Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, lutter contre la désertification bancaire dans les territoires ruraux est un objectif que nous partageons tous dans cet hémicycle.
Aujourd’hui, quel est le constat ? Éric Gold et les membres du groupe du RDSE déplorent – à juste titre – les multiples fermetures de distributeurs automatiques de billets en zone rurale.
Plusieurs raisons expliquent ce recul.
Les banques avancent notamment que les coûts de gestion et de sécurité sont trop élevés. Il en résulte un coût social et économique lui-même élevé pour les résidents de ces zones, ainsi que pour les communes désertées en tant que telles, avec les conséquences que l’on connaît pour leur attractivité.
Aujourd’hui, le contexte dans lequel s’inscrit cette problématique est bien celui d’une révolution des usages bancaires, avec l’essor de nouvelles technologies et un recours plus fréquent à la carte pour des achats directs, comme le paiement sans contact.
C’est pourquoi ce phénomène dépasse largement nos frontières. Je donnerai deux exemples : en trois ans, plus de 2 800 agences bancaires ont fermé outre-Manche – 60 agences par mois – affectant 2, 7 millions de personnes. En Franconie, région située au nord de la Bavière, la Sparkasse a lancé en 2015 un concept d’agence itinérante, afin de maintenir un service de proximité.
Il est clair que les équipements bancaires, quels qu’ils soient, leur présence même ou leur maintien en état de bon fonctionnement participent de la vitalité économique des centres-bourgs.
Cette question nous anime évidemment et continûment ici au Sénat, car cette désertification fait courir plusieurs risques.
Une partie des usagers fera le choix d’une consommation extérieure à leur lieu de résidence, et ce pour des consommations courantes qui auraient pu rester locales. Ce sont les grandes surfaces en périphérie et en entrée de ville qui en bénéficieront alors, ou les acteurs du e-commerce.
Autre risque : une partie des clients, ceux-là mêmes pour lesquels les déplacements sont rendus difficiles ou impossibles du fait de leur âge, par exemple, se sentiront légitimement marginalisés en raison d’un accès limité à ce type de service.
C’est pourquoi le texte que vous défendez aujourd’hui dans l’hémicycle vise à maintenir ou à créer ces distributeurs dans les communes qui souffrent de ce que vous appelez la « désertification bancaire ».
Afin de renforcer le maillage territorial des bureaux postaux avec les DAB, il est envisagé de créer un fonds spécial géré par la Caisse des dépôts et consignations, ciblé sur les territoires les plus en difficulté, c’est-à-dire les territoires dont les populations sont peu familières avec les nouveaux usages ou ceux dont la couverture numérique n’est pas assurée.
La proposition de loi fixe aussi un critère de distance minimale des bureaux de La Poste comportant un distributeur automatique de billets.
Derrière ce dispositif se pose la question, qui ne se limite pas aux DAB, du recours aux espèces et de leur disponibilité.
Alors que l’utilisation de la monnaie demeure encore essentielle, ce texte nous donne l’occasion de débattre – et c’est important – des conditions d’accès aux espèces, notamment des accès alternatifs. Il existe ainsi un accès auprès des commerçants dans le cadre de ce que l’on appelle les points relais ; il existe également un accès par la délivrance d’espèces à l’occasion d’une opération de paiement pour l’achat de biens et services, connue sous le terme de cashback. Celle-ci est désormais prévue par le code monétaire et financier. Il faudra mesurer l’impact de cette mesure dans les territoires les moins bien pourvus.
Enfin, nous sommes sensibles aux arguments de Mme la rapporteur. En premier lieu, le risque existe qu’un décalage se crée entre la solution globale proposée et les multiples réalités locales existantes, justement en fonction des pratiques ou des dispositifs alternatifs existants ou à venir ; en second lieu, le risque existe d’un désengagement des opérateurs privés du maillage territorial en distributeurs automatiques de billets. Cette substitution doit rester l’exception.
Le comité de pilotage de la filière fiduciaire, animé par la Banque de France, a mandaté un groupe de travail sur l’accessibilité aux espèces. Celui-ci devrait rendre ses conclusions d’ici peu, notamment sur la détermination des territoires les plus affectés par ces difficultés.
Ce constat exhaustif et fiable des situations de défaillance avérée dans l’accès aux espèces sera important, afin de déterminer les critères géographiques, démographiques ou économiques, qui pourraient déclencher l’éventuel octroi d’une aide.
Si le groupe La République En Marche salue la problématique exposée ici par le groupe du RDSE, …