Dans le but de retrouver la confiance des consommateurs dans les avis rendus par l'EFSA, la Commission européenne propose une modification des procédures de nomination, des mesures de renforcement de la transparence et des moyens de contrôle, ainsi qu'une augmentation budgétaire.
Le texte vise à renforcer la participation des États membres dans la gouvernance de l'EFSA, en prévoyant que chacun d'entre eux désigne un membre titulaire et un membre suppléant au conseil d'administration, et, au moins, 12 experts scientifiques, qui ne sont pas nécessairement des ressortissants nationaux. Sur cette base, le directeur exécutif établit, pour chaque groupe scientifique, une liste d'experts comportant un nombre de candidats plus élevé que le nombre de membres à nommer, charge au conseil d'administration de procéder à ces nominations.
Si la procédure de désignation des membres du conseil d'administration ne pose pas question, celle des experts appelle deux remarques. Il faut encadrer la possibilité de nommer un scientifique d'une autre nationalité pour éviter qu'un trop grand nombre d'entre eux soit issu d'un même pays ou d'une même institution. Parallèlement à cette désignation par les États membres, l'EFSA devrait pouvoir constituer une liste de candidats à la fonction d'experts à partir d'un appel à manifestation d'intérêt publié dans le Journal officiel de l'Union européenne.
La Commission européenne propose également que les études fournies par les industriels puissent être publiées dès que l'EFSA aura accepté d'étudier la demande de mise sur le marché et déclaré ces études recevables. Cette publication sera faite dans un format de données standard permettant leur exploitation. Les demandes concernant la confidentialité des études devront être justifiées, sachant qu'il est proposé de définir les sujets pour lesquels celle-ci pourra être demandée, et l'EFSA décidera de leur recevabilité. En cas de désaccord, soit l'exploitant retirera sa demande d'autorisation, soit il se pourvoira devant la Cour de justice de l'Union européenne.
Deux points méritent une attention particulière. L'idée de publier les études au moment où la demande d'autorisation est déclarée recevable, plutôt qu'au moment où l'EFSA rend son avis, suscite des inquiétudes chez les exploitants du secteur des produits phytopharmaceutiques, notamment pour des questions de propriété intellectuelle. Il est en outre nécessaire de prévoir un comité d'appel pour trancher les litiges sur le caractère confidentiel de certaines études, afin d'offrir une alternative à la solution judiciaire proposée par la Commission européenne.
S'ajoutent, à ces différentes propositions, la mise en place de contrôles renforcés des études réalisées par les exploitants et des laboratoires, ainsi que la possibilité, pour la Commission européenne, de commander de nouvelles études.
Enfin, le budget de l'EFSA sera augmenté de 62 millions d'euros pour renforcer l'attractivité de l'agence et financer les études de vérification.
En résumé, cette proposition de règlement, plutôt consensuelle, va dans le bon sens. Toutefois, elle n'aborde pas la question de la lutte contre les conflits d'intérêt, qui reste du ressort du conseil d'administration de l'EFSA, ainsi que celle des conditions de recevabilité des études académiques dans le cadre du processus d'évaluation. Les experts ne peuvent se contenter de vérifier que les études fournies respectent certaines normes ; ils doivent pouvoir utiliser pleinement toute la littérature scientifique disponible pour réaliser une véritable évaluation des risques. La question de la coordination des agences reste aussi à traiter.
Pour les produits phytopharmaceutiques, selon la réglementation européenne, la procédure d'examen des substances actives est du ressort de l'Union européenne et la décision de mise sur le marché de celui de l'État membre. Cela crée des distorsions de concurrence, souvent au détriment de nos agriculteurs. Il faudrait donc, à l'échelle de l'Europe, harmoniser les procédures d'évaluation et d'attribution des autorisations de mise sur le marché.
Il faut s'attendre à une profonde refonte du financement des dispositifs d'évaluation. Le public est de plus en plus exigeant - c'est bien normal - mais, aujourd'hui, comme le dit un célèbre économiste de la santé, « la peur est au-dessus de nos moyens ». La rationalisation s'impose, justifiant que certaines pistes soient explorées, comme la création, proposée par l'ANSES, d'un fonds européen pour financer des études conjointes ou la mise en place de partenariats public-privé pour procéder à ces évaluations.