Intervention de Didier Rambaud

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 31 octobre 2018 à 9h05
Projet de loi de finances pour 2019 — Mission « conseil et contrôle de l'état » - examen du rapport spécial

Photo de Didier RambaudDidier Rambaud, rapporteur spécial :

Comme en 2018, le budget de la mission « Conseil et contrôle de l'État » devrait augmenter en 2019, pour atteindre 756,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 680,6 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Ce niveau est supérieur de 12 millions d'euros à celui fixé par la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Cela dit, la mission « Conseil et contrôle de l'État » représente encore une part relativement faible - 0,22 % - des dépenses de l'État.

Les 16,2 millions d'euros de CP supplémentaires pour la mission se répartiront inégalement entre ses quatre programmes.

Le budget du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) reste stable, à 428 000 euros. Je recommande de nouveau qu'il soit intégré au programme de la Cour des comptes et des juridictions financières. Les crédits de ces dernières progressent modérément - 1 % - en 2019. Il en est de même du budget du Conseil économique, social et environnemental (CESE), qui augmente de 0,46 %. L'essentiel de l'évolution des crédits de la mission concerne donc le budget du principal programme, celui du Conseil d'État et des autres juridictions administratives, en augmentation de 3,4 %.

Le budget consolidé du Conseil d'État, des cours administratives d'appel, des tribunaux administratifs et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) s'élèvera à 420 millions d'euros en 2019. Les crédits supplémentaires abondent en grande partie les dépenses de personnel, pour permettre la création de 132 emplois.

Comme les dernières années, l'essentiel de cet effort financier est axé sur la CNDA. Ses moyens seront portés en 2019 à un niveau inédit : avec 122 agents supplémentaires, son plafond d'emplois atteindra 648 ETP et dépassera ainsi celui des huit cours administratives d'appel réunies. Cinq nouvelles chambres ouvriront, ce qui nécessitera le transfert de cinq magistrats administratifs pour les présider. Ces moyens supplémentaires sont justifiés par la nécessité de renforcer la capacité de jugement de la CNDA, qui est prise dans un étau depuis ces dernières années. D'une part, elle est contrainte de réduire ses délais de jugement, conformément aux objectifs fixés par le législateur en 2015. D'autre part, elle est confrontée à une véritable envolée du contentieux de l'asile : + 34 % d'affaires nouvelles en 2017, + 21 % en 2018... En tout, 65 000 recours seront déposés à la CNDA d'ici la fin d'année !

La CNDA a traité 47 814 requêtes fin 2017, ce qui fait d'elle la première juridiction administrative française, comme l'a rappelé François-Noël Buffet dans son rapport sur le projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. Cette loi a notamment mis fin à l'effet suspensif de certains recours devant la CNDA : les demandeurs d'asile concernés pourront ainsi faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), mais pourront toujours demander la suspension de cette OQTF devant le juge administratif de droit commun. Plusieurs milliers de recours contre ces OQTF pourraient donc être déposés l'an prochain.

Ces nouveaux recours alimenteront un contentieux des étrangers déjà massif, puisqu'il représente environ 83 000 affaires en 2017, soit un tiers du contentieux total des juridictions administratives hors CNDA.

Malgré ce potentiel surcroît d'activité à venir, les ressources des juridictions administratives progresseront peu en 2019 : dix créations d'emplois pour l'ensemble des 42 tribunaux administratifs. Je tiens pourtant à ce que la capacité de jugement des juridictions soit préservée à un niveau suffisant pour leur permettre de respecter ces deux objectifs : une maîtrise de leur stock d'affaires anciennes à un niveau raisonnable et un délai moyen de jugement inférieur à un an, comme l'a demandé le législateur en 2002. Or, ces délais de jugement pourraient se dégrader en 2018 et en 2019.

Les crédits des autres programmes connaissent peu de variations pour 2019. Ceux du CESE s'élèvent à 40,2 millions d'euros, soit un niveau presqu'égal à celui de 2018. Son plafond d'emplois reste fixé à 150 ETP. La réforme de cette assemblée est inscrite dans le projet de révision constitutionnelle, qui prévoit une extension de la mission consultative du CESE, par des saisines plus fréquentes sur les projets de loi ou par le recueil dématérialisé des pétitions citoyennes. Cependant, le projet de révision étant toujours en discussion, les crédits du CESE s'en tiendront en 2019 à ce qui a été fixé par le triennal.

Dans l'attente de sa réforme, le CESE poursuit deux axes de rénovation, initiés en 2016. En premier lieu, il adapte son régime financier et comptable. Une cellule de contrôle interne a déjà été mise en place, et ses comptes seront certifiés pour la première fois l'an prochain. En second lieu, le CESE cherche toujours à renforcer l'impact de son activité consultative : il s'est équipé d'outils pour mesurer les suites données à ses préconisations et il produit certains avis en lien avec d'autres institutions, comme le Défenseur des droits ou la Cour des comptes.

Le budget de cette dernière et des autres juridictions financières représente le deuxième programme de la mission par son montant : 220 millions d'euros en 2019.

Conformément à la programmation pluriannuelle, 2,2 millions d'euros de crédits supplémentaires abonderont ce programme en 2019, pour financer, entre autres, le recrutement de 15 agents supplémentaires, sans évolution du plafond d'emplois. Ce recrutement renforcera les services de contrôle et d'appui au contrôle, lesquels évoluent dans un environnement de plus en plus dématérialisé et numérisé - raison pour laquelle la Cour investit cette année encore dans le développement d'équipements informatiques innovants.

Je note enfin que les juridictions financières poursuivent leurs activités à moyens quasi constants, alors que celles-ci représentent une charge croissante. Je citerai deux exemples récents : l'expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales, qui mobilise quinze agents depuis 2016, et les premières missions de contrôle de certains établissements sociaux et médico-sociaux et de certaines cliniques privées, qui pourraient être amenées à s'étendre à l'avenir.

Je vous invite à adopter les crédits de cette mission sans modification.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion