Intervention de Sylvie Vermeillet

Réunion du 21 novembre 2018 à 14h30
Lutte contre la désertification bancaire dans les territoires ruraux — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Sylvie VermeilletSylvie Vermeillet :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, Éric Gold a rappelé le cadre et les objectifs de sa démarche.

Je souscris à ses constats, car, quelles que soient les caractéristiques de nos territoires, nous sommes tous confrontés à une dévitalisation progressive. Pour autant, nous sommes convaincus qu’il n’y a pas de fatalité et qu’une action résolue et conjointe permettra d’enrayer ce phénomène.

La proposition de loi contient deux solutions complémentaires à chacun de ses deux premiers articles, le troisième étant classiquement dévolu au gage sur les tabacs.

L’article 1er prévoit la création d’un fonds dédié au maintien et à la création de distributeurs automatiques de billets dans les communes rurales.

L’article 2 étend la mission d’aménagement du territoire confiée à La Poste, en prévoyant que chacun de ses 17 000 points de contact doit comprendre un distributeur automatique de billets.

Cependant, juridiquement, le mécanisme proposé n’est pas opérant.

En effet, il est proposé la création d’un fonds ad hoc, financé essentiellement par l’affectation d’une part des ressources du fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant conclu des emprunts à risque. Or les ressources de ce fonds ont été calibrées afin de répondre aux demandes qui lui ont été soumises. Nous le savons tous, le fonds de soutien joue un rôle essentiel pour les collectivités concernées : il ne saurait être question de le réduire. La taxe qui l’abonde devrait être augmentée, ce qui n’est pas prévu par la proposition de loi.

Par ailleurs, l’abondement envisagé du fonds n’est juridiquement pas possible. Il s’agirait de prélever une fraction du produit de la taxe prévue à l’article 235 ter ZE bis du code général des impôts – en clair, de réaffecter une part de la taxe dévolue à la résorption des emprunts toxiques souscrits par les collectivités. Or l’article 36 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 précise que « l’affectation, totale ou partielle, à une autre personne morale d’une ressource établie au profit de l’État ne peut résulter que d’une disposition de la loi de finances. » Il est donc impossible, dans le cadre de la présente proposition de loi, de réaffecter une taxe déjà fléchée.

Les ressources du fonds dont la création nous est proposée ne sont donc pas assurées.

Éric Gold a rappelé qu’il nous revenait de répondre aux difficultés constatées dans les territoires et que notre débat résonnait particulièrement en cette semaine de Congrès des maires. Je partage son point de vue et j’ajoute qu’il nous appartient également de répondre concrètement à ces difficultés.

Je souhaite rappeler quelques éléments chiffrés concernant l’activité bancaire.

Notre pays compte plus de 56 000 distributeurs, répartis sur 14 000 communes. Depuis 2011, la baisse du nombre de retraits en espèces s’élève à 6 % : elle est supérieure à la diminution du nombre de DAB, qui est de 4, 1 %. Parallèlement, les paiements par carte bancaire ont augmenté de 43 % ; ils représentent un volume de 10, 5 milliards d’euros en 2017. Cette hausse résulte à la fois de coûts en baisse, permettant de payer par carte dès 1 euro, et d’une commodité accrue par le « sans contact », pour lequel le volume de paiements a été multiplié par cinq entre 2015 et 2017. Les paiements sans contact représentent désormais 10 % du volume de paiements par carte bancaire.

Actuellement, les 6 305 agences postales communales peuvent délivrer jusqu’à 350 euros en espèces par semaine et les 2 746 relais postes commerçants, jusqu’à 150 euros en espèces par semaine.

Certains établissements bancaires ont déjà signé plus de 4 000 conventions avec des commerçants pour qu’ils installent dans leurs locaux des distributeurs automatiques de billets.

Nous attendons la sortie du décret relatif au « cashback », qui permettra aux commerçants de délivrer des espèces à l’occasion d’une opération pour l’achat d’un bien ou d’un service.

L’implantation d’un distributeur automatique de billets coûte environ 90 000 euros et son entretien annuel, de l’ordre de 14 000 euros.

Pour autant, ces révolutions des usages posent des difficultés à certains de nos compatriotes, pour des raisons territoriales ou générationnelles. Une réponse immédiate est donc nécessaire pour assurer l’égal accès aux espèces pour tous.

Cette réponse n’impose toutefois pas de recourir uniquement aux DAB. Qui dit en effet distributeur automatique de billets dit également contraintes de sécurité des agents et du transport de fonds et exigences réglementaires renforcées.

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