Intervention de David Assouline

Réunion du 6 novembre 2018 à 14h30
Lutte contre la manipulation de l'information — Question préalable sur la proposition de loi organique

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Au moment de voter sur la motion, on ne peut pas laisser passer cette idée que, en rejetant le texte sans l’amender, on se trouverait alors dépourvu, ou, en d’autres termes, qu’en voulant le maximum, on ne voudrait pas le minimum.

En réalité, comme certains l’ont rappelé, nous ne sommes pas dépourvus. Il existe tout d’abord une loi ancienne sur la presse qui peut tout à fait répondre à l’essentiel des problématiques dont nous débattons. Nous disposons également du code pénal. Nous avons enfin un droit de l’internet que nous avons nous-mêmes créé, à travers notamment les différentes lois que nous avons votées, comme la loi pour une République numérique, par exemple. Nous avons donc tout un arsenal à notre disposition.

Ensuite, il n’est pas totalement exact de dire que nous n’avons aucune évaluation de ce qui s’est fait à l’étranger. Le seul pays comparable au nôtre qui ait légiféré sur le sujet – je veux parler, non pas du droit électoral, mais des fausses informations –, c’est l’Allemagne. Là-bas, l’étude d’impact – si on peut appeler cela une étude d’impact – prévoyait le dépôt d’environ 20 000 plaintes. Or il n’y en a eu que 200.

Les Allemands discutent actuellement de l’éventualité de revenir en arrière, ce qui montre bien que cette loi n’atteint pas son objectif. Il y a donc bien une expérience, mais celle-ci n’est pas bonne, puisque tout le monde en Allemagne considère que la loi est inefficace face à l’ampleur du problème.

Alors même, donc, que les démocraties n’ont pas légiféré sur les fake news, certains pays, qui ne ressemblent pas complètement au nôtre, l’ont fait – et c’est bien cela qui est paradoxal – : je pense notamment à la Russie, mais pas seulement. Je ne les citerai pas ici, mais je puis vous dire que ce ne sont pas, en général, des exemples en matière de liberté d’expression.

Ces États, parmi lesquels la Chine, sous couvert de lutte contre les fausses informations, se dotent d’un arsenal pour museler l’information. C’est bien là le danger de lois telles que celle que nous examinons : si des anti-démocrates étaient aujourd’hui au pouvoir en France, ils pourraient s’en servir à des fins bien différentes de celles que vous envisagez.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons cette motion tendant à opposer la question préalable.

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