Je me félicite de la volonté de rééquilibrer le budget de l'APD en faveur des dons : c'était une demande récurrente de notre commission.
Le triplement des autorisations d'engagement pour l'aide bilatérale permettra notamment à l'AFD de passer de 10,3 milliards d'engagement en 2017 à 14 milliards d'euros à l'horizon 2020, conformément à la feuille de route fixée par le gouvernement. Mais l'AFD est dans une situation complexe. D'abord, le risque pays se dégrade dans certaines zones géographiques prioritaires, comme la Turquie. Ensuite, l'agence atteint sa limite prudentielle « grands risques » pour certains de ses gros emprunteurs, tels les pays du Maghreb. Enfin, plusieurs pays africains emprunteurs s'approchent ou ont atteint le niveau de surendettement. Pour sortir de cette situation, l'AFD réclame qu'on étende son mandat à de nouveaux pays ; elle a obtenu satisfaction récemment pour les Balkans et elle multiplie ses efforts de prospection pour trouver des contreparties non souveraines. N'est-il pas préférable de ne financer que des projets nécessaires dont les pays en développement sont demandeurs ?
Vous avez dit vouloir faire évoluer la culture de l'évaluation, et nous partageons votre analyse. Ces nouveaux projets ne doivent-ils pas d'autant plus bénéficier d'une évaluation ? Nous savons que nous avons un retard en la matière, sur le Royaume-Uni en particulier.
Monsieur le ministre, vous êtes mieux placé que quiconque, compte tenu de votre parcours ministériel, pour connaître l'importance du continuum sécurité-développement. Une de ses composantes fortes était la mise en oeuvre de projets d'expertise par Expertise France. Vous connaissez les turbulences de cet été. Much ado about nothing, beaucoup de bruit pour rien, comme aurait dit Shakespeare. Ou plutôt : beaucoup de bruit pour beaucoup de temps perdu et un grand gâchis d'énergie. Le continuum sécurité-développement est impératif et Expertise France a fait preuve en quatre ans de sa capacité de gestion, notamment au Sahel. Nous serons attentifs à ce que vous pourrez faire, Monsieur le ministre, pour que les soubresauts de l'été dernier ne se reproduisent pas et que cette agence continue à jouir d'une certaine autonomie, car son action, complémentaire de celle de l'AFD, ne saurait se dissoudre dans celle-ci.