Je rappelle qu’il s’agit d’un dispositif complexe par essence, qui s’est traduit dans le droit de manière complexe. Le Conseil d’État a cherché à en simplifier la rédaction, mais il n’a finalement rien trouvé à y redire. J’en ai été moi-même surprise… Cela témoigne du talent des services du ministère !
Madame Cohen, vous estimez qu’il est risqué d’ouvrir les ATU aux extensions d’indication. J’ai beaucoup fréquenté les associations de malades du cancer – il s’agit essentiellement ici de médicaments anticancéreux innovants –, et j’ai rarement entendu réclamer que l’on temporise avant de rendre des médicaments innovants accessibles aux patients ! Ce fut un enjeu majeur aux débuts de l’immunothérapie, qui a d’abord été développée pour traiter une pathologie très rare, le mélanome malin, avant de susciter un intérêt croissant pour un très grand nombre d’autres maladies. Pour les patients atteints d’un cancer du poumon métastatique, qui ne pouvaient accéder au médicament parce que l’AMM délivrée en France ne visait que les patients atteints de mélanome et qui ont dû attendre un an la fin de la procédure d’AMM au niveau européen, je peux vous dire que la situation était intenable…
Si nous proposons d’ouvrir le dispositif des ATU aux extensions d’indication, c’est parce que de nouvelles classes de médicaments sont apparues. Auparavant, on développait un médicament pour une indication thérapeutique ; aujourd’hui, on a des médicaments présentant une efficacité thérapeutique très transversale, et les extensions d’indication se succèdent. C’est pourquoi nous proposons d’adapter le dispositif des ATU à un nouveau type de médicaments, beaucoup moins spécifiques que les médicaments habituels. Il s’agit à mon sens d’un service que nous rendons aux malades, et cela ne réduit en rien la sécurité. Le dispositif est exactement le même que pour une ATU primaire.
Enfin, certains médicaments excessivement innovants –je pense notamment aux CAR-T cells, qui relèvent de la thérapie génique et cellulaire –, aux effets secondaires absolument inconnus et parfois cataclysmiques, doivent être mis exclusivement dans des mains expertes, qui capitaliseront sur l’expertise pour permettre une meilleure utilisation à l’avenir : c’est un enjeu de sécurité, il ne s’agit nullement de restreindre l’accès à ces médicaments.