Nous vous souhaitons, monsieur le ministre, la bienvenue dans cette salle que vous connaissez bien puisque vous êtes, pour quelques jours encore, membre de notre commission, et vous félicitons chaleureusement pour votre nomination.
Nous vous recevons aujourd'hui en vue de l'examen, par le Sénat, des crédits consacrés, dans le projet de loi de finances pour 2019, à l'enseignement agricole et à la recherche agricole.
Membre de cette commission, je m'étais étonné jusqu'à présent du fait, qu'à une exception près, la présentation du budget de l'enseignement agricole ait échu au ministre de l'éducation nationale. Or, l'enseignement agricole est un joyau qui doit demeurer au ministère de l'agriculture et je suis fier de vous le présenter, comme ministre de l'agriculture, pour la première fois !
Ce budget représente 35 % du budget global du ministère de l'agriculture et de l'alimentation soit près de 1,8 milliard d'euros : 315 millions d'euros pour l'enseignement supérieur et la recherche et 1,47 milliard d'euros pour l'enseignement technique. Il mobilise également 60 % des fonctionnaires du ministère. Outre une mission de formation et d'insertion professionnelle, le législateur lui a également confié des missions d'animation du territoire, d'expérimentation et de coopération internationale tout à fait spécifiques.
L'enseignement technique agricole, ce sont 800 établissements et 160 000 jeunes scolarisés de la 4ème au BTS. 40 % le sont dans des établissements publics et les autres se répartissent également entre les maisons familiales rurales (MFR) et les lycées privés. Il compte également 34 000 apprentis et forme 250 000 adultes. Je veux ainsi être le ministre de toutes ces formations, comme je l'ai signalé à plusieurs reprises. Aujourd'hui, l'enseignement agricole ne compte plus que 10 % d'enfants d'agriculteurs mais joue un rôle majeur dans la formation des jeunes de milieu modeste des zones rurale et périurbaine auxquels il offre de bons taux de réussite aux examens et des taux d'insertion professionnelle remarquable. L'enseignement agricole a considérablement évolué pour répondre aux nouveaux besoins du monde rural et périurbain : 40 % des formations sont en lien avec l'agriculture, les industries agroalimentaires, la filière forêt bois et les métiers de l'environnement et des paysages, 30 % concernent les services à la personne et aux territoires et 30 % consistent en des formations générales et technologiques. La plupart des jeunes qui rejoignent nos établissements ne se destinent donc pas à devenir agriculteurs, mais à exercer une profession dans le secteur de l'environnement, de l'alimentation ou des services à la personne.
J'ai souhaité faire de l'enseignement et de la recherche l'une des priorités de mon action au ministère de l'agriculture et de l'alimentation. En effet, la jeunesse, qui représente l'avenir de notre pays, l'avenir de nos filières et de nos territoires, est la priorité du Gouvernement. La formation, l'expérimentation et l'innovation sont les leviers indispensables de la transformation agro-écologique de notre agriculture et de nos filières. Comme l'a dit le Président de la République, l'enseignement agricole est à la fois un système qui fonctionne et une voie de réussite et d'excellence. Il obtient d'excellents résultats en termes de réussite aux examens, d'insertion professionnelle et forme des citoyens épanouis et ouverts sur l'Europe et sur le monde.
C'est pourquoi je voudrais affirmer aujourd'hui trois ambitions fortes pour l'enseignement agricole. Première ambition : l'enseignement agricole doit former plus de jeunes. Malheureusement, il en accueille, d'année en d'année, de moins en moins ! Un défaut de communication est manifeste ; les jeunes ne connaissant pas ses filières. Il faut ainsi améliorer l'orientation des jeunes, en lien avec l'éducation nationale, et renforcer l'attractivité de ses métiers. Je souhaite que les filières - l'une relative à l'environnement et l'autre sanitaire - évoquées lors des États généraux de l'alimentation soient créées.
Deuxième ambition : l'enseignement agricole doit participer à la transformation de notre agriculture, de nos filières et de nos territoires. La performance économique, sociale, environnementale et sanitaire représente des attentes à la fois du législateur et de la société. L'enseignement agricole représente un levier essentiel pour répondre à ces attentes, transformer notre système productif et réaliser cette transition irréversible vers l'agro-écologie.
Troisième ambition : faire confiance aux établissements, aux acteurs locaux, pour répondre aux besoins de tous les territoires. Les programmes et les formations peuvent être adaptés à l'échelon territorial. Il faut donner davantage d'autonomie aux établissements agricoles pour qu'ils s'adaptent au contexte local et répondent aux souhaits des jeunes. Ce mouvement est déjà largement engagé dans l'enseignement agricole, puisque les équipes enseignantes disposent de 20 à 25 % d'heures non affectées dans les référentiels pour mener des projets locaux. Je souhaite que ce quota d'heures soit augmenté. C'est grâce à cette souplesse accrue que nous réaliserons le schéma d'emplois qui est demandé, avec une baisse de 50 équivalents temps plein (ETP) qui n'induira ni mutation dans l'intérêt du service, ni fermeture nette de classe.
Je souhaite également réussir les réformes en cours, tant celle du baccalauréat que de l'apprentissage, qui constitue une opportunité formidable de réussite dans le secteur de l'agriculture.
Je voudrais également évoquer la recherche et l'enseignement supérieur agricole. Le rapprochement entre l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) va permettre de disposer, au 1er janvier 2020, d'un acteur de premier rang mondial dans les domaines de l'agronomie, des sciences du vivant et de l'environnement. Dans le même esprit, la fin de la mandature va notamment être marquée par le transfert d'AgroParisTech à Saclay, le rapprochement des écoles agronomiques et la recherche de synergies entre nos quatre écoles vétérinaires, afin de refonder notre enseignement vétérinaire et de mieux répondre aux besoins de la ruralité.
Le budget du programme 143 connait une légère hausse (+1,44 %), soit 25 millions d'euros supplémentaires, par rapport à celui de l'an passé. Pour l'enseignement supérieur, cette dotation permettra d'augmenter de deux millions d'euros, soit de 2,5 %, les crédits de fonctionnement de nos écoles, ce qui permettra d'accueillir davantage d'étudiants dans de bonnes conditions et d'augmenter de 5,5 millions d'euros, soit 2,6 % de hausse, les rémunérations des personnels. Pour l'enseignement technique, le ministère dispose de huit millions d'euros de plus pour accompagner les établissements privés du temps plein et les maisons familiales rurales. Cet effort est important, compte tenu de la baisse des effectifs du privé - 12 600 jeunes en moins depuis 2011 -, et permettra de rapprocher la dépense publique par élève entre l'enseignement public et privé. Les systèmes d'information seront aussi modernisés. La hausse des crédits de personnels permettra d'améliorer la situation des enseignants et non enseignants de l'enseignement agricole, ce qui renforcera l'attractivité de ces métiers. Par ailleurs, les crédits consacrés au handicap augmentent de 44 % et 25 ETP d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont créés pour un montant de 700 000 euros.
Nous réussirons notre mandature en agriculture si, à la fin du quinquennat, plus d'élèves rejoignent l'enseignement agricole. Nous aurons alors transformé notre modèle agricole pour répondre aux nouvelles attentes.
Nous avons entendu, ces quinze derniers jours, l'ensemble des acteurs de l'enseignement agricole, y compris le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Je voudrais vous remercier d'avoir consacré votre première visite ministérielle à des établissements de l'enseignement agricoles dans l'Isère. C'est là un gage de l'importance que vous lui accordez.
Année après année, nous assistons à la diminution du nombre d'élèves, qui devrait passer cette année sous la barre des 160 000, franchie dans les années 1990. Quelle politique allez-vous mener pour rendre à l'enseignement agricole sa vitalité et son attractivité ? Que ferez-vous pour réhabiliter une image encore trop dévalorisante ?
Par ailleurs, la coopération avec l'éducation nationale est un sujet qui me tient particulièrement à coeur, par exemple en matière de remplacement, d'accompagnement d'élèves en situation de handicap ou d'orientation. Comme me le faisait remarquer l'un de mes interlocuteurs, tous les élèves de l'enseignement agricole sont issus de l'éducation nationale. Quel regard portez-vous sur la coopération avec le ministère de l'éducation nationale ? Quelles perspectives souhaitez-vous lui donner ?
Enfin, j'ai été saisi, à plusieurs reprises, de la question du statut des directeurs d'établissement public, qui sont une des chevilles ouvrières de l'enseignement agricole. Si l'hypothèse d'un corps interministériel semble définitivement écartée, comment comptez-vous renforcer l'attractivité des fonctions de directeur d'établissement ?
Mon premier déplacement ministériel s'est déroulé dans plusieurs établissements : un lycée d'enseignement public, un lycée d'enseignement privé et une maison familiale rurale situés dans deux départements. La baisse du nombre d'élèves doit être enrayée. La communication sur les métiers de l'enseignement agricole est essentielle : les formations dispensées ne se limitent pas au seul métier d'agriculteur et préparent notamment aux métiers de services en milieu rural. Je partage votre constat quant à l'importance de la coopération avec l'éducation nationale pour l'orientation des élèves.
Le statut des directeurs d'établissement est essentiel. Si la création d'un corps spécifique destiné aux directeurs d'établissement a été refusée par le ministre en charge de l'action et des comptes publics, le projet d'un statut d'emploi rénové a été, l'année passée, élaboré en concertation avec les organisations syndicales. Ce projet, dont le ministère de l'action et des comptes publics a été saisi en août 2018, prévoit la création d'une grille indiciaire rénovée en fonction du protocole sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR) en vigueur pour les personnels de direction de l'éducation nationale. La réponse du guichet unique devrait intervenir au cours des prochaines semaines. Conscient de l'importance de fournir des gages de reconnaissance aux directeurs, je suis favorable à ce qu'ils aient un statut.
Les États-généraux de l'alimentation ont suscité de réels espoirs au sein de la profession agricole, que la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « EGALIM » a très vite anéantis. L'attractivité des métiers agricoles représente un réel enjeu. Or, les attaques médiatiques récurrentes sur les pratiques agricoles et les agriculteurs nuisent considérablement à l'image du métier et à l'enseignement agricole. Comment comptez-vous, au sein de ce Gouvernement où les sensibilités sur l'agriculture peuvent diverger, revaloriser globalement l'enseignement agricole ?
Si les attaques contre l'agriculture se multiplient, nous n'y parviendrons pas ! Je veux être le bouclier des agriculteurs et des agricultrices qui sont souvent des bouc-émissaires. Non ! Les agriculteurs ne sont pas des empoisonneurs ! Leurs pratiques ont évolué : l'utilisation de l'eau a baissé de 30 % en quinze ans et la transition vers l'agro-écologie est une réalité. Les instituts de recherche travaillent également à l'élaboration de nouvelles méthodes destinées à réduire l'utilisation des produits phytosanitaires. Les États-généraux ont généré de réels espoirs et la loi EGALIM, qui vient d'être promulguée, sera progressivement mise en application. La qualité sanitaire et alimentaire des produits de l'agriculture française est réelle. Certes, des progrès peuvent encore être réalisés : une étude de notre ministère indique l'augmentation sur ces trois dernières années de l'utilisation des produits phytosanitaires, en dépit des plans Écophytos. Le travail conduit par les organisations syndicales agricoles, et notamment la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) avec ses contrats de solution, ainsi que les perspectives ouvertes par la « start-up nation pour les bonnes pratiques » lancée par le Président de la République, devrait bénéficier à l'agronomie sur notre territoire, alors que la sortie du glyphosate a été annoncée pour 2020. Enfin, il faut réconcilier le rural et l'urbain, et avec eux, l'agriculture et la société, ainsi que l'agriculteur et son voisin.
Les motivations de la fusion de l'INRA avec l'IRSTEA sont-elles avant tout scientifiques ? Les personnels sont inquiets. Me confirmez-vous que cette fusion bénéficiera des crédits supplémentaires à hauteur des 4,8 millions d'euros qui ont été annoncés ?
L'IRSTEA et l'INRA sont deux instituts de taille distincte aux compétences complémentaires. Un travail remarquable a été conduit en interne. Il ne s'agit pas d'une fusion motivée par des considérations strictement budgétaires, mais d'une démarche visant à obtenir l'excellence mondiale. Cette fusion n'implique aucune réduction ni de budget ni du nombre de postes. Ces deux instituts travaillent également de concert pour déterminer leur implantation optimale. Les chercheurs sont les plus à même de se prononcer sur les modalités concrètes de cette fusion qui contribue à notre primauté en agronomie.
Que vont devenir les petits centres de formation d'apprentis (CFA) en secteur rural, avec la disparition des financements régionaux ? La baisse annoncée du nombre d'ETP devrait conduire à la fermeture du centre d'application de l'école vétérinaire de Maisons-Alfort situé à Champignelles, dans le département de l'Yonne, dont le CFA est également menacé. En outre, si la dotation budgétaire de la scolarisation des élèves en situation de handicap devrait connaître une hausse, de l'ordre de 3,4 millions d'euros, l'aide sociale devrait, quant à elle, connaître une baisse de 12 millions d'euros. Celle-ci concernera les bourses et les fonds sociaux, alors que la part des élèves boursiers dans l'enseignement agricole demeure plus élevée que dans les établissements de l'éducation nationale.
Les agriculteurs de mon département des Alpes de Haute-Provence expérimentent, en coopération avec les instituts de recherche, de nouvelles techniques au service d'une agriculture plus durable et économe en eau. Faute de pouvoir consacrer la totalité de leur temps à la recherche, ces agriculteurs ne sont pas éligibles au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Or, les recherches qu'ils conduisent participent à la transition vers une agriculture biologique et durable. Avez-vous l'intention de promouvoir des appels d'offres spécifiques et d'associer plus étroitement, y compris financièrement, les groupements d'agriculteurs engagés dans une telle démarche ?
Nous vous avons entendu, comme sénateur, lors du débat sur la loi sur l'alimentation et l'agriculture. L'agriculture aborde un tournant essentiel de son histoire. La formation est cruciale pour accompagner ces agriculteurs qui ne doivent être ni culpabilisés ni laissés seuls face aux défis qui sont immenses. L'enseignement agricole est essentiel à tous nos territoires ainsi qu'à notre conception de la République et à nos racines paysannes. Cependant, le projet de loi de finances rectificative pour 2018 prévoit une suppression de 5 millions d'euros de crédits du programme 142. Cette mesure, dont vous n'êtes pas responsable, s'inscrit à l'inverse de nos convictions communes. C'est là un signal préjudiciable à l'ensemble de l'enseignement et de la recherche agricoles.
J'ai rencontré les représentants syndicaux sur le statut des directeurs d'établissement. L'appartenance à un corps leur permettrait d'accéder à la mobilité, y compris vers l'éducation nationale. J'ai pris note de votre volonté de faire avancer ce dossier, même si la création de nouveaux corps ne semble guère dans l'air du temps.
L'enseignement agricole ne manquera pas de subir, à moyen terme, les conséquences de la baisse des élèves annoncée dans l'enseignement primaire. Or, de nombreux projets voient le jour, comme, dans la région Bourgogne-Franche-Comté, le lancement d'un logiciel de gestion de parcs forestiers par le numérique, l'inclusion des MFR dans Erasmus, ou encore la création d'un nouveau campus des métiers et qualifications agricoles à Vesoul. Or, ces initiatives se heurtent parfois à la pesanteur de l'éducation nationale : la Bourgogne et la Franche-Comté ont chacune un recteur, ce qui complexifie la situation. Pourrez-vous désigner un chef de file sur de tels projets ?
Les élèves de l'enseignement agricole doivent bénéficier de l'ensemble des formations disponibles. Le ministre de l'éducation nationale a annoncé que sur les 16 millions d'euros consacrés aux dispositifs d'échanges internationaux, 2 millions d'euros abonderont les programmes portés par l'Office franco-allemand de la jeunesse (OFAJ) et l'Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ). Les établissements et les enseignants doivent y être impliqués. L'enseignement agricole pourra-t-il bénéficier de ces financements ?
Votre arrivée au ministère se fait dans un contexte budgétaire contraint. En 2012, l'un de vos prédécesseurs, Stéphane Le Foll, avait annoncé la création de 1 250 postes durant le précédent quinquennat. Vos ambitions pour l'enseignement agricole nous sont connues. La réforme du baccalauréat pourrait entraîner, selon les organisations syndicales, une perte de près de soixante postes pour l'enseignement agricole. En outre, comment l'enseignement agricole peut-il contribuer à faire de l'agro-écologie une priorité ? Enfin, comment comptez-vous assurer la promotion des femmes dans l'enseignement agricole ?
Toutes les questions auxquelles je ne suis pas en mesure de répondre, du fait de ma prise de poste récente, feront l'objet de réponses écrites.
La formation professionnelle suscite l'inquiétude. J'ai réuni l'ensemble des formateurs de l'enseignement public de mon ministère, avec la ministre du travail, pour aborder ce sujet. Les CFA, qui peuvent soulever des fonds, disposent de moyens de financement plus importants que d'autres structures. La situation du centre que vous évoquiez m'est connue et je vais essayer d'y répondre. Le budget pour 2019 prévoit une dotation de 600 000 euros pour les CFA, sans présager du soutien des régions.
La région soutient déjà, avec 100 000 euros annuels, le CFA de Champigneulles !
L'effort de réduction de 50 ETP est partagé entre l'enseignement public et privé. Si les exploitations agricoles ne sont pas exclues du CICE, encore faut-il qu'elles en respectent les critères ! La simplification de ce dispositif ne me paraît cependant pas souhaitable.
Le transfert de 5 millions d'euros vers l'enseignement technique, que prévoit le projet de loi de finances rectificative, n'aura guère d'incidence sur les activités de notre ministère.
La création d'un corps spécifique aux directeurs des établissements d'enseignement agricole, actuellement débattue, me paraît une première forme de reconnaissance.
La baisse des effectifs de l'enseignement primaire nous pose en effet problème. La communication sur nos filières et nos métiers est, encore une fois, essentielle pour inciter les jeunes à rejoindre l'enseignement agricole, qui est également le champion d'Erasmus Plus. Cette réussite doit perdurer tant ces échanges permettent souvent à des jeunes, issus de milieux défavorisés, de partir pour l'étranger pour la première fois.
Durant le quinquennat précédent, 1 250 ETP ont été créés. Aujourd'hui, le nombre d'enseignants dont nous disposons est suffisant à l'exercice de nos missions.
L'agro-écologie figure déjà dans les programmes de l'enseignement agricole. Je souhaite que la transition environnementale et sanitaire y soit également incluse, dès l'année prochaine. La promotion des femmes est problématique dans les métiers de base de l'agriculture, tandis qu'elle est plutôt assurée dans les formations du supérieur. Si des mesures ont déjà été prises, en concertation avec Marlène Schiappa et Stéphane Travert, sur les congés maternité et les remplacements, d'autres progrès sont encore nécessaires.
Les dernières réformes de l'enseignement général induisent des conséquences sur l'enseignement agricole. Les inquiétudes suscitées par la dernière réforme du baccalauréat général a cristallisé des inquiétudes dans les filières techniques. J'ai, à ce sujet, interpellé Jean-Michel Blanquer lors du débat initié par notre commission, le 3 octobre dernier.
En outre, la loi relative à la liberté de choisir son avenir professionnel a semé le trouble dans plusieurs CFA ruraux, notamment publics, du fait de leurs futures difficultés de financement.
Quelle sera la répartition entre l'enseignement agricole public et privé de la suppression des 50 ETP ? Par ailleurs, les maisons familiales rurales ne sont pas des lieux où l'apprentissage est tourné vers l'agriculture, mais plutôt vers les services à la personne, ce qui n'est pas sans créer de la confusion lors de l'examen du budget consacré à l'enseignement agricole. En outre, le rapport sur le métier d'enseignant, établi avec mon collègue Max Brisson, n'abordait pas l'enseignement agricole, du fait de ses spécificités, tant de ses enseignements que de ses personnels.
Dans son rapport de 2018 sur la thématique « femmes et agriculture : pour l'égalité dans les territoires », la délégation aux droits des femmes du Sénat a émis de nombreuses préconisations dont l'une, sur le congé maternité, a été reprise par Madeleine Schiappa. Ne vous privez pas d'aller chercher de bonnes idées dans ce rapport toujours pertinent !
Comment les 44 % des moyens supplémentaires pour les élèves en situation de handicap seront-ils répartis entre l'enseignement public et privé ? À quelle échéance le nouveau statut de directeur d'établissement d'enseignement agricole sera-t-il instauré ? Enfin, selon quels critères les 38 postes d'enseignement seront-ils supprimés ?
Les lycées aquacoles bénéficient d'équipements et de partenariats spécifiques. Leur relation avec le ministère en charge de l'écologie ne doit-elle pas être affirmée ? Le budget consacré aux actions culturelles et sportives au sein de ces établissements doit également être amputé de 500 000 euros au profit du compte d'affectation spéciale consacré aux pensions. Ne risque-t-on pas d'entraîner la suppression pure et simple de telles activités, malgré leur importance pour les élèves ?
La filière équine forme depuis le certificat d'aptitude professionnelle (CAP) jusqu'au niveau Master. Elle représente 180 000 emplois. Son financement est spécifique puisqu'il repose à la fois sur le fonds éperon et les recettes du PMU. L'actuelle remise en cause de son financement risque de fragiliser cette filière et de menacer, plus largement, la situation des jeunes qui y sont scolarisés et y trouvent un avenir. En outre, l'excellence de la recherche dans la filière équine est reconnue, comme en témoignent les travaux réalisés dans le centre de Goustranville sur les cartilages qui peuvent avoir des applications sur l'homme. Je compte sur votre soutien pour cette filière qui rassemble également une grande diversité d'exploitations !
L'enseignement agricole dépend de mon ministère. J'assume d'ailleurs mes propos de l'année dernière. La loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel suscite de nombreuses questions au sein de la filière professionnelle.
S'agissant des CFA, ils pourront trouver d'autres financements, en complément de celui des régions qui continueront de pouvoir les aider.
La baisse du nombre d'élèves est plus forte dans le privé que dans le public. Je suis un ardent défenseur des maisons familiales rurales depuis de nombreuses années. Celles-ci proposent non seulement des formations qualifiantes dans les services en milieu rural et dans l'agriculture, mais aussi des passerelles vers l'enseignement supérieur.
Je ne manque jamais d'être inspiré par les travaux du Sénat, et notamment par ce rapport de la délégation sénatoriale au droit des femmes. Si l'enseignement agricole accueille, à parité, les garçons et les filles, les écoles vétérinaires accueillent désormais 80 % de femmes par promotion. Les syndicats vétérinaires m'ont alerté sur les risques de pénurie à terme de vétérinaires en milieu rural, puisque la majorité des jeunes praticiens choisissent d'exercer en ville, à la fin de leurs études. Or, le milieu rural a besoin de vétérinaires privés travaillant aux côtés des vétérinaires publics !
Je souhaite que la question du statut spécifique aux directeurs d'enseignement agricole soit réglée en 2019. Mon approche consiste à dire rapidement aux directeurs si un statut est mis en place ou si on y renonce clairement.
Le handicap est une priorité de la mandature. La convention signée avec le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse au salon international de l'agriculture de février dernier comporte un volet sur l'accompagnement des jeunes en situation de handicap. Le ministère accueille également un grand nombre de jeunes en situation de handicap, dans le cadre des projets personnalisés de scolarisation (PPS), passés de 1 400 en 2010 à 4 200 lors de cette rentrée. Le ministère a obtenu de nouveaux moyens qui se traduisent, dès le PLF 2019, et vise, d'une part, la transformation sur cinq ans des contrats aidés en contrats d'accompagnant d'élèves en situation de handicap (AESH) ; d'autre part, l'augmentation des crédits de personnels à hauteur de 25 ETP pour des contrats à durée indéterminée d'AESH et, enfin, la régulation des contrats AESH, qui ne seraient pas sur la base d'une durée de travail, de 39 à 45 semaines.
Je n'oublie pas les lycées aquacoles. La création d'un réseau de lycées de la mer, sous l'égide du ministère de l'agriculture et du ministère de la transition écologique et solidaire, vient de faire l'objet d'un rapport de l'inspection générale.
J'ai été interpellé par le président de la région Normandie sur la filière équine. C'est un sujet qui mérite d'être approfondi. La formation au sein de la filière équine est de qualité et les débouchés de sa recherche sont en effet nombreux.
Nous vous remercions, monsieur le ministre, d'avoir répondu à notre invitation. Vous êtes le deuxième ministre de l'agriculture que nous auditionnons. Nous espérons désormais avoir l'occasion d'échanger régulièrement avec vous sur l'enseignement agricole à l'occasion du débat budgétaire.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 19 h 25.