Intervention de Roxana Maracineanu

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 24 octobre 2018 à 16h40
Projet de loi de finances pour 2019 — Audition de Mme Roxana Maracineanu ministre des sports

Roxana Maracineanu, ministre des sports :

Merci de me recevoir ce jour pour échanger avec vous autour des questions budgétaires. Je détaillerai également devant vous ma vision en qualité de ministre des sports et aborderai les grandes lignes de la réforme que j'envisage de porter avec l'ensemble des acteurs.

En accord avec le Premier ministre, je m'appuierai notamment sur le rapport relatif à la gouvernance du sport qui m'a été remis mardi dernier. Celui-ci, établi après huit mois de concertation, comporte 57 mesures. Je souhaite enrichir ces propositions de mon expérience de sportive de haut niveau et d'éducatrice de natation, métier que j'ai pratiqué pendant dix ans au bénéfice de la petite enfance et, plus particulièrement des femmes, puisque j'ai créé, en 2010, une association s'adressant aux femmes venant d'accoucher ou ménopausées et aux enfants entre trois mois et six ans. Je souhaite également m'appuyer sur mon expérience de bénévole, puis de dirigeante d'association et d'élue à la région d'Île-de-France, où je me suis occupée du sport et de la formation.

Je mettrai aussi en avant ma qualité de mère de quatre enfants, âgés de 2 ans et demi à 12 ans, qui m'a permis de mesurer l'évolution de l'accueil au sein des associations sportives.

À court terme, l'un des outils majeurs de cette réforme sera la création, au cours du premier trimestre de 2019, de l'agence nationale du sport, qui sera chargée de la haute performance et du développement des pratiques. J'en ai esquissé les contours, le mode de fonctionnement et la structuration à l'Assemblée nationale, lors du débat budgétaire.

Il s'agit d'une réforme ambitieuse associant, aux côtés de l'État, l'ensemble des acteurs concernés par le sport.

D'abord, les acteurs incontournables que sont les collectivités territoriales - départements, régions, communes -, au regard de leur poids dans le financement du sport, et les acteurs des territoires - associations et parlementaires.

Les acteurs traditionnels du monde sportif ont été associés à cette concertation et auront un rôle prépondérant dans cette agence du sport, tant au niveau national, avec le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et le Comité paralympique et sportif français (CPSF), qu'au niveau local, avec les fédérations territoriales.

Le monde de l'entreprise est un nouvel entrant dans cette gouvernance du sport. Jusqu'à ce jour, il n'était présent que par le biais du sponsoring, alors qu'il s'impliquait dans le sport en mettant en place des actions de structuration et de développement des fédérations et des associations.

Bien évidemment, le Comité d'organisation des jeux Olympiques (COJO), qui porte aujourd'hui l'engouement suscité par les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, est lui aussi associé.

Cette réforme sera fidèle à mes expériences et aux deux grands objectifs que nous avons définis avec le Président de la République et le Premier ministre : réussir les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 et accroître le nombre de pratiquants de trois millions.

La réussite des jeux Olympiques se mesurera d'abord au nombre de médailles. Ce sera la tâche des médias de dresser ce bilan. La mienne sera d'évaluer ce qu'on aura réellement mis en place autour de l'athlète et de son entraîneur, qui sont au coeur des préoccupations de la partie « haute performance » de cette agence, d'écouter leur projet, de les accompagner jusqu'à la médaille, mais aussi après.

Ma prédécesseure Laura Flessel s'était exprimée sur cet aspect « haute performance » de l'agence, préfiguré par Claude Onesta. Même si elle n'existe pas encore, son équipe est en cours de constitution et des contacts ont déjà été pris avec les différentes fédérations pour aborder cet aspect de son action.

À travers le message du Président de la République, j'entends qu'il faut aussi favoriser la réussite subjective de chaque personne qui aura tenté, grâce à nous, l'expérience du sport, cette expérience qui permet à l'individu de se connaître et souvent aussi d'être reconnu, cette expérience du lien qu'il va créer avec l'autre, son partenaire d'efforts, son partenaire de jeu, son entraîneur, son éducateur, cette relation qui nous permet aussi de trouver notre place.

Porter ce message de réussite, c'est aussi porter le message auprès de nos concitoyens du progrès sensible que chacun peut vivre dans sa chair grâce au sport, grâce au retour bienveillant d'un éducateur, d'un coach, d'un ami qui pratique avec vous et qui vous regarde vraiment. Dans ce monde où l'avis qualitatif sur ce que vous êtes et votre marge de progression finissent toujours par être exprimés plus ou moins en chiffres, ce regard et cette sensation du progrès sur soi-même sont plus que jamais importants pour les individus.

Le second objectif que le Président de la République nous propose, c'est de parvenir à trois millions de pratiquants supplémentaires. Je l'interprète comme une injonction à transformer le modèle en changeant de point de vue : passer du ministère de ceux qui font le sport à ceux qui font du sport ; mettre au centre de nos préoccupations communes non plus uniquement les acteurs du sport - les fédérations via les contrats d'objectifs nationaux et les associations fédérales via le Centre national pour le développement du sport (CNDS) -, mais aussi le pratiquant.

Nos préoccupations communes - ministère, fédérations, associations, territoires -, c'est de s'occuper davantage du pratiquant pour englober plus largement et coller à la réalité sportive d'aujourd'hui. Le sport est une politique publique. Celle-ci doit être tournée vers les citoyens, questionner le rapport de chacun au sport, et, plus que toute autre, se mettre au service des autres politiques publiques. Une politique sportive doit être évaluée en fonction de son impact sur la vie quotidienne des Français.

Il faut considérer le sport comme un bien commun, un bien social de notre pays, qui appartient à tous : État, collectivités, mouvement sportif, monde économique et pratiquants de tous âges et de toutes origines culturelles ou sociales.

On peut parvenir à trois millions de pratiquants supplémentaires en démocratisant les primoapprentissages, en donnant la clé aux familles, aux parents, aux grands-parents, aux professionnels en crèche, en maternelle et dans le primaire. C'est ce que j'avais proposé, dans le domaine de la natation, au Premier ministre en juillet dernier, mais bien d'autres activités peuvent être concernées. Il nous faut aller là où le « savoir flotter » est essentiel pour la sécurité des enfants, là où lancer un ballon a une place pour créer un groupe et socialiser le petit enfant, là aussi où apprendre ce qu'on fait avec un bâton dans la main conditionne sa relation à l'autre et à l'adulte.

J'en viens aux aspects budgétaires.

Le budget du ministère des sports pour 2019 est un moyen pour accompagner cette réforme. Ce budget est préservé par rapport à 2018 et comporte même des mesures nouvelles.

L'ensemble des financements apportés par l'État au titre des sports est évalué à 515 millions d'euros. La diminution de 2,4 % par rapport à 2018 - 12 millions d'euros - est principalement liée à un ajustement technique qui prend en compte une surévaluation, en 2018, des crédits destinés à la compensation des exonérations de charges sociales pour les arbitres et juges sportifs.

Par ailleurs, un exercice d'optimisation a été mené lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2019, afin notamment de dégager des moyens nouveaux en faveur de la future agence du sport, qui sera créée en 2019.

Ainsi, une enveloppe supplémentaire de plus de 40 millions d'euros est intégrée dans le budget qui vous est présenté.

Sur ces moyens nouveaux, 25 millions d'euros seront consacrés à la haute performance pour renforcer les moyens alloués aux fédérations et aux mouvements sportifs. Le budget de la haute performance progressera ainsi de 40 % par rapport à 2018 au bénéfice des athlètes, puisque l'agence, à cet égard, sera centrée non plus sur les différentes fédérations, mais bien sur le sportif et son entraîneur. Les 15 autres millions d'euros seront consacrés au développement des pratiques afin de réduire les inégalités d'accès à la pratique sportive, en particulier dans les territoires carencés. En outre, pour donner une nouvelle impulsion au financement du développement des pratiques, j'ai défendu, lundi soir, lors du débat à l'Assemblée nationale, un amendement augmentant de 15 millions d'euros le plafond de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite « taxe Buffet ». Cet amendement a été adopté et permettra donc de porter à 55 millions d'euros les nouveaux crédits destinés à accompagner cette réforme et à financer la création de la future agence. Ces 15 millions d'euros supplémentaires seront consacrés au développement des pratiques afin de financer des mesures concrètes en faveur de la lutte contre les inégalités d'accès à la pratique sportive ou encore le programme « savoir nager ».

Au total, le budget du sport pour 2019, hors crédits de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), sera donc supérieur de plus de 11 millions d'euros aux moyens d'intervention obtenus en 2017.

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