Membre de cette commission, je m'étais étonné jusqu'à présent du fait, qu'à une exception près, la présentation du budget de l'enseignement agricole ait échu au ministre de l'éducation nationale. Or, l'enseignement agricole est un joyau qui doit demeurer au ministère de l'agriculture et je suis fier de vous le présenter, comme ministre de l'agriculture, pour la première fois !
Ce budget représente 35 % du budget global du ministère de l'agriculture et de l'alimentation soit près de 1,8 milliard d'euros : 315 millions d'euros pour l'enseignement supérieur et la recherche et 1,47 milliard d'euros pour l'enseignement technique. Il mobilise également 60 % des fonctionnaires du ministère. Outre une mission de formation et d'insertion professionnelle, le législateur lui a également confié des missions d'animation du territoire, d'expérimentation et de coopération internationale tout à fait spécifiques.
L'enseignement technique agricole, ce sont 800 établissements et 160 000 jeunes scolarisés de la 4ème au BTS. 40 % le sont dans des établissements publics et les autres se répartissent également entre les maisons familiales rurales (MFR) et les lycées privés. Il compte également 34 000 apprentis et forme 250 000 adultes. Je veux ainsi être le ministre de toutes ces formations, comme je l'ai signalé à plusieurs reprises. Aujourd'hui, l'enseignement agricole ne compte plus que 10 % d'enfants d'agriculteurs mais joue un rôle majeur dans la formation des jeunes de milieu modeste des zones rurale et périurbaine auxquels il offre de bons taux de réussite aux examens et des taux d'insertion professionnelle remarquable. L'enseignement agricole a considérablement évolué pour répondre aux nouveaux besoins du monde rural et périurbain : 40 % des formations sont en lien avec l'agriculture, les industries agroalimentaires, la filière forêt bois et les métiers de l'environnement et des paysages, 30 % concernent les services à la personne et aux territoires et 30 % consistent en des formations générales et technologiques. La plupart des jeunes qui rejoignent nos établissements ne se destinent donc pas à devenir agriculteurs, mais à exercer une profession dans le secteur de l'environnement, de l'alimentation ou des services à la personne.
J'ai souhaité faire de l'enseignement et de la recherche l'une des priorités de mon action au ministère de l'agriculture et de l'alimentation. En effet, la jeunesse, qui représente l'avenir de notre pays, l'avenir de nos filières et de nos territoires, est la priorité du Gouvernement. La formation, l'expérimentation et l'innovation sont les leviers indispensables de la transformation agro-écologique de notre agriculture et de nos filières. Comme l'a dit le Président de la République, l'enseignement agricole est à la fois un système qui fonctionne et une voie de réussite et d'excellence. Il obtient d'excellents résultats en termes de réussite aux examens, d'insertion professionnelle et forme des citoyens épanouis et ouverts sur l'Europe et sur le monde.
C'est pourquoi je voudrais affirmer aujourd'hui trois ambitions fortes pour l'enseignement agricole. Première ambition : l'enseignement agricole doit former plus de jeunes. Malheureusement, il en accueille, d'année en d'année, de moins en moins ! Un défaut de communication est manifeste ; les jeunes ne connaissant pas ses filières. Il faut ainsi améliorer l'orientation des jeunes, en lien avec l'éducation nationale, et renforcer l'attractivité de ses métiers. Je souhaite que les filières - l'une relative à l'environnement et l'autre sanitaire - évoquées lors des États généraux de l'alimentation soient créées.
Deuxième ambition : l'enseignement agricole doit participer à la transformation de notre agriculture, de nos filières et de nos territoires. La performance économique, sociale, environnementale et sanitaire représente des attentes à la fois du législateur et de la société. L'enseignement agricole représente un levier essentiel pour répondre à ces attentes, transformer notre système productif et réaliser cette transition irréversible vers l'agro-écologie.
Troisième ambition : faire confiance aux établissements, aux acteurs locaux, pour répondre aux besoins de tous les territoires. Les programmes et les formations peuvent être adaptés à l'échelon territorial. Il faut donner davantage d'autonomie aux établissements agricoles pour qu'ils s'adaptent au contexte local et répondent aux souhaits des jeunes. Ce mouvement est déjà largement engagé dans l'enseignement agricole, puisque les équipes enseignantes disposent de 20 à 25 % d'heures non affectées dans les référentiels pour mener des projets locaux. Je souhaite que ce quota d'heures soit augmenté. C'est grâce à cette souplesse accrue que nous réaliserons le schéma d'emplois qui est demandé, avec une baisse de 50 équivalents temps plein (ETP) qui n'induira ni mutation dans l'intérêt du service, ni fermeture nette de classe.
Je souhaite également réussir les réformes en cours, tant celle du baccalauréat que de l'apprentissage, qui constitue une opportunité formidable de réussite dans le secteur de l'agriculture.
Je voudrais également évoquer la recherche et l'enseignement supérieur agricole. Le rapprochement entre l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) va permettre de disposer, au 1er janvier 2020, d'un acteur de premier rang mondial dans les domaines de l'agronomie, des sciences du vivant et de l'environnement. Dans le même esprit, la fin de la mandature va notamment être marquée par le transfert d'AgroParisTech à Saclay, le rapprochement des écoles agronomiques et la recherche de synergies entre nos quatre écoles vétérinaires, afin de refonder notre enseignement vétérinaire et de mieux répondre aux besoins de la ruralité.
Le budget du programme 143 connait une légère hausse (+1,44 %), soit 25 millions d'euros supplémentaires, par rapport à celui de l'an passé. Pour l'enseignement supérieur, cette dotation permettra d'augmenter de deux millions d'euros, soit de 2,5 %, les crédits de fonctionnement de nos écoles, ce qui permettra d'accueillir davantage d'étudiants dans de bonnes conditions et d'augmenter de 5,5 millions d'euros, soit 2,6 % de hausse, les rémunérations des personnels. Pour l'enseignement technique, le ministère dispose de huit millions d'euros de plus pour accompagner les établissements privés du temps plein et les maisons familiales rurales. Cet effort est important, compte tenu de la baisse des effectifs du privé - 12 600 jeunes en moins depuis 2011 -, et permettra de rapprocher la dépense publique par élève entre l'enseignement public et privé. Les systèmes d'information seront aussi modernisés. La hausse des crédits de personnels permettra d'améliorer la situation des enseignants et non enseignants de l'enseignement agricole, ce qui renforcera l'attractivité de ces métiers. Par ailleurs, les crédits consacrés au handicap augmentent de 44 % et 25 ETP d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont créés pour un montant de 700 000 euros.
Nous réussirons notre mandature en agriculture si, à la fin du quinquennat, plus d'élèves rejoignent l'enseignement agricole. Nous aurons alors transformé notre modèle agricole pour répondre aux nouvelles attentes.