Cette hausse a pour origine la moindre dépense enregistrée sur le compte d’affectation spéciale, le CAS, « Transition énergétique », conséquence de la réévaluation à la baisse des compensations liées à l’obligation d’achat d’électricité d’origine renouvelable.
En annulant près de 600 millions d’euros sur le CAS « Transition énergétique », l’équivalent en recettes de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, ou TICPE, est donc affecté au budget général, pour atteindre 13, 9 milliards d’euros. En soi, monsieur le ministre, ce n’est pas critiquable, car nous n’avons peut-être pas besoin de plus d’argent pour l’achat d’énergies renouvelables. Je m’étonne simplement que ces révisions n’aient pas été présentées dès la présentation du PLF 2019, puisque la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, connaissait ces chiffres dès le 12 juillet dernier. Vous auriez ainsi pu affecter ce surcroît de TICPE à la vraie transition énergétique.
Ce qui est bien davantage contestable, en revanche, c’est que la hausse de recettes de TICPE bénéficiant au budget de l’État ne s’accompagne aucunement d’un accroissement des ressources consacrées à la transition énergétique. Je pense que la question de l’accompagnement de la transition énergétique sera l’objet de toutes nos attentions lors du PLF 2019. Pour notre part, nous contestons le fait que la fiscalité énergétique soit avant tout considérée comme une fiscalité de rendement.
Malgré la baisse de presque 600 millions d’euros des « dépenses pilotables », les dépenses sont globalement en hausse de 500 millions d’euros par rapport à la dernière estimation.
Concernant les ouvertures et annulations de crédits, les deux tiers des ouvertures concernent la mission « Remboursements et dégrèvements » et sont uniquement liées aux évolutions de recettes fiscales brutes. La mission « Engagements financiers de l’État » enregistre pour sa part l’impact de l’inflation sur la charge de la dette.
Globalement, les ouvertures sur les missions couvrent classiquement quelques sous-évaluations. Je pense à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ou à la mission « Cohésion des territoires », qui doit couvrir des besoins supplémentaires en hébergements d’urgence et en aides personnelles au logement. Tout cela est assez classique.
La mission « Enseignement scolaire » bénéficie aussi de crédits pour assurer la paie du mois de décembre des enseignants. Enfin, l’annulation la plus importante concerne la mission « Travail et emploi », et a pour origine des dépenses moins élevées pour plusieurs dispositifs d’aide à l’emploi.
Monsieur le ministre, nous ne pouvons que constater que vous êtes parvenus à exécuter le budget de cette année sans recourir au décret d’avance et avec des mises en réserve réduites. Je le reconnais volontiers, votre effort de sincérisation est réel.
Nous aurons l’occasion d’y revenir, mais la question la plus délicate concerne bien sûr la mission « Défense ». Les ouvertures de crédits nécessaires pour financer les OPEX et les missions intérieures sont entièrement compensées par des annulations de crédits des autres programmes de la même mission. Le Gouvernement n’applique donc pas l’article 4 de la loi de programmation militaire, qui pose le principe de solidarité interministérielle pour le financement de ces surcoûts, d’autant que ceux-ci proviennent d’une sous-budgétisation manifeste, dénoncée dès l’examen de la loi de finances initiale.
Certes, nous prenons acte du dégel de 408 millions d’euros en autorisations d’engagement et des 272 millions d’euros en crédits de paiement sur la mission, mais cela n’éteint pas complètement les critiques susceptibles d’être formulées sur votre gestion des surcoûts des OPEX.
En conclusion, je dirai que le projet de loi de finances rectificative que vous nous présentez correspond à une exécution plus saine des crédits que sous le précédent quinquennat, où les gouvernements avaient recours à beaucoup de mesures artificielles. Aucune mesure, hormis peut-être celles qui portent sur la mission « Défense », ne saurait justifier l’opposition de la majorité sénatoriale.
Toutefois, ce projet de loi s’inscrit aussi dans la droite ligne du projet de loi de finances initiale que vous aviez présenté l’an dernier et dont nous n’avions pas approuvé tous les choix ; nous avions exprimé notre désaccord au moins sur certains d’entre eux, dans le domaine fiscal, notamment.
C’est la raison pour laquelle j’ai proposé à la majorité sénatoriale de s’abstenir sur le texte qui nous est aujourd’hui soumis, ce qu’elle a accepté. Si le projet de loi de finances rectificative a été rejeté en commission, c’est en raison du vote défavorable de l’opposition qui siège du côté gauche de l’hémicycle.
Voilà ce que je voulais vous dire, monsieur le ministre, en saluant – une fois n’est pas coutume ! – l’effort réel de sincérisation auquel vous vous êtes tenu. Pour notre part, nous respecterons vos souhaits, et je n’émettrai pas d’avis défavorable sur les dispositifs fiscaux proposés. D’ailleurs, le nombre d’amendements déposés est très faible, puisque douze seulement ont été déclarés recevables. Le message a donc bien été entendu !