Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 31 octobre 2018 à 14h30
Préjudice représenté pour les entreprises françaises par la surtransposition du droit européen en droit interne — Débat organisé à la demande de la commission des affaires européennes et de la délégation sénatoriale aux entreprises

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis près de quatre ans que la délégation sénatoriale aux entreprises existe, elle sillonne la France à la rencontre des entreprises. Il ne se passe pas un déplacement de terrain sans que nous soyons interpellés sur le désavantage compétitif subi par nos entreprises lorsque la France surtranspose en droit interne certaines de ses obligations européennes.

C’est en effet un vrai handicap de compétitivité qui pénalise notre économie, particulièrement notre industrie, à l’intérieur même du marché unique, par des contraintes administratives et techniques qui alourdissent les coûts et retardent la mise en œuvre des projets. La délégation sénatoriale aux entreprises s’en est fait l’écho dès février 2017 dans son rapport intitulé Simplifier efficacement pour libérer les entreprises. Nous y donnions de nombreux exemples, comme celui cité lors d’un déplacement en Saône-et-Loire au sujet de la surréglementation française concernant les poussières de bois, les normes européennes étant cinq fois plus basses en la matière que celles que la France a choisi de s’imposer.

Dans un rapport également publié en février 2017, intitulé La simplification du droit : une exigence pour l ’ Union européenne, la commission des affaires européennes confirmait l’existence d’une forme d’exception française, le droit national allant au-delà des normes exigées par les directives ou adoptant une interprétation exigeante des règlements européens.

Si tous les écarts de transposition ne sont pas illégitimes, l’impact de ces mesures nationales en termes de compétitivité est trop rarement débattu. C’est pourquoi, avec le président de la commission des affaires européennes, Jean Bizet, nous avons sollicité ce débat aujourd’hui.

Le Gouvernement n’ignore pas la question. Déjà, les premiers comités interministériels pour la modernisation de l’action publique, les CIMAP, du 18 décembre 2012 et du 2 avril 2013 avaient conduit à la publication de la circulaire du 17 juillet 2013, qui prévoyait de limiter l’inflation normative, notamment de ne pas surtransposer les directives communautaires sans justification. Concernant le stock de surtranspositions, un rapport identifiant des écarts de réglementation entre la France et les autres États membres avait même été élaboré à la demande du ministre de l’économie de l’époque, M. Macron, et lui avait été remis en mars 2016. Malgré tout l’intérêt de cette démarche, le gouvernement d’alors n’a malheureusement pas donné suite.

Le gouvernement auquel vous appartenez, madame la secrétaire d’État, s’est également montré sensible au sujet. La nouvelle circulaire du 26 juillet 2017 appelait à son tour à porter une vigilance particulière à la transposition des directives européennes, en flux comme en stock, et interdisait en principe toute mesure allant au-delà des exigences minimales de la directive, sauf justification arbitrée par le Premier ministre. Elle annonçait qu’une prochaine mission d’inspection serait chargée d’un travail d’inventaire censé aboutir en mars 2018. Bien qu’il n’ait pas été transmis au Parlement, ce travail semble avoir produit des fruits, puisque le Gouvernement vient de déposer un projet de loi portant suppression de surtranspositions de directives européennes en droit français.

Sans attendre le Gouvernement, le Sénat avait pris les devants. Dès l’hiver dernier, la commission des affaires européennes et la délégation sénatoriale aux entreprises se sont mobilisées pour analyser le phénomène de surtransposition, en mesurer l’ampleur et tenter d’y remédier.

Une consultation en ligne a été lancée auprès des entreprises, et notre collègue René Danesi, membre de ces deux instances, s’est vu confier le soin d’en exploiter les réponses. Sur le fondement de cas concrets, il a ainsi pu élaborer un rapport, adopté le 28 juin dernier par la délégation sénatoriale aux entreprises et par la commission des affaires européennes. Ce rapport établit une typologie des différentes situations de surtransposition et s’attache, en outre, à en identifier les motivations. Notre collègue René Danesi va donc nous présenter ses conclusions et les suites qu’il entend leur donner.

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