J'aborderai également un certain nombre de sujets qui ont été évoqués par les différents intervenants.
Nous avons essayé d'inscrire la politique du ministère de la défense dans l'ensemble des politiques publiques. Vous avez parlé, par exemple, de l'environnement, et je vous remercie des précisions que vous avez apportées, monsieur Georges Othily. Nous avons décidé de nous inscrire dans une politique de développement durable, sans, bien entendu, remettre en cause les capacités opérationnelles de nos armées, car elles constituent le coeur de notre métier.
Nous disposons de tous les moyens nécessaires, pour le développement de l'éco-industrie, pour faire en sorte que nos commandes publiques soient davantage dédiées au développement durable et que, au travers de nos bâtiments, de nos casernements, de nos logements, nous participions aux économies d'énergie.
Dans ce cadre, quatre implantations de nos armées - l'École polytechnique et une implantation par armée - feront l'objet d'un bilan énergétique et environnemental complet au cours du premier semestre de 2008. Ensuite, un programme complet sera conduit pour montrer à l'ensemble du ministère de la défense que nous pouvons faire beaucoup en ce domaine et que nous pouvons donner l'exemple à l'ensemble du pays.
Le deuxième sujet abordé par M. Pierre Laffitte concernait les PME. Nous avons lancé un plan en leur faveur - je l'ai présenté ce midi même à la presse. Parmi les mesures de ce plan, figurent les délais de paiement.
Nous allons faire en sorte que les délais de paiement qui sont accordés aux grands donneurs d'ordre soient exactement les mêmes pour les PME lorsque ces grands donneurs d'ordre s'adressent à leurs sous-traitants.
Par ailleurs, nous allons rendre les plans d'étude amont beaucoup plus accessibles aux PME, qui sont souvent des trésors d'innovation, d'intelligence et de réactivité.
La question de l'égalité des chances a également été abordée.
C'est un sujet sur lequel nous mènerons un certain nombre d'expériences, en sachant que le ministère de la défense, monsieur André Dulait, est probablement l'institution où l'égalité des chances via la capacité de promotion est la plus importante. On oublie, en effet, souvent que 50 % des sous-officiers sont issus des militaires du rang et que 50 % des officiers sont d'anciens sous-officiers.
Il existe donc déjà au sein de l'armée française une vraie tradition d'ascenseur social. C'est probablement la dernière institution où, si l'on s'en donne la peine, on peut franchir des étapes et accéder à d'autres responsabilités.
J'ai néanmoins présenté un plan il y a trois mois. Un bilan a été fait la semaine dernière : tout se met en place comme nous le souhaitions.
Nous instaurerons, par exemple, un tutorat entre les élèves des grandes écoles militaires et les jeunes de lycées situés dans les zones sensibles et dans les zones rurales, là où l'idée d'accéder à une grande école militaire paraît absolument impossible.
Nous créerons des classes tampon dans les lycées militaires pour offrir à ces jeunes la possibilité d'accéder à un certain niveau de culture et d'acquérir les connaissances leur permettant de se présenter aux concours d'entrée des écoles préparatoires à égalité de chance avec les enfants de familles plus favorisées.
Même si nous maintenons la proportion des 70 % pour le personnel militaire, nous ouvrons les lycées militaires aux enfants de familles de condition modeste. Nous rouvrons également le lycée militaire de Strasbourg - qui avait été fermé en 1984 -, afin de permettre au personnel civil de la défense de passer le baccalauréat dans le cadre d'un parcours professionnel et de pouvoir progresser dans leur carrière.
Par ailleurs, nous avons décidé de développer les préparations militaires ainsi que les cadets de la défense, sorte d'encadrement notamment des activités sportives. Nous avons mené les premières expériences et les régiments qui se sont engagés dans cette voie le font avec beaucoup d'enthousiasme. Le chef d'état-major de l'armée de terre, avec lequel j'ai évoqué ce point la semaine dernière, m'a dit que tout se déroulait de façon remarquable.
Je profite de l'occasion pour indiquer à M. François Trucy que nous avons consacré 72 millions d'euros pour offrir des locaux aux établissements chargés de mettre en oeuvre la politique du dispositif « Défense deuxième chance ».
Je vous rappelle néanmoins que, malgré son nom, ce dispositif dépend non pas du ministère de la défense, mais du ministère de l'économie et des finances au titre des aides à l'emploi. Je n'entends pas que le budget de la défense, dont certains ont estimé qu'il était tendu, participe à ce qui ne relève pas directement du ministère de la défense.
Concernant les exportations d'armement, madame Dominique Voynet, je suis en contradiction totale avec vous.
Nous avons mis cinquante ans à construire une industrie de défense, qui figure parmi les plus remarquables au monde. C'est un trésor de technologie, une pointe de diamant exceptionnelle.
Cette industrie de défense, c'est l'effort d'un pays durant des décennies. Nous pouvons la maintenir et préserver les 250 000 à 300 000 emplois qu'elle représente seulement si nous sommes en mesure, dans un marché en extension - le monde entier se réarme à l'heure actuelle - de maintenir nos parts à l'exportation. Or nos parts sont en train de diminuer, en part relative j'entends, puisque nous sommes aujourd'hui quasiment devancés par les Israéliens.
Madame la sénatrice, on peut toujours rêver d'un monde sans armement, mais, malheureusement, ce monde idéal n'existe pas.
Il nous appartient de soutenir l'industrie de défense pour lui permettre, d'une part, de développer nos propres programmes - bien entendu, la vente de programmes à l'étranger diminue le coût de nos propres séries - et, d'autre part, de pérenniser l'effort industriel.
Pourquoi cette charge incombe-t-elle au ministère de la défense ? Tout simplement parce qu'il exerce la tutelle des établissements concernés. A priori, nous connaissons mieux que quiconque les programmes développés par l'industrie de défense. Nous connaissons éventuellement mieux les risques stratégiques qui pourraient découler de la vente de tel ou tel matériel à l'exportation.
Par ailleurs, un contrôle est assuré par une commission interministérielle présidée par le Secrétariat général de la défense nationale, le SGDN, donc par les services du Premier ministre, et à laquelle participent le ministère des affaires étrangères, le ministère de la défense, le ministère de l'économie et des finances, ainsi qu'un représentant de l'Élysée.
En ce qui concerne la question des exportations d'armement, une administration ou un ministère est donc chargé de soutenir cette industrie de défense et le contrôle revient à une instance collégiale placée sous l'autorité du Premier ministre.
Il y a, en matière d'exportation, quatre sujets sur lesquels nous devons progresser.
D'abord, nous devons améliorer les délais d'instruction des autorisations d'exportation. Les PME françaises nous indiquent que nos délais sont largement plus longs qu'en Allemagne et au Royaume-Unis. Nous devons donc réfléchir sur les conditions des exportations au sein de l'Union européenne, notamment pour un certain nombre de pays.
Ensuite, il n'y a aucune raison que les règles et les procédures pour exporter du matériel au sein de l'Union européenne, parfois entre deux filiales d'un même groupe, soient les mêmes que lorsque nous exportons des produits dans des pays dits « sensibles ».
En outre, il nous faut aider davantage les PME dans leurs efforts à l'exportation.
Enfin, nous devons réfléchir à la nomenclature en matière d'exportation.
Lorsque vous décidez de vendre des essuie-glaces d'une 504 qui sont peints en vert parce qu'ils sont installés sur des véhicules Panhard, la commission interministérielle des exportations des matériels de guerre, CIEMG, est la même que lorsqu'il s'agit de vendre un programme d'armement complet.
C'est donc un sujet majeur, lourd, pour le soutien à l'industrie de défense française et j'entends bien m'y consacrer.
Enfin, je souhaite aborder deux sujets : la participation de la défense à la construction européenne et l'OTAN.
Sur la construction européenne, la priorité de la France est, dans le cadre de la présidence française, de donner un nouvel élan à l'Europe de la défense. Sur ce sujet, permettez-moi de vous livrer quelques-unes des pistes que nous avons présentées à nos partenaires européens.
Comme vous le savez, c'est non pas au moment de la présidence que les choses se font mais en amont. Au moment de la présidence, vous êtes dans le consensus. Il faut donc faire progresser vos idées avant d'assumer la présidence de manière qu'elles puissent ensuite aboutir.
Parmi les propositions que j'ai formulées, la première est de doter l'Europe d'un centre de planification et de commandement autonome. L'Europe doit pouvoir mener par elle-même des opérations qui la concernent directement ou qui se situent sur ses théâtres naturels d'intervention.
La deuxième piste dont j'ai parlé est le développement de capacités militaires européennes, je pense, par exemple, aux satellites d'observation.
Une troisième piste est l'engagement d'une politique de formation commune, dotée d'un tronc commun, un « Erasmus militaire », en quelque sorte.
Une quatrième idée a trait à la mise en place d'un plan d'évacuation des ressortissants des États membres, de manière à être mieux coordonnés et plus efficaces en cas de crise.
La priorité, c'est le développement de l'Europe de la défense. Il y a aujourd'hui, de toute évidence, un manque de souffle sur cette question et il est donc nécessaire de relancer ce projet. Toutefois, l'Europe de la défense ne pourra pas se construire contre l'OTAN. Si vous évoquez la question en estimant que l'Europe de la défense s'oppose à l'OTAN ou cherche à l'affaiblir, nous ne progresserons jamais sur ce sujet.
La position française est donc simple : nous voulons faire progresser l'Europe de la défense non pas en nous opposant à l'OTAN mais de façon complémentaire avec elle, afin que nos partenaires européens acceptent ce développement.
Pour la plupart de nos partenaires européens, l'Europe de la défense, dès l'origine, a souvent été vécue comme contradictoire ou en opposition avec l'OTAN. Dès lors que nous affichons clairement que l'OTAN est un système de sécurité collectif qui a ses responsabilités, qui permet d'assurer la stabilité et la sécurité du continent européen, nous pouvons progresser sur l'Europe de la défense. Si nous sommes perçus comme voulant opposer l'une à l'autre, nous n'y parviendrons pas. Il n'y a donc pas de « course à l'OTAN ». Il y a, au contraire, la volonté de faire en sorte que, par une clarification des positions, l'Europe de la défense puisse avancer.
En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission dont, je l'espère, vous allez tout à l'heure adopter les crédits, s'adresse aux hommes et aux femmes qui servent au ministère de la défense. Je suis certain que, comme moi, vous vous associerez, et la nation avec vous, à l'hommage que nous devons rendre à nos militaires qui ont fait le choix de servir la France, parfois au risque de leur vie.
En votant ce budget, vous apporterez votre soutien à une institution placée au coeur de la vie sociale, industrielle, économique de notre pays et qui nous rend un service indispensable : la défense, la sécurité, ainsi que la souveraineté de notre pays.