Monsieur le secrétaire d'État, vous avez décidé de soumettre au Parlement une loi de programme pour répondre à la situation économique et sociale préoccupante dans les départements d'outre-mer. Comment pourrions ne pas considérer, nous aussi, que cette situation est préoccupante ?
À la Réunion, par exemple, sur une population active de 300 000 personnes, 90 000 sont privées d'emploi. Dans les vingt ans à venir, la Réunion comptera 140 000 actifs de plus ; au total, il faudra donc « gérer » 440 000 personnes.
Toujours sur le plan social, la Réunion détient le record du nombre d'illettrés, évalué à 120 000 personnes. En matière de logement, les besoins sont considérables : plus de 26 000 demandes sont en instance.
Ainsi, les exigences sociales sont multiples et massives. L'examen du budget permet-il de dire que les réponses apportées sont à la hauteur des besoins ? Non. En ira-t-il différemment lorsque nous examinerons votre projet de loi de programme ? Si cette dernière apporte une amélioration en termes de création d'emplois, ses effets ne se feront sentir que dans quelques années. Ainsi, si l'on ne veut pas voir la situation du chômage s'aggraver, il est impératif, pendant ce laps de temps, de maintenir, voire d'augmenter les crédits pour les emplois aidés. Or votre projet de budget consacre leur diminution.
Je suis de ceux et de celles qui pensent que l'avenir de nos territoires et départements d'outre-mer ne peut se résumer au maintien perpétuel des emplois aidés. Cependant, tant qu'un projet de développement global ne sera pas mis en oeuvre pour permettre au secteur marchand de créer des emplois, le maintien des emplois aidés est une nécessité, à condition que ces derniers ne viennent pas contredire le plan global de développement.
C'est la raison pour laquelle je propose, comme je l'ai déjà indiqué lors de la discussion générale, d'orienter ces crédits vers des secteurs consommateurs de main-d'oeuvre, comme les services à l'environnement et l'aide à la personne, tout en faisant les efforts nécessaires pour une professionnalisation des employés et une pérennisation des emplois.
Le développement global est réalisable à partir de grands travaux d'infrastructures. Par exemple, à la Réunion, la construction de la route des Tamarins et de celle du littoral ainsi que le projet du tram-train vont créer des milliers d'emplois pérennes.
Je pense aussi aux énergies renouvelables et aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, dont l'essor engendrera des milliers d'emplois.
Je pense encore à un secteur très porteur dans l'océan Indien, qui peut faire l'objet d'une coopération avec nos voisins, celui de la pêche. Selon les professionnels, plus de 15 000 emplois peuvent être créés dans ce secteur.
Des solutions existent donc. Certaines sont déjà à l'étude avec votre participation, monsieur le secrétaire d'État, mais les retombées en termes d'emploi ne se feront ressentir que dans quelques années.
Je l'ai dit dans mon intervention générale, le Président de la République a proposé d'ouvrir plusieurs chantiers importants concernant l'outre-mer. Il a reconnu que l'outre-mer apportait énormément à la France et à la République. J'espérais que nous serions en quelque sorte « payés en retour » et que ces chantiers seraient ouverts avec nous. Or je n'en trouve pas trace dans ce projet de budget, qui est même en retrait par rapport aux engagements pris par le Président de la République.
Le projet de loi de programme corrigera peut-être le tir. En l'état, mon groupe ne peut voter ces crédits, qui ne répondent ni aux ambitions du Président de la République ni aux nôtres.