Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, tous les élus ont un jour été confrontés au désarroi de parents à la recherche d’une structure d’accueil pour leur enfant porteur d’un handicap. Nous sommes évidemment très sensibles à la requête des familles, qui souhaitent le meilleur pour leurs enfants.
Depuis la loi du 11 février 2005, les chiffres sont encourageants au niveau national : le nombre d’enfants scolarisés en situation de handicap a plus que triplé. Le nombre d’élèves accueillis est passé d’environ 100 000 en 2006 à près de 350 000 en 2018. Dans 98 % des cas, les demandes d’accompagnement sont satisfaites. Certes, quantitativement, la réponse est bien réelle. Mais correspond-elle toujours aux attentes ? À quel sort sont livrés les 2 % qui restent sur la touche ?
Nous devons analyser l’effectivité du droit à l’éducation et mesurer la portée et les limites de l’universalité des droits de l’enfant. En effet, derrière ces chiffres se cachent de grandes disparités entre les situations, mais aussi entre les départements, disparités à la mesure de la pluralité des handicaps.
Les questions liées aux délais de prise en charge et à la continuité de l’accompagnement sont particulièrement saillantes. L’attente est insoutenable pour les familles, d’autant que le délai de réponse de quatre mois imposé à la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées est une gageure, qui dissimule de fortes disparités entre les départements.
Les auteurs de la proposition de loi examinée récemment à l’Assemblée nationale prévoyaient de diviser par deux ce délai. Sans moyen supplémentaire peut-on y parvenir ? Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un chantier prioritaire.
Je m’attarderai sur la situation en Mayenne, territoire que je connais bien. Dans mon département, la direction de l’autonomie s’est structurée pour répondre au mieux et au plus près des personnes en situation de handicap. Grâce à un partenariat et une coordination exemplaire entre les différents intervenants que sont le conseil départemental, l’éducation nationale, les collectivités et les institutions, quelque 2 400 élèves en situation de handicap ont accès à l’éducation.
Certes, pour 32 enfants de notre département, seul un plan B a pu être mis en œuvre, aucun enfant ne devant rester sans accueil. Admettons-le, certaines solutions ne sont pas à la hauteur des attentes des parents. Ce préjudice scolaire est vécu comme un préjudice moral, psychologique, voire physique.
Pour toutes les situations rencontrées, l’objectif prioritaire est de favoriser l’inclusion scolaire dans le milieu dit « ordinaire ». C’est le cas de 89 % des enfants en situation de handicap en Mayenne. Pour 11 % d’entre eux, la nécessité de soins thérapeutiques n’est pas compatible avec l’inclusion scolaire.
La prise en charge du handicap appelle des solutions innovantes. Dans mon département, il a été créé une unité localisée pour l’inclusion scolaire, une ULIS, intitulée « Appui en milieu ordinaire ».
Les adolescents sont accueillis en CAP au sein de trois établissements scolaires différents. Un enseignant répartit son temps entre les trois établissements, afin de répondre aux difficultés rencontrées par les élèves et d’apporter les adaptations nécessaires, en lien avec les enseignants. Cette success story résulte d’une initiative qui n’est pas d’origine « académique », mais qui se révèle donner d’excellents résultats puisque ces élèves ont pu accéder au diplôme du CAP et, par conséquent, à l’emploi.
Un tel exemple illustre la nécessité de faire preuve d’imagination pour répondre à toutes les situations, dans l’intérêt exclusif de l’enfant.
Les résultats intéressants obtenus en Mayenne sont le fruit d’une volonté politique de coopération efficace de tous les acteurs concernés, au bénéfice des enfants en situation de handicap.
L’enfant en situation de handicap est à la fois un enfant, un patient et un élève. L’approche transversale des politiques publiques sur la question du handicap est à approfondir pour gommer les rigidités et ne pas pénaliser encore davantage les enfants et leurs familles.
La recherche du bien-être de l’enfant est une quête du bonheur par la famille. Je conclurai donc par ces mots de Jacques Prévert :
« Le bonheur, en partant, m’a dit qu’il reviendrait…
Que quand la colère hisserait le drapeau blanc, il comprendrait… »