Je vous proposerai d'adopter sans modification le budget de la mission « Enseignement scolaire ».
Ce budget marque, par rapport au quinquennat précédent, une inflexion qui correspond aux souhaits de la majorité de notre commission. Sans doute cette inflexion n'est-elle ni suffisante ni décisive, mais les orientations du ministre répondent à nos voeux.
Les dépenses augmentent de 1,7 % en crédits de paiement ; ce qui est moins que pendant le quinquennat précédent, au cours duquel les dépenses ont crû de 2,4 % par an pendant cinq ans. Un symbole significatif : la très légère diminution des effectifs, à hauteur de 1 850 équivalents temps plein (ETP), sachant que notre démographie diminue de façon inquiétante ; au cours des prochaines années, les effectifs d'élèves dans le premier degré diminueront ainsi de trente à quarante mille élèves par an. C'est d'ailleurs cela qui permettra d'absorber la généralisation de la scolarité à partir de trois ans - mesure de bon sens - à moyens constants, et même en prolongeant la baisse des effectifs.
Ce qui est surtout satisfaisant, c'est moins la baisse des effectifs que la répartition de l'effort, puisque, conformément à nos souhaits, les effectifs dans le premier degré progressent de 1 800 ETP, en raison notamment de la généralisation, qui s'achèvera en 2019, du dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP+. Environ trois cent mille élèves bénéficieront de ce dispositif, qui devrait améliorer les résultats du primaire, facteur de réussite dans le secondaire.
Les mesures du ministre de l'éducation nationale éclairent sa volonté de soutenir la qualité de l'enseignement primaire, au travers des stages de réussite pour 70 000 futurs collégiens - ces stages sont animés par des professeurs volontaires, rémunérés en heures supplémentaires - et de l'extension de la politique des devoirs faits au collège, qui commence à porter ses fruits. Tout cela est de bon augure pour la réussite de notre formation.
En contrepartie, il faut des moyens. Sur l'enseignement secondaire, le ministre a été prudent ; on sent qu'il veut mettre de l'ordre mais qu'il n'a pas encore complètement arrêté sa politique. Les classes de moins de dix élèves par enseignant représentent environ 7 % des classes. Cette proportion s'explique notamment par l'organisation territoriale de l'enseignement technique et professionnel et par l'organisation actuelle du baccalauréat qui conduisent à une dispersion extrême des moyens humains et à des effectifs d'élèves réduits.
En 2019, la maîtrise de l'offre dans l'enseignement secondaire général et technologique passe par deux mesures. La première est la diminution du nombre d'épreuves au baccalauréat, qui permettra la reconquête de semaines scolaires au mois de juin. C'est très important, car les obligations règlementaires de service (ORS) des enseignants s'entendent à l'échelle de la semaine, non de l'année, et, en 2019, les ORS ne seront pas remises en cause, alors que leur annualisation comblerait bien des besoins de remplacement.
Second levier : la réorganisation de l'enseignement professionnel. Le ministère évoque des « campus d'excellence » ; on ne sait pas ce que c'est, mais espérons qu'il s'agisse de regrouper l'offre de l'enseignement professionnel pour en éviter la dispersion ; en effet, l'enseignement professionnel prépare à dix mille métiers différents, ce qui est une source de complexité et de sous-utilisation des moyens, donc d'un coût élevé.
En outre, l'orientation vers l'enseignement professionnel sera plus bienveillante. Les enseignants ont tendance à orienter autant que possible vers la voie générale ; en conséquence, l'apprentissage et l'enseignement professionnel ont l'image d'un enseignement par défaut, d'un échec.
Au total, les effectifs dans le secondaire diminueront à hauteur de 2 650 ETP. Cette baisse sera compensée un peu par la rationalisation de l'offre que je viens d'évoquer et beaucoup par l'augmentation des heures supplémentaires. En effet, le nombre d'heures supplémentaires pouvant être imposées par le chef d'établissement en cas de nécessité de service passera d'une à deux heures à compter de la rentrée prochaine.
Donc ce budget repose sur un équilibre entre le soutien à l'enseignement primaire et la rationalisation du secondaire.
Quelles en sont les mesures concrètes ?
J'indique tout d'abord qu'un dépassement du plafond fixé par la loi de programmation des finances publiques de 170 millions d'euros peut être constaté, dû à l'effort de sincérité par rapport au budget précédent. Ainsi, une partie de l'augmentation des crédits prévue en 2019 vise à sincériser les comptes.
Le ministère, réalisant que les enseignants sont mal payés en début de carrière et voulant encourager les enseignants à prendre en charge les classes difficiles augmente de manière significative l'indemnité versée en REP+.
Néanmoins, d'une manière générale, - il y a là une ambiguïté -, la hiérarchisation des revenus liée à l'ancienneté et le poids du secondaire au sein de l'éducation nationale sont tels que l'effort, pour spectaculaire qu'il soit, bénéficie plus aux enseignants en fin de carrière. Ainsi, dans le cadre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), le surplus touché par un professeur certifié s'élèvera à 10 000 euros s'il est en fin de carrière et à 1 000 euros s'il est débutant.
Par ailleurs, le fait de recruter moins permettra, on l'espère, de maintenir le niveau au concours. En outre, les étudiants pourront être associés dès la deuxième année de licence à l'enseignement, avec une indemnisation, ce qui les familiarisera avec leur futur métier. Ces mesures, qui favorisent le recrutement et les vocations, sont peu coûteuses, en raison précisément de cette hiérarchie fondée sur l'ancienneté.
Cette politique n'est malheureusement pas assez stimulante pour casser ce préjugé qui nuit à la qualité du recrutement dans certaines matières - mathématiques, anglais, français.
Le budget prévoit aussi un léger effort de productivité pour l'administration non enseignante, mais il est marginal.
Un motif de satisfaction pour nous réside dans la fin du logiciel Sirhen, équivalent pour l'éducation nationale du système Louvois au ministère des armées ; cela correspond à une demande du Sénat. Toutefois, cela ne règle pas le problème au fond, car il faut tout de même un système de gestion des ressources humaines.
Je conclurai sur une note plus personnelle. Nous avons la chance d'avoir un ministre qui connaît son ministère ; cela lui permet de l'administrer, sans annoncer de réformes mais en les faisant. C'est un progrès. En revanche, j'émets le voeu qu'il s'intéresse plus à ses partenaires, à commencer par les collectivités territoriales. En effet, le ministère est une structure organisée et hiérarchisée qui ignore ses partenaires.
Ainsi, le dédoublement des classes de primaire et la généralisation de la scolarisation à trois ans représentent des classes supplémentaires. Pourtant, les collectivités territoriales ne sont souvent mobilisées que pour payer les factures. Autre exemple, les collectivités pourraient être davantage impliquées dans la vie des établissements plutôt que de se limiter à être le témoin de conflits, au sein des établissements, entre les syndicats d'enseignants, la direction et les parents d'élèves, qui se terminent généralement en une demande de subvention... Le ministre dirige son administration, c'est bien, mais l'éducation nationale, c'est aussi ses milliers d'établissements et sa diversité d'acteurs.
Deuxième partenaire auquel Jean-Michel Blanquer pense insuffisamment : les employeurs et les régions, en partie dépossédées de la formation au profit des branches professionnelles, qui ne connaissent pas la réalité des territoires et des parents. Dans le cadre de la revalorisation de l'enseignement professionnel, il faut remettre autour de la table, avec l'éducation nationale, les élus locaux, les employeurs mais aussi les intercommunalités.
Enfin, je veux évoquer un aspect un peu particulier que l'on commence à observer en milieu urbain. En 1959, les relations entre public et privé ont été réglées au travers d'une sorte de conférence de Yalta, mais, alors que les parents changent, les ratios demeurent. Il faudra en reparler un jour ou l'autre. En particulier, des écoles hors contrat émergent dans les très grandes villes, soit pour raisons de choix pédagogiques soit pour des raisons idéologiques et communautaires. Le ministre fait bien fonctionner son administration mais il est ministre de la France entière, non seulement de son administration. Nous devons interpeller le ministre au sujet de cet isolement face à ces partenaires.
Le tort du Sénat est souvent d'avoir raison trop tôt, mais, pour une fois, notre message a été entendu par le ministre. La France favorise trop l'enseignement secondaire au détriment du primaire. Les options proposées dans le secondaire ne sont pas forcément toutes nécessaires, et elles sont très coûteuses. Il faut mettre l'accent sur le primaire.
Le rapporteur spécial appelle notre attention sur les moyens considérables de Sirhen. Il fallait effectivement avoir le courage de trancher, mais le coût de ce logiciel et de son remplacement s'élève tout de même à 500 millions d'euros. Les ministères doivent en tirer les leçons et cesser de développer leurs propres logiciels de paie.
J'ai deux questions pour Gérard Longuet. Y a-t-il des postes non pourvus ou des concours qui ne donnent pas les résultats escomptés ? Le resserrement des postes devrait améliorer la qualité du recrutement, mais quel est l'état des effectifs réels par rapport aux effectifs prévus ?
Par ailleurs, y a-t-il des moyens consacrés au développement de l'internat, qui permet de traiter le décrochage scolaire ? Le ministre veut relancer cette pratique ; c'est une excellente initiative, car c'est un bon moyen de lutter contre les inégalités scolaires, de même que les devoirs faits au collège. Est-ce encore à l'état de projet, ou y a-t-il déjà, dans le projet de loi de finances pour 2019, des moyens consacrés à cela ?
Je suis d'accord avec les analyses du rapporteur spécial et je recommande, comme lui, d'adopter le budget de cette mission.
Notre rapporteur général évoquait la constance. Chaque année, je m'étonne que l'on parle du budget de l'éducation nationale sans disposer de chiffres sur le nombre de classes et le nombre d'enseignants qui ne sont pas devant des élèves.
Notre rapporteur se réjouit d'une légère diminution de postes d'enseignants, soit 1 850 ETP en moins, mais le tableau d'emploi montre une augmentation de 5 813 emplois, les contrats aidés étant en effet transformés en postes. Au final, les effectifs dans l'éducation nationale augmentent bel et bien.
Les résultats scolaires se sont-ils améliorés du fait de l'augmentation de 48 000 postes sous le précédent quinquennat ?
Le tableau d'emploi du ministère fait état de 28 000 postes de soutien à la politique du ministère de l'éducation nationale. Que font ces personnes ?
Les contractuels de l'éducation nationale sont de plus en plus nombreux dans les zones défavorisées. Or, ces enseignants ne sont pas nécessairement bien formés. Dispose-t-on de chiffres précis ?
Depuis une vingtaine d'années, il est question de modifier les horaires des certifiés et des agrégés. Il y a trois ans, le ministère voulait instaurer 20 heures de travail hebdomadaire. Cette réforme aurait permis de réduire le nombre de recrutements, de rehausser le niveau des concours et de fluidifier la gestion des horaires des établissements. J'ai le sentiment que cette piste a été abandonnée par le Gouvernement : est-ce le cas ?
La contraction de l'offre des enseignements dans le secondaire va-t-elle affecter l'apprentissage du latin et du grec ?
Le nombre de postes d'auxiliaires de vie scolaire (AVS) augmente-t-il dans ce budget ?
Depuis plusieurs années, nous connaissons une crise du recrutement aussi bien dans l'académie de Créteil que dans celle de Versailles. Les conditions d'exercice et les rémunérations expliquent sans doute cette désaffection. Sur 150 000 étudiants qui s'inscrivent aux concours, seul un tiers se présente aux épreuves et des postes ne sont pas pourvus afin de ne pas brader les recrutements. Pour combler ces manques, des contractuels, qui n'ont pas forcément les qualifications requises, sont embauchés. Qu'entend faire le ministère pour inverser la tendance ?
En 2018, 400 postes mis au concours du CAPES n'ont pas été pourvus, principalement en mathématiques, en lettres et en langues vivantes. Cet état de fait favorise la diminution des effectifs que j'évoquais tout à l'heure. Les métiers de l'enseignement sont en compétition avec d'autres métiers de services. Ainsi, les formations au numérique reposent en grande partie sur les mathématiques. Or, il faut une grande force de conviction pour préférer gagner moins dans une classe indisciplinée que de gagner plus dans l'ambiance décontractée d'une « start-up », même si les risques de licenciements ne sont ensuite pas minces... Le métier d'enseignant a donc besoin d'être soutenu, tant sur le plan matériel que psychologique : les enseignants ont trop souvent le sentiment d'être seuls. C'est un beau métier mais la matière est difficile et l'environnement incertain, surtout du fait que la hiérarchie tente de s'affranchir de ses responsabilités en demandant aux enseignants d'étouffer les incidents. Sans travail et sans discipline, pas de résultats.
Le primaire compte 3 000 contractuels et le secondaire 30 000. À une époque, la contractualisation permettait d'espérer une titularisation. Aujourd'hui, tel n'est plus le cas : ces emplois sont occasionnels. L'existence de contractuels est l'expression de la crise de cette profession.
La création de 46 000 postes d'enseignants entre 2012 et 2017 n'a pas fait l'objet d'une évaluation scientifique. Le pourcentage des élèves rencontrant des difficultés reste au même niveau : entre 15 % et 20 %. Il est néanmoins difficile de se prononcer, car les effets de ces recrutements ne pourront être mesurés que dans la durée.
Lors de la précédente législature, la politique « plus de maîtres que de classes » était menée. Le ministre a fait un choix différent en scindant les classes en deux : mathématiquement, le résultat est identique, mais le résultat semble bien meilleur car chaque enseignant est responsable de sa classe. Nous allons demander l'évaluation des mesures menées. Même s'il coûte cher, le dédoublement des classes semble donner des résultats ; il en va de même pour la politique des devoirs faits qui mobilise des enseignants mais aussi des volontaires. Enfin, les stages de réussite reposent sur la mobilisation des familles et le sens de la responsabilité des élèves.
Le ministre a évoqué l'internat mais le budget ne comporte aucune mesure concrète, alors que des internats pourraient sauver des établissements. Les internats de la réussite ont bénéficié de crédits des Programmes d'investissements d'avenir (PIA). Je ne vois rien dans le budget qui permette d'améliorer le sort des 210 000 places d'internat et qui sont occupées à 80 %. Les deux adversaires de l'internat sont la multiplication des établissements sur le territoire, ce qui renforce la proximité mais nuit aux internats, mais aussi l'évolution du milieu familial qui se veut plus protecteur des enfants.
L'augmentation de 5 813 postes qui figure dans le budget de l'éducation nationale n'en est pas une : il s'agit de l'extension en année pleine des recrutements intervenus en 2018 et de la transformation de contrats aidés en accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH).
La scolarisation des enfants handicapés fonctionne assez bien. Les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont augmenté de 300 % les prescriptions d'accompagnement au bénéfice d'enfants handicapés qui sont de plus en plus nombreux : il s'agit d'enfants qui souffrent souvent de problèmes psychologiques, plus que de handicaps physiques. Les MDPH font porter à l'éducation nationale des problèmes qui ne ressortent pas, à proprement parler, de l'éducation. La définition du handicap mériterait peut-être d'être revue.
Le Comité CAP 2022 a proposé la création d'un nouveau statut pour les enseignants du secondaire. Depuis, plus rien. Les agrégés assurent 15 heures hebdomadaires tandis que les autres doivent dispenser, en fonction des catégories auxquelles ils appartiennent, 18 ou 21 heures de cours. Nous poserons la question au ministre en séance publique. Dans un rapport que j'ai commis, je proposais d'augmenter les obligations de service à 20 heures hebdomadaires pour les certifiés, les contractuels et les agrégés, hors classes préparatoires aux grandes écoles.
Les langues anciennes ne sont pas menacées. En revanche, sont visées les multiples activités professionnelles enseignées à l'école et la diversité des options. Il ne semble en effet pas indispensable de consacrer autant de moyens à des langues peu pratiquées qui, pour certaines, relèvent de la volonté individuelle ou de la vie communautaire. Le ministère va vers l'offre qu'il juge la plus utile.
Ce budget s'élève à 72,8 milliards et dispose de moyens humains considérables. Quid du partenariat avec les collectivités locales ? Quid des transports scolaires ? Pourriez-vous faire le point sur la médecine scolaire qui semble sous-dotée ?
Je déplore que les jeunes soient assez peu sensibilisés au devoir de mémoire, même si les situations sont très diverses d'une académie à l'autre, d'un établissement à l'autre.
Enfin, je regrette que les liens entre l'éducation nationale et les entreprises soient si ténus.
Je serai assez nuancé sur ce projet de budget. Certes, le dédoublement des classes semble une bonne chose mais y a-t-il, comme le craint l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), un glissement des moyens affectés aux territoires ruraux vers les territoires urbains ? J'approuve également les efforts faits pour améliorer la rémunération des enseignants et pour augmenter le nombre d'AESH.
Pourtant, au regard des besoins révélés par l'enquête PISA, les moyens ne semblent pas à la hauteur des enjeux et augmentent dans de moindres proportions que lors du précédent quinquennat.
Je regrette la diminution sensible du nombre de postes d'enseignants dans le secondaire alors qu'il y aura 26 000 jeunes de plus en 2018-2019 et 40 000 en 2019-2020.
Comment seront financées les heures supplémentaires censées améliorer le pouvoir d'achat des enseignants ?
Les collectivités locales doivent supporter le coût du dédoublement des classes et de l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire. Certes, l'État compense grâce à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), mais toutes les communes ne sont pas éligibles.
Les territoires ruraux souffrent de postes non pourvus aussi bien dans le primaire que le secondaire.
Je m'abstiendrai donc sur ce budget.
Je regrette l'absence de travail partenarial entre l'éducation nationale et les collectivités territoriales. Aujourd'hui, le ministère décide et les collectivités obtempèrent. La dépense publique doit être réduite et la DETR redéployée. L'école doit être le premier maillon pour l'égalité des chances. Les expérimentations positives devraient être mieux connues.
Heureusement, le programme prévisionnel d'accroissement du nombre d'enseignants du précédent quinquennat n'a pas été mené à son terme : il eut été plus difficile de réadapter les effectifs.
Les taux d'insertion professionnelle sont particulièrement élevés dans l'enseignement agricole. Merci à notre rapporteur de l'avoir rappelé car cette filière a besoin de considération.
La baisse de la natalité va-t-elle compenser l'obligation d'instruction dès 3 ans ?
L'enseignement privé bénéficie de crédits budgétaires relativement moindres que dans le public. Or, l'évolution du taux de scolarisation dans le privé ne semble pas justifier une telle différence de traitement.
Dans votre rapport, il apparaît que les effectifs dans le premier degré vont chuter de 200 000 élèves.
Certes, mais il va falloir accompagner cette évolution qui concerne potentiellement 8 000 enseignants. En outre, nous allons devoir affronter des fermetures de classes et même d'écoles.
Hier, en conseil des ministres, a été reporté le plan pour la sécurité à l'école, pourtant urgent. Les auditions que vous avez menées ont-elles montré que ce sujet était prioritaire ? Quels sont les crédits qui lui sont consacrés ?
S'agissant des conseils d'administration des établissements publics locaux d'enseignement, vous avez indiqué, à juste titre, que les partenaires regardaient passer les obus. Ne devrait-on pas revoir ces conseils d'administration, voire ces établissements publics, pour une meilleure efficacité, y compris budgétaire ?
Vous avez rapidement abordé la question de la détresse des enseignants confrontés aux problèmes de sécurité et d'incivilité, et de déliquescence de l'autorité. Des moyens complémentaires sont-ils prévus dans le projet de loi de finances pour assurer la sécurité des enseignants face à des classes toujours plus difficiles ?
Votre rapport évoque le succès de l'enseignement technique agricole, dont les crédits augmentent moins vite que ceux des autres types d'enseignement, alors qu'il est en profonde mutation. Les sommes qui lui sont allouées sont-elles suffisantes ?
Je ne partage pas l'ensemble de vos analyses, Monsieur le rapporteur spécial.
La situation était délicate dans les écoles primaires l'année dernière, car il était difficile d'appréhender les conséquences du dédoublement des classes de CP et CE1 en REP et REP+ sur les effectifs des autres classes de ces écoles, voire d'autres écoles, quelquefois situées dans des zones de grande mixité. Des écoles maternelles ont pu ainsi être confrontées à des fermetures de classes, voire d'écoles en milieu rural, ou à l'absence d'ouverture de classes.
Un suivi de ces mesures de dédoublement serait nécessaire pour s'assurer qu'elles n'ont pas servi à « déshabiller Pierre pour habiller Paul ». La dégradation de la situation dans certaines écoles périphériques crée un sentiment d'injustice et peut altérer la qualité de l'enseignement en école maternelle.
Les difficultés à pourvoir un certain nombre de postes ont des conséquences importantes sur la qualité de l'enseignement. Je l'ai constaté en milieu rural : on fait appel à des personnes parfois mal préparées, recrutées au pied levé. Il faudrait mesurer, par territoire ou secteur et sur plusieurs années, l'évolution des recrutements sur des postes qui ne peuvent être pourvus par des enseignants titulaires.
Le dédoublement des classes en REP en REP+ est une excellente mesure. Peut-elle être étendue aux zones de revitalisation rurale (ZRR) ? Les classes REP et REP+ sont plutôt situées dans les zones urbaines ; les zones rurales sont, une fois de plus, abandonnées.
Le seuil de fermeture des classes en ZRR pourrait-il être fixé à douze élèves ?
Les questions soulevées sont toutes intéressantes, et vous trouverez de nombreuses réponses dans mon rapport.
Marc Laménie et Jean-François Husson ont évoqué le partenariat avec les collectivités locales. Nous avons besoin de reconstruire cette responsabilité. En tant qu'ancien élu local, je mesure combien l'éducation nationale ne fonctionne bien qu'avec une connaissance réelle des terrains, lesquels sont différents.
On voit bien la diversité dans la mise en oeuvre des politiques publiques sur le territoire national, ce qui agace les parlementaires. Ceux-ci sont confrontés soit à des formules générales dont ils ne mesurent pas nécessairement les effets sur le terrain soit à des problèmes de terrain qui n'intéressent pas l'administration centrale.
Le ministre dirige le ministère, mais ce dernier doit bien être le ministère de l'éducation « nationale », une politique déclinée sur l'ensemble du territoire, dans toute sa diversité, avec l'ensemble des partenaires.
Prenons l'exemple du programme « devoirs faits » au collège : cela signifie qu'il faut mettre en place de nouvelles tournées de ramassage scolaire, ce qui a un coût. Ce dispositif est optionnel : ne devrait-on pas l'imposer à tous les parents pour ne pas avoir à organiser plusieurs ramassages ?
La médecine scolaire a longtemps détenu le monopole de l'accès à la médecine. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Néanmoins, elle doit rester la voiture-balai pour les élèves qui échappent à tout médecin.
Le lien avec la citoyenneté a été évoqué. L'éducation n'est pas envisageable sans des valeurs partagées : le respect de l'autre, celui des adultes, des élèves entre eux et des enseignants par les parents d'élèves. Cette valeur est au coeur de la réussite scolaire. Les établissements scolaires les plus performants sont ceux dans lesquels le chef d'établissement fait respecter une certaine discipline, ce qui est plus facile dans l'enseignement privé où il dispose du choix des élèves et des enseignants.
Pour susciter des vocations, les établissements scolaires doivent être plus forts et travailler avec davantage de partenaires. Pour avoir présidé pendant douze ans le conseil d'un lycée agricole, je peux vous assurer que l'état d'esprit y est tout à fait différent : le président préside et dispose de moyens, car il est un élu régional, et le directeur dirige. Les professionnels sont au conseil d'administration, ce qui change tout : leur parole a un grand poids auprès des parents d'élèves.
Patrice Joly souhaite savoir qui paye le dédoublement des classes primaires. Cette question, que nous posons tous dans nos départements, reçoit des réponses embarrassées des directeurs académiques des services de l'éducation nationale (Dasen) et des recteurs. On a manifestement gratté ce qu'on pouvait là où on le pouvait... Nous n'avons pas de réponses détaillées par département.
Fabienne Keller a évoqué la démographie : l'éducation nationale connaît parfaitement les tendances lourdes. Mais la répartition géographique est mal connue. Par ailleurs, les parents sont libres de choisir entre centre-ville et périphérie. Nous souhaitons tous sauver les centres-villes, mais les habitants ne veulent pas y vivre, ce qui a des conséquences sur les établissements scolaires... Par ailleurs, le choix de l'école reste assez libre dans notre pays, entre établissement public et privé et même au sein du public. Nous devons affiner au niveau régional des statistiques nationales que nous maîtrisons bien. En banlieue parisienne, on assiste à des phénomènes d'éviction : certains collèges sont abandonnés, et il sera impossible d'obliger les familles à y inscrire leurs enfants. La démographie doit se marier avec l'idée qu'ont les élus locaux du développement de leurs quartiers.
Patrice Joly a également soulevé la question des relations entre le préfet, les élus locaux et la demande scolaire. Les élus disent qu'ils ne sont au courant de rien, les Dasen ne savent pas grand-chose et les préfets encore moins... Le fléchage des crédits d'État pour aider les collectivités locales ne fonctionne pas.
Jean-François Husson a avancé une idée de bon sens : il faut comparer les expériences et retenir ce qui marche le mieux. Pour cela, il faut disposer de chiffres régionalisés. Or la région connaît les lycées, mais ignore les collèges et les écoles primaires. C'est pourtant un tout !
Je comprends que Jean Pierre Vogel se plaigne que la revitalisation rurale ne fonctionne pas. Ce qui peut poser problème en zone rurale, c'est le manque d'ambition des élèves, pourtant travailleurs et sérieux. Le monde rural est souvent hélas coupé de l'avenir : les élèves ne se projettent pas dans vingt ou trente ans. Ces jeunes ne sont pas soutenus par leurs familles, qui craignent qu'ils ne partent et ne reviennent jamais.
L'enseignement agricole est une réussite, comme l'a souligné Michel Canévet, car il a cessé d'être exclusivement agricole. C'est un enseignement rural, qui forme les jeunes aux métiers de la ruralité, de l'agroalimentaire et aux métiers de bouche. Sa force est de reposer sur le volontariat des élèves et des enseignants.
Jérôme Bascher a évoqué le plan pour la sécurité à l'école. Seuls les élus locaux, qui font du quadrillage de quartier, peuvent donner des informations opérationnelles aux enseignants et à leurs dirigeants. Le problème essentiel de la sécurité est la mobilisation des adultes : chacun doit être en partie responsable du « fardeau ».
Le fort recours aux contractuels, évoqué par Bernard Delcros, touche particulièrement les académies de Versailles et de Créteil.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Mon rapport porte sur deux sujets. Le premier concerne la presse et le livre. Les crédits, qui s'élèvent à 581 millions d'euros, ont peu évolué, à l'exception de la budgétisation des ressources du Centre national du livre.
Un secteur pose peu de problèmes : celui des aides à la presse. Leur montant est en baisse de 5 millions d'euros, en raison d'une diminution des frais postaux des journaux. La presse écrite se vend et se livre moins, alors que la presse électronique se développe.
L'extension du taux réduit de TVA de 2,1 % à la presse en ligne décidée par la France en 2014 a enfin été validée au niveau communautaire.
L'Agence France-Presse (AFP) pose, en revanche, davantage de difficultés. Ses crédits augmentent de 2 millions d'euros pour 2019, passant de 131 à 133 millions d'euros. Le président-directeur général de l'AFP procède, en interne, à des réorganisations, qui devraient aboutir à la suppression de 125 ETP. L'AFP investit dans les services vidéo, seul élément commercial qui lui garantisse une croissance de ses ressources suffisamment importante.
L'État ne veut pas prendre en charge la dette de l'AFP, qui est toujours élevée. L'AFP doit faire face à des contentieux fiscaux et sociaux dans un certain nombre de pays où elle est installée et craint que le règlement de la question dans un pays n'entraîne des demandes dans d'autres... Ces contentieux constituent une épée de Damoclès. Néanmoins, je rappelle que l'AFP est la seule grande agence de presse européenne, à côté des agences américaines, russe ou chinoise.
Les crédits du programme « Livre et industries culturelles » sont relativement importants et la situation est assez satisfaisante. Le plan « Bibliothèque » se porte plutôt bien, même s'il reste quelques problèmes à régler, qui sont notamment liés aux horaires d'ouverture.
Le programme est essentiellement dédié au financement de la Bibliothèque nationale de France (BnF). La première phase des travaux du quadrilatère Richelieu a donné lieu à des dépassements financiers - on a parlé de gouffre financier. La deuxième phase se passe mieux. D'ici à deux ans, le chantier devrait être livré. La BnF met de côté des moyens pour gérer cet ensemble et s'occupe de la numérisation des collections.
Sur ce premier bloc, seule la dette de l'AFP pose donc problème. Mais le PDG de l'agence semble confiant.
Quant au cinéma, qui est financé par des taxes affectées, et non par des crédits budgétaires, il se porte bien. Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) ne se plaint pas.
Il reçoit des taxes affectées et des crédits d'impôt, mais avance que sa situation favorisée permet à la création cinématographique de rester forte en France, alors qu'elle a énormément diminué dans d'autres pays européens. De nombreux tournages ont lieu chez nous, souvent soutenus par les régions, qui ont mis en place des systèmes d'aides.
Je vous propose donc de voter les crédits de ce premier bloc.
J'en viens à l'audiovisuel : je proposerai, là aussi, de voter les crédits, sous réserve de l'adoption d'un amendement. En réalité, il vaudrait mieux que nous n'ayons à connaître ni du budget ni de la gestion de l'audiovisuel public : on y trouve beaucoup d'argent, et on nous explique à l'envi qu'il n'est pas possible de faire autrement. Mais quand on regarde les choses en détail, c'est autre chose ! Quand je pense à la façon dont l'État explique la baisse des dotations aux collectivités locales ou comment il est demandé à certains secteurs de faire des économies...
Le Gouvernement prévoit une baisse de 0,8 à 1 % des crédits de l'audiovisuel public pour l'année prochaine, afin d'envisager une diminution de moins de 5 %, soit 190 millions d'euros, d'ici à 2022. Si on évoque des économies plus importantes, on nous accuse de vouloir couper des têtes...
Le programme d'économies est prévu jusqu'en 2022, mais personne ne connaît le périmètre et les missions du service public audiovisuel qui seront définis dans le projet de loi sur l'audiovisuel public qui doit être présenté ! Il faut aussi réformer la gestion et la gouvernance. Alors que nous ne disposons d'aucun élément, on doit déjà fixer la trajectoire budgétaire jusqu'en 2022. La logique voudrait que l'on définisse le périmètre et les missions de l'audiovisuel public avant de décider des moyens financiers qui lui seront alloués.
France Télévisions, le navire amiral, doit fournir l'effort le plus important, avec une baisse de ses crédits de l'ordre de 160 millions d'ici à 2022, dont 26 millions d'euros en 2019.
Ces 26 millions d'euros d'économies pèsent peu, comparés aux 2,5 milliards d'euros que France Télévisions reçoit en aides publiques, sans parler de ses ressources publicitaires. On lui demande donc un très faible effort financier.
J'ai peu d'atomes crochus avec la ligne éditoriale d'Arte, mais je reconnais que cette chaîne a une notion du service public. Quant à la neutralité des débats et des journaux, il existe un comité d'éthique à France Télévisions, mais les responsables du groupe eux-mêmes expliquent qu'il ne sert à rien.
La vraie question est autre : qu'est-ce que le service public ? Arte ou France 5 offrent des débats, des documentaires et des reportages qui incarnent, qu'ils nous plaisent ou non, le service public. Ils font réfléchir et ont une qualité culturelle et éducative indéniable. France 3, notamment du fait de ses décrochages régionaux, remplit également une mission de service public de proximité territoriale. Certaines de ses émissions nationales sont aussi d'une qualité suffisante pour le service public. En revanche, le navire amiral de France Télévisions, France 2, pose une vraie difficulté : cette chaîne cherche à concurrencer TF1 pour l'audimat, tout en captant l'essentiel des aides publiques. Or, pour battre TF1 certains soirs, ils dépensent une part considérable de ces crédits dans l'achat de films américains grand public. Est-ce cela, le service public ?
Celui-ci devrait être libéré de la pression de l'audimat. Certes, on ne veut pas trop le spécialiser ou le rendre élitiste. Mais là n'est pas le sujet ! Il y a pléthore de chaînes publiques : même si France 4 doit cesser sa diffusion générale, il reste toutes les stations d'outre-mer et les stations régionales de France 3, auxquelles on a ajouté en 2016 la chaîne de télévision France info, dont l'audience est extrêmement faible. Quant au coût réel de cette chaîne info, il est obscur puisqu'on nous explique que presque tous ses reportages sont issus des autres chaînes publiques. Au total, hors publicité, l'audiovisuel public requiert 4 milliards d'euros. Les gens peuvent légitimement se demander s'il remplit, pour cette somme, une mission de service public. Est-ce le cas pour certains jeux, pour certaines séries achetées à prix d'or ? On voit les mêmes médecins, les mêmes policiers américains sur TF1 et sur France 2 ! Est-ce cela, le service public ?
Quand nous demandons au Gouvernement de redéfinir les missions de l'audiovisuel public avant de demander des crédits, il acquiesce, mais ne le fait pas. Certes, c'est compliqué, parce que les maisons mères ne veulent pas se remettre en cause. Elles font le job, mais la question de la gouvernance reste ouverte. On attend toujours de savoir s'il y aura une vraie réforme, si l'ensemble de l'audiovisuel public sera chapeauté par une holding, comme le Gouvernement l'avait initialement prévu. Comme le dépôt du projet de loi relatif à ce sujet a été reporté, on ne sait toujours pas comment l'audiovisuel va être traité.
Je vous présente un amendement visant à redonner un peu plus d'argent à Arte et France Médias Monde, parce que ces deux sociétés ont un vrai rôle de service public. Toute baisse des crédits que nous allouons à Arte est en outre répercutée par nos partenaires allemands. Le projet européen d'Arte, qui veut offrir ses programmes en six langues dans l'Europe entière, a du sens ! Ce n'est donc pas le moment de baisser ses crédits.
Par ailleurs, Arte et France Médias Monde ont fait depuis cinq ans des efforts de gestion ; leurs coûts de fonctionnement ont été réduits de presque 25 %. Il serait anormal de leur faire subir des réductions de crédits similaires à celles qui affectent les autres acteurs. France Médias Monde joue un rôle essentiel pour la voix de la France dans le monde. On voudrait faire taire cette voix dans bien des parties du monde parce qu'on leur fait des critiques pour trois francs six sous, tout en demandant des économies beaucoup plus réduites aux navires amiraux qui croulent sous les moyens !
Je veux en conclusion dire deux mots sur les coûts de production. Les chaînes ne se battent pas pour nous les exposer. Certes, l'appel à des producteurs extérieurs coûte moins cher que les productions internes, mais le personnel de France Télévisions préfère produire en interne, parce que cela légitime leur présence. Un élément explique largement les coûts plus élevés des productions internes : l'absence de polyvalence des métiers.
Par ailleurs, nous ne comprenons pas pourquoi, dans l'audiovisuel public, on ne plafonne pas le nombre de programmes que peut produire un même producteur. Certains produisent beaucoup d'émissions et trustent ainsi la plupart des crédits, alors que les producteurs indépendants peinent à obtenir des contrats.
Je partage pleinement les propos de Roger Karoutchi. Comme pour bien d'autres missions, après qu'on nous a annoncé le grand soir, ce projet de loi de finances ne se montre pas du tout à la hauteur des enjeux.
Je veux prendre une illustration concrète du problème exposé par M. Karoutchi : les programmes de TF1 et France 2 pour dimanche prochain. TF1 diffusera deux films d'action américains et France 2 deux James Bond. Les deux premiers sont payés intégralement par la publicité, les deux autres par la redevance. Mme Ernotte, que j'ai interrogée à ce sujet, m'a expliqué avoir surenchéri face à TF1 pour obtenir le droit de diffuser ce genre de films et ainsi pouvoir, ces soirs-là, battre TF1 en audience. Je doute même que cela réussisse ! Au-delà, contrairement à TF1, France 2 n'est pas un marchand de publicité, raison essentielle de courir à l'audimat : je ne vois donc pas l'intérêt de s'inscrire dans cette démarche.
C'est pourquoi je soutiens l'amendement de Roger Karoutchi. Arte aborde des sujets qu'on ne verra jamais sur une chaîne commerciale ; cette chaîne, ou encore France 3, offre des émissions et des débats qui remplissent une vraie mission de service public. Certes, c'est assez symbolique, mais cela appelle un vrai débat.
L'audiovisuel public ne doit pas pour autant se restreindre à des sujets rébarbatifs. L'exemple pour nous est la BBC, qui produit énormément d'émissions et de fictions d'extrême qualité, qui connaissent d'ailleurs un succès commercial. Je regrette que notre vaisseau amiral essaie de singer son concurrent principal dans une course à l'audience perdue d'avance, et ce avec l'argent du contribuable. La vocation de nos prélèvements obligatoires est autre !
Mon intervention porte sur la redevance audiovisuelle. On a pu lire que le rapport du groupe de travail de l'Assemblée nationale, rédigé par Mme Aurore Bergé, préconise que l'ensemble des propriétaires de dispositifs permettant la diffusion de la télévision s'acquitte de la redevance. Ne devrait-on pas plutôt, dès lors, parler d'un nouvel impôt ? Tous les propriétaires de téléviseurs ne regardent pas les chaînes du service public ; beaucoup d'entre eux utilisent leur appareil pour profiter d'un abonnement sur une plateforme payante.
En outre, du fait de la suppression prochaine de la taxe d'habitation pour 80 % des contribuables, la redevance deviendra une ligne unique collectée par les services des finances publiques. Je m'interroge donc sur le coût futur de sa collecte.
Concernant le secteur du livre, à la suite du rapport Orsenna, le Président de la République avait souhaité une plus large ouverture des bibliothèques municipales. A-t-on une idée des crédits nécessaires pour compenser les nouvelles charges que cela induirait pour les communes ? Le Gouvernement avait évoqué 2 millions d'euros supplémentaires ; cela a-t-il été réalisé ?
Concernant les médias, certaines chaînes ne seraient plus diffusées que sur internet. C'est une nouvelle inquiétante pour les zones blanches qui subsistent.
Les restrictions publicitaires dans les médias publics sont-elles toujours justifiées ?
Je voudrais ouvrir le dossier de Radio France. Je n'entretiens pas de fantasmes particuliers sur la neutralité de l'information, mais j'aimerais également entendre des opinions plus proches de ma sensibilité. Avez-vous des éléments d'information sur un comité d'éthique comparable à celui qui existe à France Télévisions ? Si un tel comité existe, mais est aussi peu efficace, existe-t-il des évaluations différentes, qui nous permettraient de nous faire une opinion sur ce sujet ?
Arte, chaîne initialement franco-allemande, a son siège à Strasbourg. Je soutiens de tout coeur la proposition du rapporteur spécial, qui a parfaitement souligné le paradoxe en cause : alors qu'Arte a déjà fait d'énormes efforts, notamment en développant le replay avant d'autres, on enverrait un signal négatif à nos partenaires allemands en diminuant ses crédits ! Je suis favorable à cette slow TV, et je veux témoigner de l'importance de ce projet pour l'amitié franco-allemande : regarder les mêmes programmes, chacun dans sa langue, permet de créer une unité. Cette démarche s'ouvre désormais, grâce aux nouvelles technologies, à l'anglais, à l'espagnol et au polonais.
Les bibliothèques sont des lieux importants dans nos communes. Leur ouverture le dimanche est une idée géniale, mais très coûteuse. Les crédits mis en place vous semblent-ils suffisants pour l'assurer ?
Les collectivités territoriales sont en général gestionnaires de ces bibliothèques. A-t-on évoqué l'idée de permettre le recrutement de jeunes étudiants, dans le cadre de contrats spéciaux, comme cela se fait massivement dans le reste du monde, pour assurer leur ouverture le week-end ?
Je suivrai bien volontiers le rapporteur spécial sur son amendement. Le téléspectateur, où qu'il se trouve en France, dispose de plus de chaînes de télévision que de boulangeries, artisanales ou non ; pour autant, les boulangers ne bénéficient pas de 4 milliards d'euros par an sur le budget de l'État. Pour ma part, je n'avais pas voté la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, issue des travaux de la commission « Copé ». Elle gelait pour des décennies le périmètre de l'audiovisuel public et en contraignait le budget. Cette loi n'a-t-elle pas été très néfaste pour nos finances publiques comme pour notre paysage audiovisuel ? C'est une question de périmètre. Il y a beaucoup trop de chaînes financées par l'argent public. De combien faudrait-il réduire ce périmètre ?
Quel modèle devrait suivre France Télévisions ? La BBC pourrait-elle en constituer un ?
Nous voterons à ce stade l'amendement du rapporteur spécial, comme un appel dans l'attente de la réforme de l'audiovisuel public. Il faut que les lignes bougent ; on verra dans quelle mesure.
On a une approche assez particulière du support papier. Lorsqu'il est utilisé à des fins publicitaires ou administratives, on l'accuse de détruire des forêts, ce qui est complètement faux ; la forêt vit et se renouvelle. Quand il s'agit d'emballage ou de livre, en revanche, ce serait une utilisation noble. La stigmatisation systématique de ce support ne risque-t-elle pas de nuire à la partie considérée comme noble ? Elle risque d'avoir à terme des effets sur le support à caractère culturel.
L'automutilation financière que représente le contingentement de la publicité sur les chaînes publiques est-elle toujours pertinente ? Décidée pour des raisons prétendues éthiques, elle prive le secteur public de l'accès à certaines diffusions, notamment dans le domaine sportif.
Concernant le programme 334, je veux évoquer les fondamentaux : la lecture publique et l'écriture. Le quadrilatère Richelieu de la Bibliothèque nationale de France connaît un gros programme de travaux, pour lesquels 233 millions d'euros sont engagés. Quelles en seront les retombées du point de vue de l'ouverture de cette institution et de la diffusion des connaissances ? Qui peut accéder à la BnF ? Je m'interroge aussi sur l'impact des actions du Centre national du livre. Dans nos territoires, beaucoup de collectivités locales se sont engagées pour leurs bibliothèques et leurs médiathèques. Le rôle de l'Éducation nationale est également important.
Sans remonter jusqu'à Mathusalem, et sans nostalgie - Paul Eluard le disait bien : « le passé est un oeuf cassé, l'avenir est un oeuf couvé » -, je me demande si l'on n'a pas ouvert la boîte de Pandore en privatisant TF1, en 1986. On nous avait promis le mieux-disant culturel ; on a eu la Cinq de Berlusconi. N'a-t-on pas entraîné dans cette logique mercantile le service public, qui dépense beaucoup d'argent à courir derrière les chaînes commerciales, comme l'a bien analysé Roger Karoutchi ? Plutôt que de s'attacher au « temps de cerveau disponible » évoqué voici quelques années par un professionnel de la télévision, le service public devrait s'occuper des cerveaux avec ambition et relever le niveau. C'est ce que fait la BBC, à qui l'on a pourtant parfois reproché son immobilisme.
Je soutiens l'amendement du rapporteur spécial. Il faut refuser systématiquement le rabot quand on veut faire de la gestion budgétaire. Cela est tout aussi vrai pour les collectivités territoriales, à qui l'on demande encore, quels qu'aient été leurs efforts antérieurs et leurs niveaux de fiscalité, de maîtriser leurs dépenses de fonctionnement.
Les aides à la presse baissent de 5 millions d'euros ; cela correspond à la baisse de la distribution de la presse et marque un certain fatalisme et une absence de volontarisme. Aucune attention particulière n'est accordée à Prestalis, qui connaît une situation très inquiétante ; la résolution de ces problèmes est renvoyée à plus tard.
Quant au programme 334, il est vrai que son budget est en hausse, mais il est largement englouti par la BnF. On ne comprend pas bien le fléchage des 30 millions d'euros supplémentaires destinés à ce programme. Le soutien à l'ouverture dominicale des bibliothèques municipales dépend, si je ne m'abuse, d'un autre programme.
L'audiovisuel public requiert certes beaucoup d'argent, mais ces crédits connaissent à nouveau une baisse conséquente. Réfléchir à la qualité et au périmètre du service public est important, mais il est délicat de l'aborder par le simple biais budgétaire. La diffusion internationale est importante, la qualité des programmes aussi ; je rejoins sur ce point Roger Karoutchi, et je ne nie pas non plus le manque manifeste de différenciation entre France 2 et TF1. Cela dit, plutôt qu'une approche budgétaire, il faudrait une redéfinition politique de ce service public. Nous nous abstiendrons sur les crédits de cette mission et nous approuverons l'amendement du rapporteur spécial.
Sur la redevance audiovisuelle, le nouveau ministre de la culture semble partager la position de Mme Bergé en faveur de son universalisation. Personnellement, j'y suis totalement opposé : cela revient à réclamer 150 à 200 millions d'euros supplémentaires, dans des conditions qui restent à définir, notamment en l'absence de taxe d'habitation. Nous ignorons quel coût aurait la collecte de cette redevance dans ces conditions. Qu'il s'agisse ou non d'un nouvel impôt, le signal n'est pas bon.
Je n'ai pas dit qu'il y avait trop d'argent dans le service public audiovisuel. En revanche, il est anormal de commencer par présenter une trajectoire budgétaire jusqu'en 2022, avant de définir les missions et l'organisation du secteur. N'importe où, on ferait l'inverse.
La BBC est-elle le modèle à suivre ? Elle est exemplaire en matière de gestion, d'innovation et refuse la facilité que procure la diffusion de films d'aventure à grand public ou de James Bond comme le font nos chaînes en France... D'ailleurs les séries télévisées diffusées sur les chaînes françaises proviennent souvent de la BBC, parce qu'elles sont de qualité.
Mon amendement vise à soutenir les chaines qui ont fait des efforts. Certaines, en effet, font honneur au service public en s'efforçant de stimuler la réflexion et de développer la culture, avec des reportages et des documentaires de qualité. Ce ne sont pas ces chaînes qui doivent être pénalisées.
La publicité sur les chaînes publiques est théoriquement interdite à partir de 20 heures. En réalité, la loi a été contournée, avec les pratiques de sponsoring ou de parrainage des films et des émissions. J'ai toujours été réservé sur la suppression de la publicité sur le service public. Je préfère que l'on redéfinisse le service public et ses missions, avant de préciser les sources de financement adéquates entre la redevance et la publicité. La crainte des effets d'éviction pour la publicité vis-à-vis des chaines privées ne tient pas. Dès lors que l'on parle du service public de l'audiovisuel, on doit faire fi des exigences de l'audimat. Cela a d'ailleurs des conséquences sur la publicité.
Rémi Féraud, les crédits supplémentaires en faveur du livre que vous évoquez correspondent en fait à la budgétisation des ressources du Centre national du livre, dont le budget s'élève à 25 millions d'euros. Un fléchage est donc inutile.
Nous avons pour le moment peu de retours sur l'activité du comité d'éthique de France Télévision, mis en place début 2017. Faut-il imaginer pour autant une instance de déontologie pour l'audiovisuel public ? Le CSA devrait jouer ce rôle. Mais il faut une loi. Pourquoi pas la prochaine loi sur l'audiovisuel public ?
Les bibliothèques bénéficieront de 8 millions supplémentaires au titre de la dotation générale de décentralisation et de 2 millions de subventions du ministère de la culture pour compenser le surcoût lié aux ouvertures supplémentaires. Presstalis n'est pas oublié car 9 millions d'euros lui sont consacrés, pris sur le fonds stratégique pour le développement de la presse.
Enfin, le chantier de Radio France n'est pas clairement financé en 2019 et le ministère reste flou à cet égard. Or il serait utile de savoir comment ce chantier, qui a déjà pris du retard, sera financé.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » sans modification.
J'en viens à la mise aux voix du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
L'amendement n° 1, proposé par le rapporteur spécial, est adopté.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », sous réserve de l'adoption de son amendement.
La mission « Immigration, asile et intégration » représente un budget d'environ 1,5 milliard d'euros. Les dépenses sont très concentrées sur la politique d'asile, à hauteur de 66 %, contre 15 % pour l'intégration, ou 8 % pour la lutte contre l'immigration irrégulière.
Les dépenses de l'État induites par l'immigration ne se limitent pas à cette mission. Le coût de la politique française de l'immigration et de l'intégration peut être estimé à 5,8 milliards d'euros en 2018 et 6,2 milliards d'euros en 2019, selon le document de politique transversale (DPT) « Politique française de l'immigration et de l'intégration » annexé au projet de loi de finances pour 2019, auquel contribuent neuf ministères, en plus du ministère de l'intérieur. Ce chiffre ne prend en réalité en compte que les dépenses directes et orientées à titre principal vers les étrangers. Or, l'immigration suscite également des dépenses de la part des organismes de sécurité sociale, ou des collectivités territoriales, comme pour l'accueil des mineurs étrangers isolés qui est à la charge des départements. M. Jean-Yves Le Drian nous a d'ailleurs expliqué que ceux-ci passaient de plus en plus par l'Espagne, en provenance du Maroc, ce qui montre que les filières d'immigration s'adaptent très rapidement aux possibilités de regroupement familial élargies par la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration contrôlée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie.
Les dépenses de la mission devraient continuer à croître à l'issue du premier semestre 2018, la demande d'asile continuant d'augmenter (+ 16,7 % par rapport au premier semestre de 2017), alors qu'elle baisse au niveau de l'Union européenne (- 29 % par rapport au premier semestre 2017). Par ailleurs, la France est également confrontée à une hausse importante (+ 63 % en 2016) des demandeurs d'asile sous procédure dite « Dublin », qui concerne les migrants qui, après avoir enregistré leur demande dans un premier pays européen, la réitèrent dans un autre État membre de l'Union européenne et qui ne sont pas comptabilisés dans les chiffres de la demande d'asile. Ce phénomène a un impact important sur les dépenses de la mission, puisque ces personnes sont éligibles à plusieurs dispositifs prévus par la mission, comme l'hébergement d'urgence ou l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) jusqu'à leur transfert effectif vers l'État membre responsable de l'examen de leur demande.
Dans le projet de loi de finances pour 2019, la mission voit ses crédits augmenter de 37,5 % en autorisations d'engagement (AE) et de 22,7 % en crédits de paiement (CP). Les deux programmes présentent des crédits en hausse. Le programme 303 « Immigration et asile » voit ses crédits augmenter de 35,1 % en AE et de 16,5 % en CP par rapport à 2018, tandis que le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » voit son budget augmenter de 46,8 % en AE et de 46,9 % en CP par rapport à 2018.
La mission fait toutefois l'objet d'une mesure d'élargissement de son périmètre. Les centres d'hébergement d'urgence pour migrants (CHUM) en Île-de-France, actuellement gérés par le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et intégration des personnes vulnérables » seront transférés en gestion sur le programme 303 « Immigration et asile ». Ce transfert représente 189,3 millions d'euros en AE et 19,1 millions d'euros en CP. À périmètre constant, les crédits de la mission augmentent de 14,11 % en CP.
Le financement de la lutte contre l'immigration irrégulière voit ses crédits augmenter fortement, de 86,7 % en AE et de 65,6 % en CP. Le contexte migratoire incertain requiert en effet une augmentation du nombre de places en centres de rétention administrative (CRA). Il est prévu de créer 1 000 places en 2019, soit une hausse de 35 % par rapport à la capacité immobilière disponible constatée fin 2017. La loi pour une immigration contrôlée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie prévoit en outre une augmentation de la durée légale de placement en rétention, qui est passée de 45 à 90 jours. Ceci induit un besoin de crédits complémentaires expliquant la progression des crédits demandés au titre du projet de loi de finances 2019. L'hypothèse moyenne retenue est une hausse de 15 jours de la durée de rétention pour un coût de 1,70 million d'euros.
En conséquence, les crédits prévus pour le fonctionnement hôtelier des centres de rétention administrative augmentent également, et s'élèveront à 35,6 millions d'euros en AE et 18 millions en CP. Ces dépenses concernent le fonctionnement courant des 27 centres de rétention administrative (CRA) et des 4 locaux de rétention administrative (LRA), ainsi que la zone d'attente des personnes en instance (ZAPI) de Roissy. Elles regroupent l'ensemble des prestations (restauration, blanchisserie, maintenance préventive et curative des locaux, sécurité incendie) et les autres contrats nécessaires au fonctionnement des structures, y compris l'entretien immobilier des lieux de rétention.
Les frais d'éloignement des migrants en situation irrégulière stagnent à un niveau proche de 30 millions d'euros depuis 4 ans. Le taux d'exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF) s'élève à 12,6 %, ce qui constitue un niveau historiquement bas. Cela est préoccupant.
La dotation de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) s'élève à 335,83 millions d'euros, en progression de 5,7 % par rapport à 2018. Cette hausse traduit, à nouveau, une volonté de mieux répondre à l'exigence de sincérité budgétaire, mais pourrait, cette année encore, se révéler insuffisante, faute d'une prévision d'évolution de la demande d'asile réaliste. Le Gouvernement fait en effet l'hypothèse d'une stabilité des demandes d'asile et d'une baisse du nombre de Dublinés. Or on constate l'inverse au premier semestre ! Je suis donc conduit à émettre de fortes réserves quant au caractère réaliste de cette prévision, qui pourrait à nouveau être dépassée. Ainsi, alors même qu'elle avait fait l'objet d'une augmentation de 45 % en loi de finances initiale pour 2018, par rapport à 2017, l'enveloppe prévue pour l'allocation pour demandeur d'asile devrait, en 2018, dépasser la prévision de plus de 96 millions d'euros, selon les informations transmises par le Gouvernement.
L'année 2018 est marquée par une augmentation des crédits dédiés à l'accueil des étrangers primo-arrivants, qui s'élèvent à 255,86 millions d'euros, en hausse de 34 % par rapport à 2017. Cette augmentation s'explique notamment par l'enrichissement bienvenu des prestations et obligations associées au contrat d'intégration républicaine (CIR), notamment avec le doublement du volume des formations linguistiques proposées ou l'instauration d'un entretien en fin de CIR. La création de cet entretien nécessite des moyens supplémentaires de 1,6 million d'euros en 2019 (40 ETP) pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). La prise en charge de la certification du niveau de langue prévue par le même alinéa représente un coût supplémentaire d'un million d'euros en 2019.
L'effort budgétaire en faveur des centres provisoires d'hébergement (CPA) se poursuit pour permettre la création de 2 000 places supplémentaires en 2019. L'action 15 du programme 104 porte essentiellement les crédits destinés au financement de l'hébergement des réfugiés, en particulier les centres provisoires d'hébergement, destinés à favoriser l'accompagnement des réfugiés présentant des vulnérabilités et nécessitant une prise en charge complète. Au total, la hausse en deux ans sera de 5 000 places supplémentaires, mais les besoins sont estimés à 30 000 places.
La commission des lois rendra son avis le 28 novembre. À ce stade je partage les mêmes constats que votre rapporteur spécial. Je partage votre inquiétude concernant l'asile : le Gouvernement fait l'hypothèse d'une stabilité du nombre des demandes d'asile, or celles-ci continuent d'augmenter, pour atteindre 120 000 demandes. Ma deuxième inquiétude concerne la capacité de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) à traiter les demandes en moins de deux mois. Le délai de réponse est actuellement de 100 jours. L'objectif ne sera sans doute accessible qu'à la fin de 2019, dans le meilleur des cas. Nous sommes aussi dubitatifs sur la capacité à tenir l'objectif, louable, d'héberger 90 % des demandeurs d'asile dans les Centres d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) et dans le dispositif d'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile (HUDA). Enfin, la faiblesse du taux d'exécution des obligations de quitter le territoire français est problématique. À cet égard, tant que l'on n'aura pas régler la question des laissez-passer consulaires, on n'avancera pas. Mais cela relève d'une négociation avec les pays d'origine.
L'appréciation est contrastée. Le budget de cette mission est traditionnellement sous-évalué. Cette année, la sous-évaluation est peut-être moindre, mais le budget sur l'asile n'est encore pas à la hauteur face à la hausse des demandes. Le taux d'exécution des OQTF baisse. Cette baisse est-elle due au refus des pays d'origine d'accueillir les ressortissants de leur pays, ou à d'autres causes ?
Ce budget est à l'image de la politique du Gouvernement qui a été matérialisée par la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration contrôlée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. Si l'on approuve cette politique, on approuvera ce budget ; sinon, on sera logiquement plus réservé, ce qui est le cas du groupe socialiste et républicain. Certains volets sont toutefois positifs, comme la volonté d'améliorer l'intégration, avec la mise en oeuvre de certaines mesures du rapport d'Aurélien Taché, comme l'augmentation des crédits destinés aux cours de langues. À l'inverse pourtant, l'accès au droit et les droits au recours sont restreints avec l'accélération du traitement des demandes d'asile, en application de la loi asile et immigration, contre laquelle nous nous étions élevés. Ce n'est pas ainsi que l'on réduira le problème, puisque le nombre de demandeurs d'asile augmente. Les besoins en termes d'hébergement sont aussi criants, mais l'État n'est pas au rendez-vous, comme le montrent les épisodes récents à Paris ou à Nantes. La hausse des places prévue n'est pas suffisante. Ainsi, en dépit d'éléments positifs, nous nous abstiendrons car nous ne partageons pas la philosophie du texte.
Je note la progression des engagements financiers. Est-il possible d'avoir une évaluation des moyens humains ? Ceux-ci sont difficilement chiffrables en raison du nombre d'acteurs concernés : État, opérateurs, préfectures, collectivités territoriales, ou encore associations.
Les deux rapporteurs ont relevé une forme de déni de l'État quant à la pression migratoire réelle, puisque le Gouvernement fait l'hypothèse d'une stabilisation du nombre de demandes d'asile alors que celles-ci continuent d'augmenter. Il en va de même de la croissance du nombre de mineurs étrangers non accompagnés. Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour aider les départements à mieux financer l'évaluation de la minorité et l'accueil des demandeurs reconnus mineurs ne sont pas à la hauteur des défis. Là aussi il y a une forme de déni de la situation et des difficultés des départements, tant financières que pratiques, pour accueillir 40 000 mineurs étrangers cette année, et plus de 50 000 l'année prochaine. Les départements subissent à cet égard les conséquences de la politique migratoire décidée par l'État.
Les moyens humains sont difficiles à apprécier faute de données consolidées. Les moyens humains de l'Ofii et de l'Ofpra augmentent, avec respectivement 1 179 ETP, et 805 ETP en plus. Beaucoup d'associations interviennent aussi dans le domaine. Nous avons pu estimer que le coût direct de la politique française d'immigration et d'intégration s'élevait à 6,2 milliards d'euros.
Le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian constatait l'augmentation du nombre de mineurs isolés passant par l'Espagne. Les filières s'adaptent en fonction de nos lois et procédures. En Allemagne le nombre de mineurs isolés est toutefois beaucoup plus important car il s'élève à plusieurs centaines de milliers.
La faiblesse du taux d'exécution des OQTF s'explique par le nombre d'appels et le détournement de nos procédures - comme ces aides au retour acceptées mais non suivies d'effet. Les conditions dans lesquelles se déroulent les éloignements compliquent leur exécution. Alors que les Allemands utilisent des avions militaires, nous avons recours à des vols commerciaux : il suffit que la personne chahute un peu pour ne pas partir. Et la PAF ne dispose que d'un Beechcraft de 19 places, qui peut à peine traverser la Méditerranée. Bref, l'État nie le réel, et le nombre d'éloignements diminue chaque année, en contradiction complète avec les propos de fermeté tenus publiquement.
Je peux concevoir que l'estimation du nombre de demandes d'asiles soit délicate, puisque ce nombre dépend de maints facteurs géopolitiques. Pour autant, notre système n'envoie pas un signal fort pour casser l'immigration, qui détourne nos procédures. Nous ne disposons pas d'évaluations consolidées, mais cette mission coûte au moins 1,5 milliard d'euros par an à la nation, et sans doute davantage.
Nous appelons donc à voter contre l'adoption des crédits de cette mission.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».
Comme en 2018, le budget de la mission « Conseil et contrôle de l'État » devrait augmenter en 2019, pour atteindre 756,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 680,6 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Ce niveau est supérieur de 12 millions d'euros à celui fixé par la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Cela dit, la mission « Conseil et contrôle de l'État » représente encore une part relativement faible - 0,22 % - des dépenses de l'État.
Les 16,2 millions d'euros de CP supplémentaires pour la mission se répartiront inégalement entre ses quatre programmes.
Le budget du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) reste stable, à 428 000 euros. Je recommande de nouveau qu'il soit intégré au programme de la Cour des comptes et des juridictions financières. Les crédits de ces dernières progressent modérément - 1 % - en 2019. Il en est de même du budget du Conseil économique, social et environnemental (CESE), qui augmente de 0,46 %. L'essentiel de l'évolution des crédits de la mission concerne donc le budget du principal programme, celui du Conseil d'État et des autres juridictions administratives, en augmentation de 3,4 %.
Le budget consolidé du Conseil d'État, des cours administratives d'appel, des tribunaux administratifs et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) s'élèvera à 420 millions d'euros en 2019. Les crédits supplémentaires abondent en grande partie les dépenses de personnel, pour permettre la création de 132 emplois.
Comme les dernières années, l'essentiel de cet effort financier est axé sur la CNDA. Ses moyens seront portés en 2019 à un niveau inédit : avec 122 agents supplémentaires, son plafond d'emplois atteindra 648 ETP et dépassera ainsi celui des huit cours administratives d'appel réunies. Cinq nouvelles chambres ouvriront, ce qui nécessitera le transfert de cinq magistrats administratifs pour les présider. Ces moyens supplémentaires sont justifiés par la nécessité de renforcer la capacité de jugement de la CNDA, qui est prise dans un étau depuis ces dernières années. D'une part, elle est contrainte de réduire ses délais de jugement, conformément aux objectifs fixés par le législateur en 2015. D'autre part, elle est confrontée à une véritable envolée du contentieux de l'asile : + 34 % d'affaires nouvelles en 2017, + 21 % en 2018... En tout, 65 000 recours seront déposés à la CNDA d'ici la fin d'année !
La CNDA a traité 47 814 requêtes fin 2017, ce qui fait d'elle la première juridiction administrative française, comme l'a rappelé François-Noël Buffet dans son rapport sur le projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. Cette loi a notamment mis fin à l'effet suspensif de certains recours devant la CNDA : les demandeurs d'asile concernés pourront ainsi faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), mais pourront toujours demander la suspension de cette OQTF devant le juge administratif de droit commun. Plusieurs milliers de recours contre ces OQTF pourraient donc être déposés l'an prochain.
Ces nouveaux recours alimenteront un contentieux des étrangers déjà massif, puisqu'il représente environ 83 000 affaires en 2017, soit un tiers du contentieux total des juridictions administratives hors CNDA.
Malgré ce potentiel surcroît d'activité à venir, les ressources des juridictions administratives progresseront peu en 2019 : dix créations d'emplois pour l'ensemble des 42 tribunaux administratifs. Je tiens pourtant à ce que la capacité de jugement des juridictions soit préservée à un niveau suffisant pour leur permettre de respecter ces deux objectifs : une maîtrise de leur stock d'affaires anciennes à un niveau raisonnable et un délai moyen de jugement inférieur à un an, comme l'a demandé le législateur en 2002. Or, ces délais de jugement pourraient se dégrader en 2018 et en 2019.
Les crédits des autres programmes connaissent peu de variations pour 2019. Ceux du CESE s'élèvent à 40,2 millions d'euros, soit un niveau presqu'égal à celui de 2018. Son plafond d'emplois reste fixé à 150 ETP. La réforme de cette assemblée est inscrite dans le projet de révision constitutionnelle, qui prévoit une extension de la mission consultative du CESE, par des saisines plus fréquentes sur les projets de loi ou par le recueil dématérialisé des pétitions citoyennes. Cependant, le projet de révision étant toujours en discussion, les crédits du CESE s'en tiendront en 2019 à ce qui a été fixé par le triennal.
Dans l'attente de sa réforme, le CESE poursuit deux axes de rénovation, initiés en 2016. En premier lieu, il adapte son régime financier et comptable. Une cellule de contrôle interne a déjà été mise en place, et ses comptes seront certifiés pour la première fois l'an prochain. En second lieu, le CESE cherche toujours à renforcer l'impact de son activité consultative : il s'est équipé d'outils pour mesurer les suites données à ses préconisations et il produit certains avis en lien avec d'autres institutions, comme le Défenseur des droits ou la Cour des comptes.
Le budget de cette dernière et des autres juridictions financières représente le deuxième programme de la mission par son montant : 220 millions d'euros en 2019.
Conformément à la programmation pluriannuelle, 2,2 millions d'euros de crédits supplémentaires abonderont ce programme en 2019, pour financer, entre autres, le recrutement de 15 agents supplémentaires, sans évolution du plafond d'emplois. Ce recrutement renforcera les services de contrôle et d'appui au contrôle, lesquels évoluent dans un environnement de plus en plus dématérialisé et numérisé - raison pour laquelle la Cour investit cette année encore dans le développement d'équipements informatiques innovants.
Je note enfin que les juridictions financières poursuivent leurs activités à moyens quasi constants, alors que celles-ci représentent une charge croissante. Je citerai deux exemples récents : l'expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales, qui mobilise quinze agents depuis 2016, et les premières missions de contrôle de certains établissements sociaux et médico-sociaux et de certaines cliniques privées, qui pourraient être amenées à s'étendre à l'avenir.
Je vous invite à adopter les crédits de cette mission sans modification.
Je confirme vos propos. J'ai visité récemment la chambre régionale des comptes de Dijon, qui fonctionne bien, si ce n'est que l'extension des missions que vous évoquiez entraîne des charges nouvelles ne pouvant être assumées avec les moyens actuels. L'évolution spectaculaire des moyens de la CNDA répond à une nécessité. Sa nouvelle présidente, Mme Dominique Kimmerlin, m'a indiqué qu'on était arrivé à un plafond, et que la création de 122 postes devrait débloquer la situation, en permettant de créer cinq chambres. De plus, les entrées sur le territoire sont moindres qu'il y a trois ou quatre ans. Les dix postes restant pour les tribunaux administratifs ne suffiront pas. Malgré ces réserves, j'émettrai un avis favorable sur ces crédits.
Les juridictions administratives font face à des contentieux de masse liés à des errements dans la prise de décision de Bercy. Je pense, par exemple, à la CSG pour les non-résidents : un requérant m'a transmis une lettre du tribunal administratif de Montreuil l'informant que le nombre de réclamations similaires à la sienne est d'environ 40 000. Certaines décisions fiscales relèvent du bricolage, sont mal préparées par Bercy, issues d'amendements du Gouvernement rapidement adoptés notamment dans les projets de loi de finances rectificative, et aboutissent à des contentieux devant la Cour de justice de l'Union européenne, que la France perd. C'est absurde ! J'ai souvent appelé l'attention du ministre du Budget sur la nécessité de mieux préparer les mesures et d'apporter les réponses avant un contentieux.
Plutôt que d'apporter des solutions en amont, l'administration fiscale attend que les contribuables saisissent les tribunaux.
La CNDA n'aurait-elle pas plutôt sa place dans la mission « Immigration, asile et intégration » précédemment examinée ? Certes, il s'agit d'une juridiction, mais son activité participe à la politique globale de l'asile, dont les crédits sont présentés dans cette mission. Rapporteur spécial de la mission « Pouvoirs publics », je constate que ceux-ci fonctionnent tous à budget constant. Pourquoi le budget du CESE est-il en augmentation, même minime ? J'envisage de déposer un amendement sur ce point.
Les nouvelles missions qui lui seront confiées justifieront de nouveaux crédits, a déclaré le président de CESE. Pouvez-vous nous en dire plus ? Il est un peu préoccupant que le nombre d'emplois dans les juridictions administratives augmente si peu, alors que le délai de traitement des affaires par les cours administratives d'appel croît régulièrement. Les contentieux de masse sont en effet inquiétants - même s'il est possible de les traiter en bloc. Un travail préventif serait bienvenu.
L'évolution du budget du CESE, que vous qualifiez de maîtrisée, est lente mais sûre : 30 millions d'euros en 2006, 36 millions d'euros en 2008, 42,2 millions d'euros aujourd'hui... Ce n'est pas la même évolution pour les collectivités territoriales ou le Sénat ! Pourquoi ce dérapage ? Des pistes d'économies sont-elles identifiées ?
L'évolution principale est l'accroissement important des moyens de la CNDA, pour faire face à l'accroissement du nombre de demandeurs d'asile. Or, le budget de la mission précédente se fonde sur l'hypothèse d'une stagnation de ce nombre. N'est-ce pas incohérent ?
Il faudra reloger la CNDA, et 61,7 millions d'euros d'AE sont prévus pour cela. Allons-nous vers une déconcentration ? Avez-vous des informations complémentaires sur ce projet de relogement ?
Je reste sceptique sur les moyens dédiés à la certification des comptes des collectivités territoriales, car la solvabilité d'une collectivité territoriale dépend moins de son patrimoine que de la capacité contributive de ses administrés. Déjà, les directions départementales des finances publiques, exsangues, sont incapables d'apporter les conseils requis aux collectivités. Ainsi, le comptable du Trésor public en poste à Château-Chinon est parti l'an dernier avec une partie de la caisse : les comptes n'avaient pas été arrêtés depuis deux ans !
Vous n'avez pas indiqué, alors que cela figure dans votre rapport que, pour la première fois, la mise en réserve de crédits sera appliquée, notamment sur le programme des juridictions administratives, ce qui montre que le budget a été construit avec rigueur. Dans plusieurs villes des Hauts-de-Seine, des dérives ont été constatées en matière de contravention du stationnement. Quel a été l'impact sur le nombre des recours administratifs ?
La CNDA manque de magistrats, alors que leur rémunération coûte moins cher que l'hébergement ! Sous la présidence de M. Delevoye, le CESE avait diversifié ses recettes, notamment par la mise à disposition de ses locaux. Cette politique est-elle poursuivie ?
La Cour des comptes réalise de nombreux rapports et émet à cet égard de nombreuses recommandations. Sont-elles vraiment suivies d'effet ?
Catherine Bergeal, secrétaire générale du Conseil d'État, m'a confirmé que les contentieux de masse posaient problème, et m'a parlé de ceux qui concernent le remboursement de la contribution au service public de l'électricité. Sortir la CNDA de cette mission ? Je ne suis pas juriste, mais il me semble que, puisque c'est une juridiction administrative, ses décisions sont soumises à la cassation du Conseil d'État, il est logique qu'elle soit dans cette mission, comme les autres juridictions administratives.
Le CESE a fait l'objet de nombreuses remarques. Son nouveau président, M. Patrick Bernasconi, s'est récemment exprimé dans la presse sur les moyens et les missions de cette institution. Il a fait un effort pour démontrer son utilité d'après lui, plusieurs préconisations ont été reprises dans les lois récentes, mais nous sommes dans une période intermédiaire, avant la révision constitutionnelle, qui devrait réduire le nombre de conseillers. À cet égard, les économies ne sont pas certaines. Ses nouvelles missions entraineront-elles une hausse des charges ? Il lui faudrait, en tous cas, des moyens adaptés à certains chantiers : dématérialisation du recueil des pétitions, mise en place du tirage au sort... Depuis 2017, le CESE ne dispose que d'un seul ingénieur informatique ! Oui, il cherche d'autres sources de financement, grâce au mécénat.
En réponse à la question de Thierry Carcenac, le projet de relogement consiste à regrouper en un seul lieu, à Montreuil, les quatre sites de la CNDA avec le tribunal administratif de Montreuil.
Pour répondre à Christine Lavarde, Catherine Bergeal m'a indiqué que 1 500 recours en moyenne étaient enregistrés par mois devant la commission du contentieux du stationnement payant. Entre janvier et juin 2018, 6 818 affaires ont été enregistrées et 522 traitées. En revanche, la plupart des crédits de cette commission sont financés par la mission « Administration générale et territoriale de l'État » dont notre collègue Jacques Genest est le rapporteur spécial.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».