Intervention de Daniel Chasseing

Réunion du 12 novembre 2018 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2019 — Discussion générale

Photo de Daniel ChasseingDaniel Chasseing :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 augmente de 2 %, passant de 396 milliards d’euros en 2018 à 404 milliards d’euros, soit une hausse de 8 milliards d’euros.

Le texte fait apparaître un excédent de 0, 7 milliard d’euros. Il faut remonter en 2001 pour retrouver un excédent, de 0, 8 milliard d’euros. Cela constitue un légitime motif de satisfaction. Parallèlement, la Caisse d’amortissement de la dette sociale se désendette. À la fin de l’année 2019, elle sera encore de 89 milliards d’euros, mais 171 milliards d’euros ont été remboursés, et l’année 2024 verra la fin de la dette de la sécurité sociale. Ce sera une bonne chose pour le pays et pour nos descendants.

L’ONDAM augmente de 2, 5 %, pour atteindre 200, 3 milliards d’euros, ce qui représente une augmentation de 400 millions d’euros par rapport à une hausse de 2, 3 %. Sur les 8 milliards d’euros d’excédent, 5 milliards d’euros vont à l’ONDAM.

En 2019 débutera le plan Santé proposé par le Président de la République, soit 3, 4 milliards d’euros sur quatre ans. Tout cela devrait permettre des actions utiles, comme la suppression du numerus clausus, la possibilité de regagner du temps médical dans les maisons de santé et une meilleure coordination des soins pour mieux répondre aux besoins du patient. Je pense au numérique, aux assistants médicaux, au dossier médical partagé, à la mise en place de communautés professionnelles territoriales de santé, les CPTS, à la poursuite des financements des maisons de santé, à la simplification de l’exercice des remplaçants et aux médecins salariés, qui peuvent avoir une activité libérale.

Le Gouvernement souhaite renforcer la qualité des soins à l’hôpital, avec la restructuration, la baisse de la tarification à l’activité, de nouveaux financements pour les urgences, des innovations thérapeutiques, l’action en faveur de la psychiatrie, les financements pour les pathologies chroniques et la poursuite des préventions. Je pense à la priorité mise sur les dossiers des addictions, des vaccinations, des cancers ou l’obligation des vingt visites pour l’enfance.

Mais, madame la ministre, actuellement, les trois quarts des hôpitaux ont des difficultés financières. Cela menace l’investissement et la réforme. Les directeurs que j’ai rencontrés s’inquiètent ; vous allez demander 500 millions d’euros de gels de crédits, notamment la réserve prudentielle et la sous-exécution de l’ONDAM. Ces crédits étaient auparavant laissés aux hôpitaux. Il faut donc, vous l’avez prévu, des financements pour les investissements. Il faut également revoir la réforme tarifaire. Des économies, autour de 800 millions d’euros, vont être demandées aux établissements. Il va y avoir une augmentation de 4, 5 % des dépenses, pour un ONDAM à 2, 5 %. La diminution du nombre de lits et l’augmentation de l’ambulatoire ne sont pas proportionnelles au nombre d’agents nécessaires. Pour les services mobiles d’urgence et de réanimation, ou SMUR, en rural, ils devraient avoir des dotations, et non un financement à l’acte.

J’en viens au médico-social. Le Gouvernement souhaite favoriser le maintien des personnes âgées à domicile et le soutien des aidants. Je me réjouis de l’augmentation de 50 millions d’euros en faveur des services d’aide à domicile. À propos des EHPAD, il y a un financement pour les infirmières de nuit et hébergements temporaires de 360 millions d’euros sur trois ans, dont 125 millions d’euros en 2019. Madame la ministre, ce qui manque à mes yeux, ce sont des aides-soignantes et des infirmières de jour, pour la prise en charge de personnes âgées de plus en plus dépendantes. Cette somme de 125 millions d’euros ne sera pas suffisante pour bénéficier d’un taux d’encadrement de 0, 7 par pensionnaire en 2019, ce qui est le minimum pour fonctionner. Il est nécessaire de mieux prendre en compte la grille AGGIR par rapport au PATHOS dans le calcul du forfait soins. Aujourd’hui, elle est trop complexe.

Pour les personnes handicapées, la proposition de détecter les troupes du neuro-développement avant l’âge de 3 ans et leur prise en charge est une mesure importante, puisque les familles ne pouvaient pas payer les intervenants : psychologues, psychomotriciens, ergothérapeutes. Cette proposition de détection doit se poursuivre au-delà de 3 et 6 ans. Il est également impératif de détecter des troubles du spectre de l’autisme dans les foyers occupationnels, les maisons spécialisées, pour favoriser l’inclusion, même si c’est très long. Le doublement des entreprises adaptées va dans le bon sens.

Le nombre de personnes handicapées vieillissantes est en augmentation. Il convient de favoriser le maintien à domicile et les aidants. En cas de dépendance, il faut des structures d’accueil, comme l’hébergement en foyer d’accueil médicalisé ou en unité spécifique dans les EHPAD, mais avec une prise en charge différente des personnes âgées ordinaires.

Dans ce PLFSS, le Gouvernement souhaite protéger les plus vulnérables d’entre nous, avec, entre autres, la prise en charge progressive de l’optique-dentaire-audition. C’est un progrès social important. Je salue également la fusion CMU-ACS. Actuellement, le non-recours à l’ACS est de 65 %.

Vous prévoyez aussi des crèches adaptées pour les personnes handicapées. Je peux également mentionner la majoration des montants du complément de mode de garde : 30 % lorsqu’il y a un enfant handicapé dans la famille et prolongation de ce complément jusqu’à l’entrée à l’école. Vont aussi dans le bon sens la création de 30 000 places de crèche, l’augmentation du congé de maternité à huit semaines pour les travailleuses indépendantes et les agricultrices, soit une hausse de trente-huit jours, l’atténuation de la hausse de la CSG pour les revenus à la limite des seuils, avec une augmentation en cas de dépassement de deux ans, la revalorisation des personnes les plus fragiles, avec l’allocation du minimum vieillesse, qui augmente sensiblement, ou les mesures sur l’allocation aux adultes handicapés. Tout cela va donc dans le bon sens.

En revanche, la branche vieillesse et la prestation famille n’augmentent que de 0, 3 %. C’est peu. L’inflation est de 1, 6 % et sera de 1, 3 % en 2019. Il s’agit d’un nouvel effort important demandé aux retraités et aux familles, entraînant une baisse de pouvoir d’achat. Il convient évidemment de limiter tout à fait le déficit de l’État, mais certaines actions, dont l’exonération des heures supplémentaires décidée par le Gouvernement, auraient dû être compensées. Cela va coûter 1, 3 milliard d’euros et aurait permis une augmentation plus importante des branches famille et retraite.

Je rejoins l’avis du rapporteur sur la branche AT-MP. Elle est très bien gérée. Elle sert en partie à l’équilibre de la sécurité sociale. Une partie de cet excédent aurait pu, comme l’indique le rapporteur, améliorer les dispositifs de prévention ou diminuer les cotisations.

Madame la ministre, ce PLFSS veut faire le maximum pour l’emploi et la compétitivité des entreprises.

Je pense à la suppression des cotisations d’assurance maladie, décidée cette année. Cela procure un gain par rapport au paiement de la CSG de 1, 45 %. L’exonération des cotisations sur les heures supplémentaires est une bonne chose. La suppression des cotisations maladie, chômage, vieillesse représente 11, 3 % de pouvoir d’achat en plus pour les salariés. C’est très bien ! Mais on regrette que cette exonération ne soit pas compensée.

Le paiement du CICE aux entreprises, 20 milliards d’euros, est positif pour la trésorerie des entreprises. La transformation du CICE 2019 et du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires, le CITS, en baisses de charges pérennes de cotisations sociales pour les employés, qui correspond à une diminution de six points jusqu’à 2, 5 SMIC, de neuf points outre-mer, avec zéro charge pour le SMIC, va aussi dans le bon sens.

L’exonération des aides à domicile, totale jusqu’à 1, 1 SMIC, dégressive jusqu’à 1, 6 SMIC, c’est très bien. Je salue également l’année blanche pour les créateurs d’entreprise et l’augmentation de la prime d’activité.

Il semblerait qu’il y ait quelques perdants parmi les travailleurs saisonniers. Pour les arboriculteurs, la dégressivité de l’exonération à partir de 1, 15 SMIC est trop basse. Mieux vaudrait revenir au dispositif actuel. Mais tous ces allégements vont, selon nous, dans le bon sens pour l’emploi.

Madame la ministre, nous ne pouvons que souscrire aux objectifs de l’ONDAM et du plan Santé : mettre en place des professionnels dans les maisons de santé, dans les territoires, avec une meilleure coordination entre la ville et l’hôpital, et une amélioration de la qualité des soins dans les hôpitaux.

Néanmoins, il faut tenir compte de la dégradation financière des trois quarts des établissements de santé, qui nécessite une nouvelle tarification et de nouveaux financements. En faveur des EHPAD, il sera nécessaire de consentir davantage d’efforts financiers pour créer des postes complémentaires, au vu de la grande dépendance des pensionnaires, qu’il faut traiter de manière décente.

Pour les personnes handicapées, une importante étape est franchie avec la détection et le traitement, avant l’âge de 3 ans et au-delà. C’est très bien. Mais il reste encore beaucoup à faire, notamment pour l’inclusion et le nombre de places d’hébergement.

Nous souscrivons pleinement à l’amélioration de la santé et de la protection des personnes vulnérables. Nous regrettons la sous-revalorisation des retraites et des prestations famille, de 0, 3 %, ainsi que la non-compensation de la sécurité sociale d’exonérations de charges proposées par le Gouvernement, à hauteur de 1, 3 milliard d’euros. L’adoption d’un amendement de notre groupe tendant à modifier ce dispositif permettrait de revaloriser ces prestations à hauteur de 1 %.

Madame la ministre, nous souhaitons que les dotations et exonérations importantes permettent aux entreprises, avec la formation professionnelle, d’atteindre le plein-emploi.

Dans l’ensemble, nous soutenons l’essentiel des mesures présentées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais nous espérons que certaines dispositions, notamment sur les retraites, le financement hospitalier et les EHPAD, pourront être améliorées, tout en respectant les objectifs du texte.

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