Chacun doit en avoir conscience : sur les 100 % de dépenses publiques toutes administrations publiques confondues, on attribue 20 % des dépenses aux collectivités locales, 30 % à l’État, voire même un tout petit peu moins, et un peu plus de 50 % à la sécurité sociale.
Un ministre du budget qui ne serait pas ministre des comptes publics ne pourrait utiliser que 30 % des crédits publics, sachant en outre que vous nous demandez en ce moment même de ne pas toucher aux collectivités locales, opinion que je peux partager et que le Gouvernement dans son ensemble partage d’ailleurs, puisqu’aucune économie ne sera faite aux dépens des collectivités locales. Il ne resterait donc plus que 30 % des crédits pour atteindre les objectifs politiques que vous nous demandez d’atteindre.
J’ajoute que l’État a déjà fait énormément d’efforts. S’il peut encore en faire quelques-uns, je vous l’accorde, c’est bien entendu sur les 50 % de dépenses publiques dont nous débattons aujourd’hui.
Affirmer cela, ce n’est pas nier l’autonomie de la sécurité sociale, ce n’est pas nier le paritarisme. C’est simplement dire que l’on ne peut pas baisser la dépense publique, les prélèvements obligatoires, le déficit ou la dette si l’on ne parle pas également de ce que l’on peut économiser dans le champ de la sécurité sociale au sens large.
La moitié de ces 50 % de dépenses publiques est dévolue aux retraites. Par conséquent, si l’on veut diminuer les dépenses publiques ou changer de paradigme en matière de comptes publics, il faut proposer une réforme des retraites.
Certains ont proposé une réforme de bon gré, comme le président Chirac. D’autres l’ont fait contre leur gré : je rappelle que le président Sarkozy n’avait pas prévu la réforme des retraites qu’il a finalement déposée sur le bureau des assemblées, et qui a fait reculer l’âge légal de départ à la retraite. Il l’a fait parce qu’il fallait réaliser des économies.
C’est aussi le cas du président Hollande qui se refusait à mener une telle réforme et qui a finalement dû se résoudre à augmenter le montant des cotisations, confronté qu’il était au paradigme des comptes publics dont je vous parle. C’est enfin le cas du président Macron, qui a mis de côté la réforme de l’âge de départ à la retraite pour mettre en avant un système de retraite par points.
En vérité, la question de la dépense publique, du déficit public et du taux des prélèvements obligatoires relève aussi évidemment du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Ce que j’évoque, monsieur le sénateur, ce n’est pas la fusion des textes budgétaires, puisque le conseil des ministres ne l’a pas décidé et que ce n’est pas non plus ce que propose le Gouvernement dans le cadre de la future révision constitutionnelle. Ce que je veux dire – et je ne suis pas le premier à le faire, car on en débat depuis très longtemps déjà –, c’est que l’on pourrait peut-être avoir une discussion commune sur les recettes, avant d’aborder des questions différentes en matière de dépenses.
Le volet des dépenses est le second point que je veux évoquer : oui, le Gouvernement a toujours dit qu’il souhaitait passer progressivement d’un système assurantiel à un système universel. De ce point de vue, nous avons sans doute des opinions différentes, notamment avec le côté gauche de l’hémicycle.
En tout cas, l’important est non pas la fusion entre projet de loi de financement de la sécurité sociale et projet de loi de finances ou la fusion entre sécurité sociale et budget de l’État, mais de savoir comment on peut financer la solidarité sociale. Et ce n’est pas très grave de la financer par l’impôt plutôt que par les cotisations !