Voilà ce qui la rend possible !
Que demande-t-on au service public ? De permettre aux citoyens d’approcher le sujet en connaissant les diverses voies qui y conduisent. Mais c’est le contraire de ce qui se passe ! Pourquoi ? Ce n’est pas, monsieur del Picchia, parce que tel ou tel journaliste a la carte de tel ou tel parti. En tant que citoyen, c’est bien son droit d’être engagé, et je l’en félicite. Là n’est pas le sujet et, de toute façon, les choses ne se passent pas comme cela.
En vérité, la production de l’information est socialement déterminée. Si vous examinez la composition des rédactions, vous découvrirez une masse X de journalistes ayant un CDI et protégés de cette manière dans l’exercice de leur métier, et une masse Y, beaucoup plus importante, composée d’une foule d’intérimaires et de travailleurs précaires, donc sans aucune des conditions sociales leur permettant de faire valoir leur esprit critique. Par conséquent, remonte du bas vers le haut un conformisme socialement contraint, auquel personne ne peut se soustraire !
La défense du pluralisme politique concerne donc non seulement l’objet final de ce qui est produit, mais aussi les conditions initiales de la production de l’information dans les entreprises publiques. Voilà pourquoi ces deux questions se touchent et, que l’on soit de droite ou de gauche, on a raison de dire qu’il s’agit là d’un bien commun.
Une information factuelle, une information qui éclaire le point de vue des citoyens, est préférable au martèlement d’un point de vue unique, quel qu’il soit d’ailleurs, qu’il concerne les orientations politiques au sens le plus étroit du terme ou philosophiques au sens plus large.
Nous ne gagnons rien à ce que la parole officielle, en tout cas ressentie comme telle par nos concitoyens – « C’est vrai puisque c’est dans le journal ! », disait-on autrefois –, soit perçue comme un discours unique, parce que vous n’empêcherez pas la diversité de s’exprimer dans la société et d’être ressentie de manière confuse, au détriment, pour finir, de la démocratie elle-même, si les citoyens finissent par penser que toute parole qui leur est proposée est un mensonge ou un trafic.
Veillons donc aux conditions sociales de la production de l’information. Soyons vigilants en rappelant le principe du pluralisme politique comme l’accomplissement de ce travail politique. Alors, nous aurons fait de la bonne besogne.
Et n’allez pas dire qu’ici quelqu’un veut contrôler les cartes de parti, parce que, finalement, c’est très facile à faire : tous ceux qui sont au placard sont de gauche et tous les autres sont de droite !