En 2018, 400 postes mis au concours du CAPES n'ont pas été pourvus, principalement en mathématiques, en lettres et en langues vivantes. Cet état de fait favorise la diminution des effectifs que j'évoquais tout à l'heure. Les métiers de l'enseignement sont en compétition avec d'autres métiers de services. Ainsi, les formations au numérique reposent en grande partie sur les mathématiques. Or, il faut une grande force de conviction pour préférer gagner moins dans une classe indisciplinée que de gagner plus dans l'ambiance décontractée d'une « start-up », même si les risques de licenciements ne sont ensuite pas minces... Le métier d'enseignant a donc besoin d'être soutenu, tant sur le plan matériel que psychologique : les enseignants ont trop souvent le sentiment d'être seuls. C'est un beau métier mais la matière est difficile et l'environnement incertain, surtout du fait que la hiérarchie tente de s'affranchir de ses responsabilités en demandant aux enseignants d'étouffer les incidents. Sans travail et sans discipline, pas de résultats.
Le primaire compte 3 000 contractuels et le secondaire 30 000. À une époque, la contractualisation permettait d'espérer une titularisation. Aujourd'hui, tel n'est plus le cas : ces emplois sont occasionnels. L'existence de contractuels est l'expression de la crise de cette profession.
La création de 46 000 postes d'enseignants entre 2012 et 2017 n'a pas fait l'objet d'une évaluation scientifique. Le pourcentage des élèves rencontrant des difficultés reste au même niveau : entre 15 % et 20 %. Il est néanmoins difficile de se prononcer, car les effets de ces recrutements ne pourront être mesurés que dans la durée.
Lors de la précédente législature, la politique « plus de maîtres que de classes » était menée. Le ministre a fait un choix différent en scindant les classes en deux : mathématiquement, le résultat est identique, mais le résultat semble bien meilleur car chaque enseignant est responsable de sa classe. Nous allons demander l'évaluation des mesures menées. Même s'il coûte cher, le dédoublement des classes semble donner des résultats ; il en va de même pour la politique des devoirs faits qui mobilise des enseignants mais aussi des volontaires. Enfin, les stages de réussite reposent sur la mobilisation des familles et le sens de la responsabilité des élèves.
Le ministre a évoqué l'internat mais le budget ne comporte aucune mesure concrète, alors que des internats pourraient sauver des établissements. Les internats de la réussite ont bénéficié de crédits des Programmes d'investissements d'avenir (PIA). Je ne vois rien dans le budget qui permette d'améliorer le sort des 210 000 places d'internat et qui sont occupées à 80 %. Les deux adversaires de l'internat sont la multiplication des établissements sur le territoire, ce qui renforce la proximité mais nuit aux internats, mais aussi l'évolution du milieu familial qui se veut plus protecteur des enfants.
L'augmentation de 5 813 postes qui figure dans le budget de l'éducation nationale n'en est pas une : il s'agit de l'extension en année pleine des recrutements intervenus en 2018 et de la transformation de contrats aidés en accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH).
La scolarisation des enfants handicapés fonctionne assez bien. Les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont augmenté de 300 % les prescriptions d'accompagnement au bénéfice d'enfants handicapés qui sont de plus en plus nombreux : il s'agit d'enfants qui souffrent souvent de problèmes psychologiques, plus que de handicaps physiques. Les MDPH font porter à l'éducation nationale des problèmes qui ne ressortent pas, à proprement parler, de l'éducation. La définition du handicap mériterait peut-être d'être revue.
Le Comité CAP 2022 a proposé la création d'un nouveau statut pour les enseignants du secondaire. Depuis, plus rien. Les agrégés assurent 15 heures hebdomadaires tandis que les autres doivent dispenser, en fonction des catégories auxquelles ils appartiennent, 18 ou 21 heures de cours. Nous poserons la question au ministre en séance publique. Dans un rapport que j'ai commis, je proposais d'augmenter les obligations de service à 20 heures hebdomadaires pour les certifiés, les contractuels et les agrégés, hors classes préparatoires aux grandes écoles.
Les langues anciennes ne sont pas menacées. En revanche, sont visées les multiples activités professionnelles enseignées à l'école et la diversité des options. Il ne semble en effet pas indispensable de consacrer autant de moyens à des langues peu pratiquées qui, pour certaines, relèvent de la volonté individuelle ou de la vie communautaire. Le ministère va vers l'offre qu'il juge la plus utile.