Sur la place de l'homme dans la guerre, oui, les nouvelles technologies ouvrent des champs nouveaux d'opportunités et de risques : l'homme doit rester au centre, mais pour approfondir la question, j'ai au sein de mon ministère demandé à un collège d'inspecteurs généraux de réfléchir à l'usage des armes du futur et à ses conséquences éthiques ; ils me feront des propositions, afin que nous adoptions une ligne de conduite claire. Des garde-fous sont indispensables.
On constate depuis trois ou quatre ans une hausse générale des budgets de la défense dans l'ensemble des pays membres de l'Alliance atlantique. En 2014, trois pays seulement y consacraient 2% ou plus de leur PIB. En 2017 ils étaient six. La France n'atteint pas encore ce niveau mais la programmation militaire prévoit d'y parvenir en 2025. Parmi ces six pays, les États-Unis se situent à 3,58 % du PIB, le Royaume-Uni à 2,14 % ; personne ne dispose de chiffres fiables pour la Russie ou la Chine, mais l'effort de ces pays est massif. En Chine, un grand bâtiment militaire sort chaque mois des chantiers navals ...
Bonne ou mauvaise nouvelle ? Comment l'apprécier dans l'absolu ? La croissance des budgets militaires répond en tout cas à une montée des menaces internationales. La France a signé les traités de limitation des armements. Cependant, si la progression des budgets de la défense s'était ralentie dans l'après-Guerre froide, la conjoncture actuelle n'autorise plus une telle décélération. Nos ennemis, ce sont les terroristes et le réarmement vise précisément à lutter contre le terrorisme à la racine, par projection sur les théâtres du Levant par exemple, ou par une présence forte au Sahel. Nous ne pouvons prendre le risque de mal protéger les Français. Pardon pour cette réponse lapidaire, le temps me manque pour préciser davantage mon propos.
Je vous fournirai dès que je les aurai réunis des éléments de réponse précis sur les dépenses spatiales des différents membres du Conseil de sécurité.
Oui, la coopération avec la Grande-Bretagne progresse bien. Le projet Poséidon avec l'Italie, visant à profiter des synergies potentielles entre Fincantieri et Naval Group sur les navires de surface, répond à la nécessité de mieux organiser les industries navales européennes face à des concurrents de plus en plus gros. Il faut rechercher une taille critique. Nous continuons à discuter avec le partenaire italien. Mon homologue italienne et moi avons décidé de ne pas rendre les relations entre nos deux pays encore plus compliquées qu'elles ne le sont actuellement. J'espère vous présenter bientôt des projets plus aboutis.
Vous m'interrogez également sur nos marges de manoeuvre opérationnelles. Nous sommes très engagés dans Chammal - nous serons amenés à prendre d'ici quelques mois des décisions pour adapter le dispositif - et Barkhane, que nous adaptons en permanence aux besoins.
Le fonctionnement de Louvois ne sera jamais stabilisé ni parfaitement satisfaisant, c'est pourquoi nous consacrons tous nos efforts à son successeur. Nous avons en outre énormément investi pour maîtriser et compenser les difficultés dramatiques engendrées par les failles du logiciel actuel. À présent, la paye des militaires est assurée à 99,9% dans des conditions normales, mais c'est au prix d'un investissement humain considérable et permanent pour corriger ces dysfonctionnements. La solution n'est pas pérenne, il faut pouvoir remplacer dès que possible le système actuel par un nouveau logiciel.
Les industriels de la défense suivent attentivement les négociations en cours au niveau européen, car un hard Brexit exigerait à l'évidence des réorganisations profondes, pour tenir compte de nouveaux droits de douane et de la non-compatibilité des autorisations, licences, certificats de service fait. Aujourd'hui la bonne utilisation des armements dans les différents pays clients est régie par la règlementation européenne ; s'il en allait autrement demain, cela se traduirait par des obstacles dirimants, les industriels devraient redéployer leurs activités au sein des pays de l'Europe.
L'IEI a pu irriter certains pays. L'Allemagne accepte la notion d'intervention ; mais le dispositif est modulable, et les pays adhérents peuvent ne participer qu'à certaines opérations. L'initiative est utile pour amener des pays plus éloignés que le nôtre des opérations dites haut du spectre à partager une culture commune, par une participation à des exercices répétés, une réflexion conjointe des états-majors. Ce sera un bien précieux pour les membres de l'IEI mais plus largement pour tous les pays européens.
Sur les nationalismes et l'Europe de la défense, ce que j'ai voulu dire, c'est qu'il serait bon, dans la perspective des élections européennes de 2019, de mettre en avant les réalisations concrètes dans le domaine de la défense, car elles répondent aux préoccupations des Européens concernant leur sécurité. Communiquer plus largement sur ces réalisations en cours, c'est une façon de combattre des populismes peu propices au bon fonctionnement des démocraties européennes. C'est un point de vue personnel !
L'article sur l'Égypte paru aujourd'hui dans un quotidien que nous connaissons tous mêle le vrai et le faux. Nous avons une relation de coopération avec l'Égypte et nous exportons vers ce pays un volume d'armes qui se monte effectivement à 4 milliards d'euros. Ces armes sont destinées aux forces armées, non aux forces de sécurité. Et j'ai été étonnée de lire que nos exportations seraient en contradiction avec les décisions européennes de 2013 - lorsque les ministres européens ont décidé de bannir la vente à l'Égypte d'armes qui pourraient être utilisées pour réprimer des populations civiles. Nous appliquons avec ce partenaire les mêmes critères qu'avec, par exemple, l'Arabie Saoudite. Nous respectons les engagements pris par la France. Et si l'Égypte utilise des matériels que notre pays lui a vendus il y a longtemps - des véhicules produits par Renault Trucks - contre ses populations civiles, ce n'était pas l'objectif initial. Je puis en tout cas vous indiquer que nous n'avons pas, depuis 2013, exporté d'armes destinées aux forces de sécurité intérieures égyptiennes.