Ce ministère est un ministère d'opérateurs. Les décisions relèvent ensuite du CNRS, en l'espèce. Je peux donner une somme qui correspond à tant d'emplois, chaque opérateur fera ce qu'il estime le plus judicieux - et ce n'est pas un problème selon moi. Il peut juger qu'il n'est pas nécessaire de recruter pour 42 années un spécialiste de telle ou telle discipline.
Un rapport de M. Adnot, justement, a démontré que l'Arpe, sans aucun accompagnement prévu, entraînait surtout des effets d'aubaine. Nous avons proposé aux associations étudiantes que les étudiants bénéficient de la Garantie jeunes, ce qui maintient une forme de financement de jeunes diplômés effectivement accompagnés et en recherche d'emploi. Les associations étudiantes ont validé le fait qu'un volet soit réservé aux étudiants tout juste diplômés afin qu'ils soient vraiment accompagnés dans la recherche d'emploi et qu'ils ne bénéficient pas simplement du maintien de leur bourse.
La question de la culture scientifique, technologique et industrielle revient de façon récurrente. Cette compétence a été transférée majoritairement aux régions par la loi NOTRe ; le reste dépend majoritairement du ministère de la culture. La part assumée par le ministère de l'enseignement supérieur n'est pas détaillée dans le PLF puisqu'elle dépend des budgets des organismes de recherche. Sur le programme 172, pour les 16 organismes de recherche qui contribuent à la culture scientifique, technologique et industrielle, le montant est en hausse de 2,5 millions d'euros. En outre, 125 millions d'euros sont financés sur l'action 13 du programme 150, « diffusion des savoirs et musées ». Dans le cadre de la loi NOTRe, ce financement doit être abondé par les budgets des régions. Je partage la conviction qu'il faut financer mais aussi structurer et valoriser ce qui existe déjà. Je surveillerai le déroulement des choses, car c'est un sujet de société, au-delà du budget.
J'en viens à l'intelligence artificielle. Le vrai problème est le très faible nombre de jeunes attirés par les carrières scientifiques. Aujourd'hui, plus de la moitié des bacheliers scientifiques ne poursuivent pas d'études supérieures scientifiques. Comment intéresser les jeunes à ces disciplines ? On s'imagine, les jeunes filles notamment, qu'un informaticien est un geek à lunettes toujours derrière son ordinateur, qui ne parle à personne. Il faut déconstruire ce cliché.
Ensuite, on voit des jeunes en école d'ingénieurs, en master ou en doctorat en informatique qui n'achèvent pas leurs études car ils sont recrutés avant. En autorisant des carrières mixtes, pour que chacun conserve l'intérêt pour la recherche académique tout en la valorisant par la création de start-ups par exemple, on aurait une chance de garder des compétences académiques suffisantes pour continuer à former les jeunes. C'est un grand enjeu car la situation est inquiétante. Une autre option consiste à aller chercher des compétences dans les pays émergents, qui forment des jeunes excellents, en augmentant l'attractivité internationale des formations et des laboratoires français. Il s'agit de penser à la façon et aux moyens de les accueillir. Ce doit faire l'objet d'un plan global.
Le chantier extrêmement important des droits d'inscription et des bourses ne doit pas être abordé par une hausse massive des frais. Dans notre modèle français d'éducation, les contribuables paient des impôts pour que leurs enfants puissent être éduqués. Nous y sommes attachés.
Nous devons plutôt réfléchir à une aide globale à l'autonomie pour les étudiants. Ce ne pourra probablement pas se faire avant 2020 car nous avons besoin de temps pour élaborer un système qui aide vraiment les étudiants qui le méritent, afin qu'ils ne soient plus obligés de travailler pour payer leurs études. On constate, petit à petit, un décrochage des classes moyennes, dont les enfants n'ont ni bourses ni aides mais qui pourtant n'ont pas assez de moyens pour cela. Si l'on place les aides directes et indirectes en ordonnée et le salaire médian des parents en abscisse, on obtient une courbe en U, or c'est dans le creux du U que se situent le plus grand nombre de familles.
Le budget des EESPIG a augmenté l'an dernier mais il avait diminué dramatiquement avant. Cinq millions d'euros avaient été ajoutés l'an dernier en gestion et nous y avons encore ajouté deux millions d'euros cette année. En outre, les EESPIG font partie des établissements qui bénéficient de la CVEC, ce qui devrait correspondre à environ trois millions d'euros de reversement direct. Cela fait une augmentation supplémentaire totale de cinq millions d'euros : nous avançons.
Julien Denormandie et moi-même, lors d'un déplacement à Aix-en-Provence fin septembre, avons mis en place l'Observatoire national du logement étudiant, qui a pour mission de construire une plateforme sur laquelle figurera, sous forme de carte interactive, l'offre de logements à destination des étudiants dans toute la France. L'idée est, en recensant les logements des Centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous), des bailleurs sociaux et un maximum de logements privés, d'utiliser les financements des 60 000 logements là où c'est vraiment nécessaire, là où la tension sur le marché est générale.
Monsieur Adnot, j'ai tenu mes engagements budgétaires sur 2018 et il ne me paraît pas choquant, voire au contraire de bonne gestion, qu'une partie des crédits non utilisés par le MESRI soient « remis au pot » pour financer par exemple les besoins du ministère de l'intérieur pour la lutte antiterroriste. Nous sommes heureusement sortis de l'époque où, parce que les budgets étaient reconduits automatiquement d'année en année et qu'il s'agissait pour chaque ministère d'obtenir des crédits supplémentaires, on laissait tourner les moteurs pour consommer le budget essence du parc automobile ... Estimer au plus juste les besoins, agir en responsabilité et tenir les budgets, c'est ce que nous avons fait cette année, notamment en mettant des moyens supplémentaires - inédits ! - pour faire face à l'accroissement de la démographie étudiante et c'est ce que l'on continuera à faire l'année prochaine. Aussi n'ai-je pas de crainte particulière sur la capacité du ministère à respecter à nouveau ses engagements en 2019. Je n'ai pas connaissance du chiffre de 200 millions d'euros que vous citez ; je ne doute pas qu'il suscitera des discussions, voire des polémiques, mais l'essentiel me semble que le ministère tienne ses engagements à l'égard de tous ses opérateurs, que leurs missions de service public soient remplies, que leur gestion financière soit saine, et que le budget de l'État soit aussi sincère que possible et respecté en exécution.