Monsieur Fouché, nous avons déjà beaucoup évoqué la question de la hausse des taxes sur le carburant. Je le répète : nous allons améliorer les choses et les présenter de la façon la plus claire possible, concernant les recettes et les dépenses.
Concernant l'IFER et les pertes de recettes résultant pour les collectivités territoriales de la fermeture d'une grosse centrale, comme celle de Fessenheim, ou de centrales à charbon situées sur leur territoire, nous sommes totalement transparents avec les élus locaux. Nous avons prévu des dispositifs d'étalement des pertes dans le temps afin d'éviter des effets pervers entre communes et intercommunalités. Cela étant dit, nous ne pouvons pas garantir à vie des recettes liées à des installations qui disparaissent.
La Cour des comptes a dit de la politique de soutien aux énergies renouvelables qu'elle était incohérente, coûteuse et inefficace. Nous essayons d'y mettre de l'ordre. Un important travail a été réalisé par les services de l'État et les collectivités territoriales. Les éoliennes ne sont pas implantées n'importe où. Les schémas régionaux doivent être respectés.
Cela étant dit, quand on examine la carte de France d'implantation des éoliennes terrestres, on constate que des départements entiers n'en comptent pas une seule, soit parce qu'il n'y a pas de vent, soit parce que les contraintes sont très nombreuses. Pour ma part, je pense que les contraintes sont trop nombreuses. Nous avons procédé à des simplifications ces dernières années, mais la tentation est toujours grande d'en ajouter. Il y a donc des endroits où il est difficile d'implanter des éoliennes. Il n'y a ainsi vraiment pas beaucoup d'éoliennes dans le quart sud-ouest. Or un certain équilibre est nécessaire. Il faut aller de l'avant, car la production d'électricité est compétitive aujourd'hui. Nul besoin de subventions.
De même, on sait qu'il y a en France un potentiel pour développer l'énergie solaire photovoltaïque. Je rappelle que, dans ce cas, on utilise nos ressources au lieu d'importer de l'uranium, du pétrole ou du gaz, sachant que la facture pétrolière et gazière représente entre 50 et 70 milliards d'euros dans notre commerce extérieur selon les années, en fonction du prix du pétrole. Aujourd'hui, les centrales au sol permettent de produire de l'électricité à un coût compétitif.
M. Vaspart m'a interrogé sur les solutions hydrogène dans le secteur automobile. Or ce n'est pas dans ce secteur que l'utilisation de l'hydrogène sera la plus pertinente à court terme. Pour notre part, nous soutenons l'hydrogène au stade de la recherche et développement. Il existe deux façons de produire de l'hydrogène : à partir du méthane et de l'électrolyse de l'eau. Aujourd'hui, 95 % de l'hydrogène consommé dans le monde provient du méthane, cette technique étant malheureusement fortement émettrice de CO2. L'hydrogène issu de l'électrolyse de l'eau, qui est surtout utilisé dans l'industrie, est aujourd'hui deux fois plus cher que l'hydrogène issu du méthane. Nous soutenons donc cet hydrogène afin de réduire son coût et de le rendre compétitif. Si on applique une taxe carbone sur la production de l'hydrogène issu du méthane, l'hydrogène issu de l'électrolyse de l'eau devient plus compétitif. Tout se tient ! Il s'agit d'orienter la production d'énergie vers les solutions les moins émettrices de CO2.
L'hydrogène est également une solution pour les transports lourds, notamment le train. Nous y croyons. Un constructeur français, Alstom, développe actuellement cette solution, en Allemagne malheureusement, mais des projets verront le jour en France.
Ces solutions doivent toutefois être compétitives, sinon elles ne se développeront pas à grande échelle et on ne les subventionnera pas de façon monumentale.
Je ne m'attarde pas sur les questions de production d'électricité, sur les équilibres, car nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la présentation du projet de loi de programmation annuelle de l'énergie dans les semaines à venir. Je serai évidemment disponible pour en débattre avec vous en commission. De même, nous reparlerons spécifiquement de la gestion des sédiments de la Rance, si vous le voulez bien.
Le partage de l'eau pose la question des usages de l'eau, tout simplement, et des réserves. Il faut arrêter de tourner autour du pot : c'est l'un des enjeux de l'adaptation au dérèglement climatique. On le voit, cette année, la sécheresse touche des départements qui n'avaient jamais connu ce problème auparavant. C'est typiquement une manifestation du dérèglement climatique. Les phénomènes de fortes précipitations sont également accentués. Pour gérer ces questions, nous avons commencé à travailler avec le ministère de l'agriculture. Dans son rapport, le préfet Bisch pose un certain nombre de principes, que nous allons mettre en oeuvre, y compris s'agissant des réserves, souvent combattues au sein de mon ministère.
Nous devons également changer les usages, sinon nous ne nous adapterons pas au changement climatique. C'est vrai en matière d'irrigation - ce n'est pas un gros mot dès lors qu'elle est gérée de manière responsable?! - ou d'alimentation en eau pour l'élevage. Cet été, une région comme le Limousin a connu des déficits en eau alors que ce n'était jamais arrivé auparavant.
Nous reviendrons sur la police de l'environnement dans le cadre de la fusion AFB-ONCFS. Il est évident que nous devons avoir des agents multifonctions qui puissent remplir ce rôle, à condition d'être détachés du monde de la chasse. La Fédération nationale des chasseurs en est d'accord.
J'en viens à l'alternative à la voiture individuelle.
Il est certain que le choix ne peut pas se faire entre la voiture et les transports en commun, ces derniers ne pouvant pas aller partout, en particulier à la campagne. Ce serait même une aberration écologique de mettre en place des bus ou des trains dans des endroits où il n'y a que quelques personnes à transporter.
En revanche, le covoiturage, par exemple, est un nouvel usage de la voiture qui n'est pas assez développé aujourd'hui, en tout cas pour les courtes distances et les trajets quotidiens. De nombreuses collectivités ont créé des aires de covoiturage qui marchent, mais il faut des applications. À Charleville-Mézières, une collectivité a mis en place un système de voitures électriques partagées permettant de répondre aux besoins en déplacements des gens n'ayant pas de voitures.
Les territoires à énergie positive pour la croissance verte (TEPCV) ne seront pas poursuivis, comme l'avait d'ailleurs annoncé mon prédécesseur. Nous honorerons les engagements qui ont été pris, alors qu'ils n'ont pas toujours été financés, mais nous privilégions une politique différente, les contrats de transition écologique. Tout le monde ne porte pas tout à fait la même appréciation sur le bilan des TEPCV, entre effet de levier sur les territoires et effet d'aubaine?!
Monsieur Dantec, vous m'avez interrogé sur les plans climat air énergie territoriaux. Je vous remercie tout d'abord d'avoir rappelé que la taxe carbone avait fait l'objet d'un consensus. Pour ma part, je l'ai votée en 2009, lorsque le président Sarkozy a voulu l'instaurer. J'étais alors dans l'opposition, mais j'ai parfois eu l'impression de la défendre davantage que les députés de la majorité de l'époque. J'ai regretté que cette taxe ait été abandonnée, le Conseil constitutionnel l'ayant retoquée. Le gouvernement Fillon avait indiqué qu'il allait présenter un nouveau projet, mais il ne l'a jamais fait. J'ai également soutenu cette taxe lorsqu'elle a été adoptée en 2013, puis augmentée en 2017.
Ceux qui étaient favorables à une taxe carbone pensaient qu'elle allait permettre de taxer davantage l'électricité produite par du gaz, du fioul et du charbon et de soutenir le nucléaire. Il ne faut pas s'en cacher. Aujourd'hui, les mêmes déplorent que la taxe carbone s'applique aussi au fioul domestique et au carburant des voitures. La taxe ne s'applique pas à certaines émissions et pas à d'autres.
Seuls les agriculteurs et les industries électro-intensives sont exonérés de cette taxe. Elle n'est pas appliquée au gazole non routier pour les agriculteurs. C'est une niche fiscale, qui représente un milliard d'euros. Jusqu'à présent, les agriculteurs en payaient une partie qui leur était ensuite remboursée. Cette année, nous allons plus loin : ils n'auront même pas à faire cette avance, ce qui représentera une facilité de trésorerie de 250 millions d'euros. Quant aux électro-intensifs, ils bénéficient d'une exonération afin d'éviter la disparition pure et simple d'usines sur notre territoire. Cela étant dit, il faudra bien demain trouver des solutions pour les intégrer dans le système.
Je suis prêt à constituer un groupe de travail associant mon ministère, les associations de collectivités et le ministère de l'économie et des finances sur la contractualisation.