme et de leur laisser le temps de se positionner sur les marchés extérieurs.

Enfin, l'impératif de sécurité exige la définition préalable et l'application d'une stratégie d'appui sur le terrain, par le biais d'indicateurs de performance et d'un accompagnement des entreprises.

Si vous voulez développer l'outre-mer avec nous, monsieur le secrétaire d'État, il faut créer un commissariat à l'industrialisation pour l'outre-mer, dont la mission serait de rechercher les investisseurs potentiels pour créer les industries dont ses collectivités ont besoin.

La Guyane ne manque pas d'atouts, grâce à ses richesses naturelles, qui constituent autant d'outils de développement économique. En effet, notre territoire recèle un biotope encore largement méconnu et dont l'intérêt pour la médecine et la pharmacie semble prometteur.

De nouveaux métiers et de nouvelles filières de formation pourraient ainsi être financés pour encourager et valoriser la recherche en la matière. Vous en conviendrez, un tel dispositif aurait d'immenses retombées sur le développement économique et social de notre territoire et, au-delà, de la France.

Monsieur le secrétaire d'État, dans le cadre du pôle de compétitivité « santé tropicale », pouvez-vous nous indiquer quels crédits seront mobilisés pour financer la recherche fondamentale et le développement des potentialités à très forte valeur ajoutée, à partir des principes actifs que nous pourrions trouver dans nos plantes médicinales ?

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