Intervention de Bernard Delcros

Réunion du 19 novembre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2018 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Bernard DelcrosBernard Delcros :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le projet de loi de finances rectificative pour 2018 que nous a présenté M. le ministre se distingue nettement des budgets rectificatifs des années précédentes – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, et les orateurs précédents également – sur plusieurs points qui nous paraissent essentiels.

Il faut relever, d’une part, par l’absence de dispositions fiscales qui affectent chaque année, par anticipation, le budget de l’exercice suivant, et, d’autre part, l’absence de décrets d’avance, qui est, me semble-t-il, une première depuis trente ans.

En somme, ce projet de loi de finances rectificative n’est pas, contrairement aux précédents, un texte à surprise et à effets collatéraux. Il rompt avec une longue pratique que nous avons pu connaître auparavant, consistant à sous-évaluer les dépenses de plusieurs milliards d’euros.

Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Eh bien, que l’intégralité des ouvertures et des annulations du schéma budgétaire pour 2018 aura été décidée par le Parlement. Nous renouons avec l’esprit de la LOLF, en respectant à la lettre le rôle central confié au Parlement en matière budgétaire : autoriser, contrôler et, de manière plus étroite encore, déterminer les dépenses. Ainsi, le rôle dévolu au Parlement est respecté, ce que nous tenons à souligner.

Avec ce projet de loi de finances rectificative recentré, vous poursuivez donc le travail engagé l’année dernière de sincérisation des comptes. Celui-ci explique d’ailleurs, pour partie, la dégradation de plusieurs ratios de nos finances publiques. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors des débats sur le projet de loi de finances.

Nous tenons, avec l’ensemble des membres du groupe de l’Union Centriste, à saluer cette nouvelle donne. Elle est utile à la sincérité du budget, à la clarté de nos débats et à la lisibilité de la politique budgétaire de notre pays. Ce débat sur le chaînage vertueux des finances publiques et, de façon plus générale, sur l’agencement du calendrier budgétaire, nous aurons très certainement l’occasion de le prolonger lorsque seront examinés devant la Haute Assemblée les projets de loi constitutionnelle et organique.

J’en viens maintenant au fond : 1, 7 milliard d’euros d’ouvertures de crédits portant sur seize missions sur sept font l’objet d’une ouverture supérieure à 100 millions d’euros. Parmi celles-ci, l’indispensable ouverture de crédits, à hauteur de 150 millions d’euros, dans la mission « Cohésion des territoires », pour faire face aux besoins en matière d’hébergement d’urgence hivernale ou encore à la hausse des dépenses des aides personnalisées au logement, les APL.

Je citerai encore le dégel du solde des crédits inscrits dans la réserve de précaution du ministère des armées, à hauteur de 272 millions d’euros.

En revanche, comme l’a très justement relevé le rapporteur général de la commission des finances, nous nous interrogeons sur le rabot à hauteur de 577 millions d’euros des crédits alloués au compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », et ce, dans un contexte que nous connaissons et sur lequel je ne reviendrai pas, car nous aborderons le sujet lors de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2019.

J’évoquerai maintenant les données macroéconomiques. Si la sincérité budgétaire se vérifie par le recentrage du projet de loi de finances rectificative autour d’un faible nombre d’articles – neuf au total –, elle se mesure aussi dans la crédibilité des hypothèses macroéconomiques.

L’objectif d’un déficit public à 2, 6 points du PIB, c’est-à-dire en deçà du seuil fatidique des 3 %, est confirmé. Les prévisions initiales de croissance à 1, 7 % sont également maintenues ; nous espérons bien entendu que ce taux pourra être atteint. Le niveau des dépenses pilotables de l’État est réduit à hauteur de 600 millions d’euros, ce dont nous nous réjouissons.

Toutefois, le déficit budgétaire s’établit à 80 milliards d’euros, en hausse de 12, 3 milliards d’euros par rapport à l’exercice 2017 – un niveau tout de même inquiétant, notamment au regard des nuages conjoncturels qui s’amoncellent. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

Je veux cependant, à ce propos, insister sur le fait que la prévision de déficit est désormais inférieure de 5, 7 milliards d’euros à celle qui était initialement prévue : 80 milliards d’euros contre les 85, 7 milliards d’euros qui étaient prévus.

Nous le savons, à l’avenir, nous devrons faire mieux. Tel sera l’un des objets du débat de jeudi prochain. L’enjeu n’est pas mince et l’équilibre à trouver est toujours délicat : il faut assainir nos finances publiques au bénéfice des générations futures sans pénaliser aujourd’hui les plus fragiles de nos concitoyens.

Je tiens enfin à souligner la traduction à l’article 8 du projet de loi de finances rectificative de l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, qui a été inséré sur l’initiative de la commission des finances du Sénat.

Cette disposition procède de la même logique : redonner toute sa portée à l’autorisation et au contrôle parlementaires. En remettant en cohérence les plafonds d’emplois et les crédits de masse salariale votés en loi de finances initiale, elle en améliore la sincérité et l’effectivité. Dès l’année 2018, les plafonds d’emplois des ministères et des budgets annexes sont ainsi abaissés de 10 805 équivalents temps plein travaillé.

Sur ce projet de loi de finances rectificative pour 2018, la majorité des membres du groupe Union Centriste a fait le choix de l’abstention, pour des raisons de cohérence au regard de sa position lors de l’examen de la loi de finances initiale.

Toutefois, à titre personnel, comme d’autres collègues de mon groupe, je voterai ce texte. En effet, nous tenons à insister sur l’effort de sincérité, donc de crédibilité, accompli par le Gouvernement dans la conduite de l’exercice budgétaire 2018. Nous ne pouvons que vous encourager à poursuivre dans cette voie, monsieur le ministre.

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