Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après l'analyse du budget pour 2008, présentée avec efficacité et clarté par les précédents orateurs, je m'en tiendrai à quelques observations sur les points positifs et sur les quelques éléments négatifs qui ont marqué l'évolution du secteur du soutien militaire au cours des dernières années.
Un effort marqué a été accompli depuis 2000 pour rationaliser l'organisation et réduire les coûts du maintien en conditions opérationnelles - appelé couramment MCO - des divers équipements en service dans les armées.
L'apport financier de la loi de programmation 2003-2008 a permis de redresser des taux de disponibilité des matériels qui étaient très souvent inquiétants, ne dépassant pas 50 %, quand ils n'étaient pas inférieurs à ce pourcentage.
Cette loi a également permis une rationalisation, qui n'est pas achevée, de l'organisation et des modalités de réalisation des opérations de MCO.
La création successive du service de soutien de la flotte, en 2000, et de la structure intégrée de maintien en conditions opérationnelles des matériels aéronautiques de la défense, plus connue sous l'acronyme de SIMMAD, en 2002, ainsi que celle, au début de 2008, du SIAé constituent autant d'atouts pour les armées qui sauront s'en servir utilement.
Toutes les actions destinées à restructurer et à mutualiser les moyens destinés aux trois armées sont bénéfiques, car elles démontrent que nos forces ne cessent de réfléchir à leur organisation en vue de l'optimiser, grâce à une démarche interarmées pragmatique, que nos militaires ont comprise et mise en oeuvre. À nous de leur donner des signes de reconnaissance, en prenant des décisions renforçant cette démarche de modernisation, de mutualisation et d'efficacité.
C'est grâce à ces efforts que le poste de dépenses le plus important, le MCO, notamment aéronautique, a fait l'objet, depuis 2002, d'une forte restructuration, fondée sur une « interarmisation » pragmatique, avec la création de la SIMMAD. Le fonctionnement de cette structure doit encore être amélioré pour réduire les coûts d'entretien des matériels, mais beaucoup a déjà été fait et pourrait être utilement transposé au niveau européen. Par exemple, la création d'un organisme analogue à la SIMMAD au sein de l'Agence européenne de défense donnerait un contenu concret à une coopération européenne encore à développer et simplifierait les difficiles discussions en cours sur la répartition des marchés de MCO entre les pays partenaires des équipements aéronautiques, élaborés en commun, comme l'hélicoptère NH90 et l'avion de transport militaire A400M.
Nous regrettons tous les retards pris dans la livraison de cet appareil, mais serons-nous prêts, lorsqu'il sera disponible, à en équiper nos forces, étant entendu qu'il aura fallu, préalablement, assurer la formation des pilotes que mettre en place des structures adéquates pour son MCO ? Souhaitons-le. Mais il faudrait agir rapidement et donner les moyens nécessaires à nos armées.
La prochaine création du SIAé permettra d'optimiser la répartition des actions de MCO entre les armées et les industriels. Ce service devra déterminer les activités de soutien qu'il est indispensable de maintenir dans les forces, tant pour y pérenniser un socle de compétences techniques que pour y assurer un soutien de proximité. J'y suis favorable, à condition que la liberté de chacun puisse s'y exercer, en ce qui concerne tant la parole que l'écoute.
J'en viens aux difficultés que je souhaite évoquer.
Les premiers bilans tirés des expériences d'externalisation qui se sont multipliées depuis la professionnalisation sont contrastés, quoi qu'en ait dit M. le rapporteur spécial ; les prestations ne sont pas toujours satisfaisantes et chaque renouvellement de contrat est automatiquement l'occasion d'augmentations, parfois très fortes, des coûts. Soyons donc vigilants !
En matière de dépenses courantes de fonctionnement, la sous-traitance d'activités non militaires présente, à l'usage, des dérives financières importantes, faute de concurrence et de compétences suffisantes au sein des armées en matière de négociation de ce type de contrat. L'adjudication, la gestion de marchés publics comme la location de services sont des métiers à part entière, et l'on ne saurait reprocher aux militaires d'avoir besoin de temps pour les maîtriser.
Cependant, il semble acquis que la location de services est coûteuse et qu'elle le sera de plus en plus, sans que l'efficacité des services rendus en soit pour autant garantie. L'évolution de ces coûts pose donc la question de l'éventuelle réintégration de ces tâches parmi celles des personnels militaires. Monsieur le ministre, je pense qu'il sera nécessaire de se demander, en procédant à une évaluation rigoureuse, si l'externalisation n'était pas une mode. Ne faudra-t-il pas revenir sur cette notion ?
Je conclurai, dans un premier temps, en saluant le service des essences des armées, le SEA. Selon moi, ses compétences sont trop méconnues à l'échelon national, alors qu'elles sont reconnues par nos partenaires, notamment par ceux qui ont participé à l'intervention au Kosovo, dont il a, à lui seul, assuré le soutien. Tout le monde s'en est trouvé satisfait. Sachons donc reconnaître la qualité de son action.
Sur ce point, j'ai une question à vous poser, monsieur le ministre. Le ministère semble avoir imposé au SEA, en 2005, l'obligation de souscrire une assurance afin de minimiser les effets des fluctuations des cours sur leurs achats. Cette assurance, dont le coût est considérable, puisqu'il s'est élevé à 4 millions d'euros en 2006 et atteint 3 millions d'euros en 2007, soulève des interrogations. Pourquoi la règle selon laquelle l'État est son propre assureur ne joue-t-elle plus en ce cas précis ? Pourquoi le SEA est-il contraint de prendre une telle assurance, qui détourne des sommes importantes des achats de produits pétroliers, ce fait ne produisant pour le ministère aucune retombée positive selon ce que j'ai pu comprendre au cours des auditions auxquelles j'ai procédé ? J'espère que vous pourrez nous éclairer sur cette singulière façon de travailler.
Sous ces réserves, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits affectés à la mission « Défense » dans le projet de loi de finances pour 2008.
Mais je ne peux m'empêcher, en complément, de porter un jugement différent de celui de mon excellent collègue Yves Fréville, notamment sur le programme Rafale.
Je tiens à affirmer dans cette enceinte que le Rafale est une bonne arme, une excellente arme.